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 [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]

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[1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Vide
MessageSujet: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeVen 23 Juil - 23:11




    Spoiler:

    Pas la plus petite lumière n'éclairait l'antique château. Bien que son ombre planait sur toute la ville, il avait perdu sa superbe du temps où il hébergeait les Habsbourgs d'Autriche. Le soleil se couchait sur Prague, le berceau du Saint Empire, qui n'était plus qu'une capitale fédérale parmis tant d'autres. L'activité s'y était quelque peu estompée, loin de la folie des grandes cérémonies qui animaient ses longues nuits hier encore. Mais une menace pesait sur le pays.

    Là, dans une pièce des plus spacieuses du palais, une silhouette faisait les cents pas sous les yeux d'une dizaine d'hommes en veste noire et à l'air grave. La femme les surplombait de par sa grande taille et sa position, un lustre en cristal baignait ses cheveux blonds d'une paisible lueur. Des yeux d'un gris glacial fixaient la ville depuis la fenêtre sans dire un mot. Mais ce silence de loin inutile lui retournait les entrailles, aussi voulu t-elle le briser sans le moindre scrupule.

    - Mais pour qui il se prend cet idiot ?! J'avais dit que je ne voulais pas voir un seul allemand entrer dans Prague, et je me retrouve avec un régiment !

    Contrairement à ce que le ton employé pouvait suggéré à ceux qui ignoraient tout de la conversation passée, Helenka ne proférait aucune insulte vis à vis d'un certain allemand, mais plutôt de son propre gouvernement. Le président Emil Hácha avait défendu son armée de repousser les troupes allemandes, leur cédant classieusement le passage au mépris de la nation qu'il représentait. C'est ainsi que depuis la fenêtre de sa chambre, elle pouvait déjà contempler la marche des officiers SS qui traversaient la Vieille Ville.

    Parfois, même quand on fait de son mieux, on n'obtient pas le résultat souhaité. Après, c'est toujours plus simple de rejeter la faute sur un autre, quand on découvre dans les yeux d'un compagnon que le problème, le grain de sable dans les rouages, c'est nous. Helenka avait toujours été trop impulsive, à toujours tout vouloir sur le champ sans se soucier du commun du mortel. Cette vilaine habitude, elle pensait que ça passerait toujours, mais le temps était venu de se remettre en question. Et la jeune femme était loin d'être prête à affronter les erreurs causées par sa naïveté.

    - Si Hácha avait ordonné de riposter, tous nos hommes y seraient probablement passés. Il a fait le bon choix et vous le savez.

    Helenka ne broncha pas, réfléchissant à toute vitesse afin de trouver un moyen de les sortir de ce pétrin. Ils n'étaient pas responsables, alors pourquoi son pays devait lui aussi pâtir de la folie d'un dictateur, de la stupidité d'un peuple et de la cruauté d'une armée ? Elle refuser d'attendre voir son heure arriver, confortablement assise sur un siège comme eux, qui remettait leur destin entre les mains de Dieu. Mais elle, elle ne savait plus croire. Ni au destin, ni au hasard, ni même en Dieu. Et une petite voix dans sa tête lui soufflait que Lukas serait bien loin de lui venir en aide, connaissant le caractère fuyant de son frère.

    La solution était évidente pour elle, définitivement suicidaire pour toute personne saine d'esprit. Discuter avec Ludwig et lui trancher la tête une fois le dos tourné. Idée à prendre dans son sens propre ou figuré. Se creuser la tête, voilà une solution qui mènerait à la solution, sauf que cette activité cérébrale était bien loin de convenir à une Helenka au bord de la crise de nerfs. Elle se passa une main sur le front, peu habituée à éprouver un stress aussi intense. Son mal de crâne lui faisait l'effet d'un tisonnier chauffé à blanc plaqué sur les tempes. Les regards tourmentés de ses collaborateurs ne sont pas là pour la rassurer.

    Aussi, plutôt que de se perdre dans la douleur, elle choisit de se perdre dans les souvenirs.

    • Autriche, moitié du 10ème siècle.
      Un froid glacial s'infiltrait par les fentes qui striaient de ça et là les murs du château, bien vite balayé par le feu qui crépitait dans la gigantesque cheminée. Dans cette pièce, de jeunes enfants jouaient et se chamaillaient, sous les yeux fatigués d'un couple plus âgé. Une femme aux yeux verts et à la chevelure décorée de fleurs discutait avec un homme à lunettes et à l'attitude aristocratique. Peut importe ce qu'il se disait, leurs paroles étaient largement couvertes par les pleurs et les hurlements de plusieurs nations en bas âge. D'un côté, la Serbie et la Croatie jouaient avec la Slovénie. De l'autre, la Pologne et la République Tchèque tramaient on ne savait quoi dans le dos de leurs amis, ce qui avait le don d'inquiéter aussi bien le couple austro-hongrois que leurs complices la Roumanie et la Slovaquie. Rien d'étrange ne s'était encore produit ce soir, et la tempête qui faisait rage dehors ne présageait rien de très reluisant. Pourtant.

      Aussitôt qu'un bruit se fit entendre derrière la porte, Helenka redressa la tête et se leva d'un bond. Son premier réflexe fut de se glisser discrètement derrière Autriche, s'agrippant au pan de sa veste pour ne pas que ses jambes se dérobent sous le poids de son corps. Un homme se tenait devant l'entrée. Son apparence particulière la surprit, aussi fronça t-elle ses sourcils clairs on découvrant ces cheveux blancs et ces yeux écarlates qui brillaient dans l'obscurité de la nuit. Elle sentit, derrière son dos, son frère Lukas qui tentait lui de fuir la vision de cet étrange petit diable. Roderich se détacha d'eux, les abandonnant à Elizaveta, malgré les plaintes de ceux-ci. C'est alors que, malgré le peu de cas qu'elle pouvait faire de celle qu'elle considérait comme rivale, Helenka remarqua le regard emplie d'animosité qu'abhorrait la Hongrie en voyant ce qui semblait être le royaume de Prusse.

      Après quelques mots échangés, l'Autriche leur revint un étrange paquet entre les mains. Et l'homme était déjà loin. Le paquet tout juste installé dans un canapé à l'écart de la forte concentration d'enfants, commença alors à s'animer, à la stupéfaction générale. Helenka contourna Elizaveta et passa outre son interdiction. Elle voulait voir ce que l'on lui cachait. Des mains minuscules écartèrent les langes qui masquaient un joli visage poupin, dont de petites mèches blondes garnissaient le crâne et où s'inscrivaient deux grands yeux bleus. Elle, se contenta de pousser une petite exclamation contrariée et de faire la moue. On leur avait amené un enfant. Feliks et Lukas, ainsi que les jeunes autres nations, lui emboîtèrent le pas afin de découvrir ce qui avait tant rebuté leur camarade. Roderich, déchiffrant une expression de peur sur le visage de l'enfant, décida de les congédier dans leurs chambres. Le jour suivant, on leur annonça qu'ils allaient vivre avec le Saint Empire Romain Germanique.


    Trois coups frappés contre la porte massive sortirent la jeune femme de sa rêverie, la ramenant à la triste réalité contre laquelle il lui semblait définitivement impossible de lutter. Après les coups, ce fut une vois grave et tonitruante qui lui explosa les tympans. Son allemand peu aiguisé datant de plusieurs siècles lui permit au moins de comprendre le message global, sans le cocktail de subtilités dont dénotait le ton agressif. En clair : « Ouvrez sur le champ ou on transforme votre pays en cimetière. » Helenka fit volte-face et arrêta d'un signe de main ses convives et ses subordonnés qui s'avançaient de mauvaise grâce pour ouvrir la porte. Il n'en était pas question. Personne n'irait ouvrir la porte à un allemand tant qu'elle était sous ce toit.

    - Le premier d'entre vous qui ouvre cette porte, je me tricote un pull avec ses intestins.

    La phrase avait été prononcée d'un ton parfaitement calme, malgré les circonstances présentes. Une menace qui fut si souvent entendue entre ses murs qu'elle ne fit frissonner personne. Et en effet, on n'osa pas ouvrir la porte. Par crainte de voir ce qui pouvait bien se cacher derrière. Les battements de son coeur commencèrent à s'envoler, au même titre que le claquement de bottes militaires qui emplissait les couloirs. Peur, ou simple appréhension, Helenka n'aurait su le dire. Elle n'avait jamais eu peur de cette Allemagne qui décidait maintenant d'écraser ses confrères. Il y avait eu la Prusse, il y avait eu l'Autriche. Jusqu'où irait Ludwig -et son chef- avant de stopper cette expansion qui les mèneraient tous à leur perte ?

    Une seule chose était certaine. Le Reich n'attend pas, et une simple porte n'était pas en mesure de s'opposer à son avancée.
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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeSam 24 Juil - 17:20

    « Vous aviez le choix entre la guerre et le déshonneur. Vous avez choisi le déshonneur, et vous aurez la guerre. »

    Voir la perfide Albion se faire ainsi réprimander avait eu un avant-goût de victoire. La réunion avait été des plus concluantes pour le Reich qui ne s’était autorisé aucun sourire devant les vaincus – les rires sardoniques n’étaient pas sa tasse de thé, il leur préférait une réplique mordante. L’image de l’Albion, et de son comparse français, baissant ou détournant les yeux pour que son image ne s’y reflète pas n’avait besoin d’aucun commentaire.

    Du bout des lèvres, du bout du cœur, ils lui avaient arraché la promesse de ne faire nul mal à leurs protégés. Le Reich avait accepté, à demi-mot : derrière le masque, les lèvres avaient un pli ironique. Paroles, paroles. Paroles dans le vent sans poids, paroles sans relief. Que des mots. Il n’était plus le temps où une promesse était respectée. Aujourd’hui était le temps des trahisons.

    Avec cette rapidité qui allait le dépeindre comme une entité que rien ne peut arrêter, le Reich posa ses bottes sur les pavés de Prague. Cela faisait bien longtemps qu’il ne les avait plus touchés ces pierres. Un humain aurait eu la nostalgie de cette époque, Ludwig n’avait qu’un gonflement d’orgueil en voyant que les choses n’avaient pas tant changés depuis, et que beaucoup d’œuvres créées à l’époque où il régnait ici demeuraient encore. Comme si elles attendaient que leur légitime propriétaire revienne poser les yeux sur elles.

    Le château, lui, avait bien changé. Chaque personne qui l’avait habité y avait laissé sa trace, pour entrer dans l’Histoire. Helenka devait avoir bien changé elle aussi. Ludwig ne se rappelait que d’une gamine blonde, souvent échevelée qui ne cessait de le martyriser sous prétexte qu’il n’avait pas à lui donner d’ordres. Qu’était-elle devenue depuis ? Une femme bien rangée qui faisait de la dentelle devant sa fenêtre, regardant d’un œil morne l’avancée des soldats ? Ou une créature acariâtre, à demi folle, qui attendait qu’il avance sous sa fenêtre pour lui verser une bonne dose d’huile bouillante ?

    Dans les deux cas, Ludwig franchirait la porte qu’elle le veuille ou non.

    Trois coups comme pour annoncer le lever de rideaux, avec une formule claire dont seul le ton annonçait clairement les intentions. Le débit tchèque qui lui répondit lui était incompréhensible mais le message était limpide. « Ouvre donc la porte si tu l’oses ».

    Crocheter n’avait jamais été le fort de l’Allemagne. Tout ce qui demandait la délicatesse n’entrait pas dans ses compétences – hormis quelques menues petites choses qui n’ont pas leur place ici. Dans cette situation, il n’y avait qu’une seule solution : se la jouer bourrin.

    BOUM

    La sublime porte finit en planches arrachées et multiples échardes plantées au sol. Le souffle de l’explosion, pourtant calculée pour ne pas faire « trop » de dégâts, avait soulevé pas mal de poussières, et fait pleuvoir quelques gravats. Les vieux châteaux s’effritent toujours un pas.

    Comme un gamin qui s’amuse, Ludwig fit mine de frapper à la porte, maintenant inexistante.

    - Toc toc. Oh je vois que c’est ouvert, je puis donc entrer.

    Enjambant les conséquences de sa petite blague personnelle, Ludwig stoppa à quelques mètres d’Helenka. Assez près pour lui parler, assez loin pour éviter un coup de griffe. Elle n’avait pas changée. Toujours ce tic de lever le menton pour montrer sa supériorité. Oui, toujours aussi charmante.

    - J’admire ta façon d’accueillir des visiteurs. Une invitation à boire m’aurait paru moins engageant de ta part. Tu es bien du genre à y mettre du cyanure.

    Oh, elle le haïssait, il le sentait. Mais aujourd’hui c’est lui qui avait le dessus. Tout un régiment attendait dans son dos, les armes à la main, prêt à obéir à la moindre de ses sollicitations. Il n’était plus le gamin pleurnichard qu’elle avait connu.


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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeSam 24 Juil - 22:42


    L'enfoiré. Comme si arriver jusqu'à sa porte avec tout un régiment à sa suite n'était pas suffisant, il ne se gênait pas pour détruire ce qu'elle avait crée. La poussière lui irritait les poumons et la gorge, lui arracha une toux légère et quelques larmes. Il se croyait drôle, probablement, à croire qu'une armée et quelques menaces pouvaient faire plier l'arrogance de la République tchèque. C'était mal la connaître. Mais si il cherchait les ennuis, il pouvait être sûr de récolter bien plus que quelques insultes glissées dans une conversation.

    D'un signe de menton, Helenka intima à ses collègues de quitter les lieux. Elle ne voulait pas les impliquer dans ses affaires, et ils ne représentaient visiblement aucun intérêt aux yeux de Ludwig. Ses hommes leurs cédèrent aussitôt le passage. Il n'y avait plus que lui. Il n'y avait plus qu'elle. Si seulement ils n'étaient que de simples mortels. Elle aurait pu sortir, comme par magie, un pistolet de sa poche, et lui tirer entre les deux yeux. Il serait mort, et elle aussi sans doute, exécutée par cette horde de soldats. Son âme serait montée au ciel, sans regret.

    Mais on ne refait pas le monde avec des 'si'. Seul l'action importait alors, quand l'avenir de tout un monde se joue devant vos yeux. Elle avait pourtant, devant ses yeux, l'un des précurseurs de la fin d'un monde pour en reconstruire un sous d'autres critères. Si user de la force lui était impossible à cet instant, les joutes verbales étaient toujours sa spécialité. Il fallait le faire flancher, gratter la couche de roc pour faire fondre l'iceberg. L'insulte, tout simplement. C'est donc en guise de salut qu'Helenka s'avança vers lui, lui tournant autours comme un vautour, un air faussement joyeux imprimé sur le visage.

    - Tu tiens vraiment à détruire toute ma maison ?

    Ce n'était pas vraiment une question. Ludwig ne serait pas venu avec autant de soldats s'il s'agissait d'attentions pacifiques. Penser à tous ces hommes, ces inconnus qui écumaient son palais, la dépouillait de ses biens. C'était toujours le même refrain, et si Ludwig venait lui annoncer qu'il comptait habiter son château, elle n'aurait pas été surprise. Evidemment, elle aurait tout fait pour le faire fuir, mais l'Allemagne était un enfant capricieux qui n'était jamais contenté. En cela, ils étaient similaires, et Helenka comptait mettre un point d'honneur à faire la différence.

    - Soit gentil, dis à tes petits copains de ne pas toucher au mobilier. Comme dit le proverbe, on ne donne pas de nourriture au cochon.

    On aurait dit une mère faisant la leçon à son fils, lui demandant de s'occuper davantage de sa bande d'amis. Ce genre de pensée la révulsait. Elle voulait se convaincre qu'elle était encore en mesure de le vaincre, qu'il restait toujours en lui le souvenir du petit garçon faible qu'il était autrefois. Elle le regrettait, ce Ludwig, tout comme il lui arrivait de regretter les sévices qu'elle lui avait fait subir. Ils n'étaient que des enfants, pourtant. Et maintenant, elle se retrouvait à se complaire en politesses inutiles devant lui. Pitoyable.

    • Autriche, moitié du 10ème siècle.
      Les quelques rayons qui venaient signaler le petit jour commencèrent tout juste à s'abattre sur les fenêtres du château quand Helenka quitta sa chambre. On avait installé le Saint Empire dans la chambre la plus proche du couple austro-hongrois, pour plus de sécurité. La jeune fille se glissa à pas de loup vers la porte qui jouxtait celle de la chambre de Pologne et de son frère. Avec la précaution d’une professionnelle, elle tourna délicatement la poignée et laissa juste assez de place pour pénétrer à l'intérieur. Sa démarche légère dénotant de plusieurs années de pratique lui permit d'arriver jusqu'au lit de l'enfant sans attirer l'attention. Elle se pencha au-dessus du petit garçon endormi, le fixant comme un rapace planant au-dessus de sa proie. Elle observait silencieusement la poitrine de Ludwig -car tel était son nom- se soulever au rythme de sa faible respiration.

      Helenka, les yeux plissés, était hantée par la jalousie. Elle n'avait jamais été aussi ignorée par Roderich, qu'elle considérait pourtant comme son père, depuis l'arrivée pas plus tard qu'hier de cet enfant dont personne ne savait rien. Toute l'attention avait été concentrée sur le petit être au corps faible et malade. Pourtant, il avait tout pour lui, le malade. Un large visage aux joues roses et au teint de lait, de grands yeux d'un bleu tendre, de fins cheveux dorés. Les siens, constatait t-elle chaque jour dans le miroir, était trop ternes, trop pâles pour être blonds. Ses yeux étaient trop gris pour être bleus, son visage trop pointu, sa bouche toujours tordue en un rictus inconscient. Et lui, il venait, comme ça, s'incruster dans son espace vital, s'approprier leur ancienne salle de jeu, s'approprier sa famille. Elle ne l'aimait pas, elle ne pouvait pas. Et elle trouverait un moment pour faire disparaître cette expression radieuse de ce visage paisible.

    Encore un moment d'égarement. Mais ce n'était pas le même homme qui lui faisait face aujourd'hui. Elle s'était pourtant préparée à l'affronter. Depuis le temps qu'ils ne s'étaient pas retrouvés l'un en face de l'autre, l'image d'un petit garçon malade s'imposait toujours malgré elle. Un moment, elle se demanda pourquoi, pourquoi il avait tant changé. Un peu plus, et elle s'accusait d'être coupable de ce changement soudain d'attitude. Elle avait été odieuse, sûrement, mais ne ressentait pas le moindre remords à ses enfantillages qui avaient fait sa jeunesse.

    Helenka ne culpabilisait jamais. Quoiqu'il arrive, le mal, c'était les autres, toujours les autres. Seule une personne pouvait la faire changer d'attitude, et c'était Roderich. Elle venait de se remémorer, tout à coup, l'autrichien qui avait été la première victime de l'homme qui fixait sur elle ses grands yeux froids. On aurait pu croire cela impossible, et l'allemand y verrait sûrement de grandes chances de prendre définitivement le déçu, mais la jeune femme commençait à perdre son éternelle assurance. Elle s'approcha un peu plus de Ludwig, lui agrippa fermement le bras et balbitua :

    - Comment... Comment va Roderich ?

    Une petite faiblesse, une seule, qu'elle aurait préférée ne pas laisser entrevoir. Elle n'avait pas eu le moindre contact avec Roderich depuis l'Anschluss, et ce qu'il se racontait dans les rues de Prague était loin de la rassurer sur ce plan. La barbarie nazie commençait à faire le tour de l'Europe. Mais Helenka savait que, peu importe la raison, elle n'aura pas été épargnée longtemps en vue de sa proximité avec l'Allemagne. Même s'il lui coûtait de l'avouer, Ludwig était probablement l'unique personne à pouvoir lui donner de ses nouvelles. Malheureusement.

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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeMer 28 Juil - 21:30

    Plus de soldats, plus d’hommes de pouvoir, plus d’œuvre de seconde main. Juste deux êtres presque aussi vieux que l’univers, aussi cruels et inébranlables que le destin. Alors que des voix criaient à la fin du monde, eux avaient saisi la subtilité du changement qui s’opérait : non pas fin du monde, mais fin d’un monde. Fin d’une époque qui était devenue sécurisante par ses habitudes ; tout allait être à reconstruire selon d’autres règles que le Reich venait dicter par la force.

    Ce n’était pas la première fois qu’ils assistaient à ce changement de scène, que ce soit du côté allemand ou tchèque. Les méthodes étaient tout simplement différentes. Entre eux se dressait l’image de l’autre dans sa version du passé, dans son corps d’enfant. La Tchèquie avait conservé son allure de fille imbue d’elle-même, avec ce pli de la bouche qui lui donnait un air presque snob. Le Saint Empire avait perdu son allure d’enfant à la santé instable, son regard de bête traquée, pour devenir un géant que rien ne semblait pouvoir ébranler. Comme si l’enfant avait été étranglé pour donner naissance à une créature qui n’avait de l’enfant que quelques traits encore vaguement familiers.

    - Tu tiens vraiment à détruire toute ma maison ?

    - Je n’aime pas détruire ce qui me revient de droit. (Il avait fait signe aux derniers soldats présents de se déployer autour du château pour stopper quelques courageux – naïfs – civils qui voudraient sauver leur patrie) Cette porte était de toute façon vermoulue, comme beaucoup d’autres choses ici. Je savais que tu n’étais pas une femme d’intérieure, mais tout de même.

    Sans l’odeur de la peur filtrant dehors par toutes les peaux des tchèques, cette discussion aurait eu les allures de petites piques entre vieux amis. Amis. Ils ne l’avaient jamais été, ils se supportaient, voilà tout. Chacun avait tâché de construire son espace vital loin de l’influence de l’autre. Toutefois les hommes, le destin, en avaient décidé tout autrement.

    • Prague, 30 juin 1420.
      L’enfant s’était levé à l’aube pour adresser une prière à Dieu, puisant ainsi courage et détermination. Ses lèvres se posèrent sur la petite croix qu’il gardait contre sa peau. Par amour pour Dieu, il allait punir ceux qui osaient souiller son nom en usant de rites qui ne le servaient pas. Il n’y avait qu’un seul moyen de prouver son amour à Dieu, et ces êtres n’avaient pas voulu le comprendre. Il était le seul enfant parmi les croisés : chétif, malingre, seuls ses yeux brillaient, de cette lueur d’admiration qu’il pouvait croiser dans les regards qui l’entouraient.

      Dans sa main l’épée semblait énorme, bien trop grande pour qu’il puisse la manier. Ludwig la leva pourtant pour annoncer à ses troupes que le temps était venu. Les croisés entrèrent dans Prague, en même temps que les hussites se déversaient dans les rues. Dans la cohue des corps, des sifflements de l’acier, Ludwig chercha la silhouette presque monochrome d’Helenka.

      La jeune fille l’attendait de pied ferme, ses doigts fins noués autour de son épée qu’elle maniait comme si l’objet n’était qu’un filet d’air. Isolés dans la bulle qu’ils s’étaient formés, les deux nations croisèrent leurs armes, faisant briller l’acier sous le soleil qui illuminait Prague. Plusieurs fois Ludwig sentit l’épée glisser de ses mains enduites de sueur et de sang. Plusieurs fois il chancela sur les pavés, croisant le regard d’Helenka, un regard qui ne l’avait jamais aimé mais qu’il n’aurait pas souhaité détruire pour autant.

      La lueur déclinante du soleil sonna la fin du combat, pour aujourd’hui. Leurs épées respectives pointées sur la poitrine de l’autre, les nations se tenaient en garde, attendant un geste du camp adverse. Ludwig vit Helenka lui tourner le dos, devenir une des silhouettes innombrables qui remontaient les rues. Il attendit que l’ombre les recouvre pour se laisser tomber à genoux, laisser la fatigue le submerger une fois de plus.

      Demain il faudrait encore se battre. Et les jours suivants, et… Ses mains tremblantes cherchèrent la croix.


    Le Reich ne cherchait plus le courage et le repos dans un recueillement silencieux. Le seul Dieu qu’elle adorait se nommait Pouvoir, et demandait son lot de sacrifices quotidiens pour la contenter. La vengeance était son mets favori. Ludwig ne voyait plus que lui, s’oubliant lui-même, oubliant les autres, ne les voyant que comme des pièces qui lui permettaient d’atteindre l’autre bout de l’échiquier.


    Ce n’est pas pour nous que vous vous battez…. C’est pour vous, simplement pour vous.


    Il avait ignoré cette phrase, tout comme il avait ignoré cet homme qui avait été plus qu’un maître : un semblant de père. Oui, le Reich n’acceptait plus comme existence que la sienne, et celles des autres s’ils avaient compris qu’il ne servait à rien de s’opposer à lui. L’Autriche l’avait compris, acceptant l’Anschluss avec une pointe de résignation et un regard éteint envers cet être qui n’était plus son enfant.

    Les ongles de la Tchèque dans son bras lui firent quitter les bribes du souvenir. Ses lèvres avaient formés le nom de Roderich. Malgré son éloignement elle devait avoir eu des échos de l’Anschluss. Que croyait-elle donc : qu’il maltraitait son ancien tuteur, profitant de son ascendance sur lui pour l’humilier ? Oh non, le silence et le mépris étaient bien pires.

    - Je pense qu’on peut dire qu’il va bien, très bien même. Il a pris ses aises chez moi en ramenant son piano dans mon salon. (Il allait passer sous silence les tortures que lui infligeaient l’Autriche pour la bonne tenue de l’heure de la collation) Tu n’as pas d’inquiétude à avoir pour lui, il est entre de bonnes mains.

    La dernière remarque sembla faire tiquer la demoiselle. Il était vrai qu’elle en était presque ironique cette phrase. De bonnes mains, ces mains qui avaient réussi à faire plier l’orgueilleuse Autriche, qui savaient distiller la peur sans toucher les corps ? Aussi vives que des corbeaux, elles ôtèrent les doigts tchèques du bras allemand pour courir sur les meubles anciens qui occupaient la pièce. Une fine pellicule de poussière macula les doigts du gant. Frottant deux doigts l’un contre l’autre, Ludwig regarda la poussière tomber, presque songeur.

    - Tu n’as donc aucune inquiétude concernant la façon dont laquelle je vais te traiter, si cela que tu voulais apprendre. Je ne te ferais pas défiler derrière mes chars, poings liés, devant tout un peuple qui te cracherait sur le visage. Ni ne te maltraiterais en aucune façon.

    Le Reich se contenterait de la museler pour ne pas entendre sa voix, ne pas la laisser donner un avis contraire au sien. Le silence et l’oubli, voilà ce qu’il lui offrait. Elle ne serait plus Tchèquie, juste une région du Reich, un pan de territoire dont les particularités seraient effacés comme n’ayant jamais existé. Peut-être même serait-elle renommée pour mieux l’effacer. Comme si jamais elle n’avait naquit.


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[1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Vide
MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeVen 30 Juil - 17:29


    Ce type était vraiment détestable. Elle voulait le tuer, l'assommer, l'immoler, lui arracher les yeux, le découper en tranche. Rendre misérable le fière Allemagne qui la narguait. Un geste, et ses braves soldats (barrez la mention inutile) étaient déjà loin. Parfait, maintenant elle pouvait lui cracher au visage sans risquer d'être transformé en gruyère. Non, la République tchèque n'avait d'ordinaire pas autant d'idées morbides encrées dans la cervelle, mais l'effet que lui faisait l'allemand était des plus néfastes. Mais soit, elle n'avait strictement rien à cacher dans son château, et sûrement pas des fidèles qui chercheraient à chasser de l'allemand à une heure pareille.

    Contrairement à ce que l'on pourrait croire, Helenka n'était pas de ceux qui engendraient les suicides collectifs. Au contraire, elle évitait d'entraîner ses hommes avec elle. Certains diront qu'elle est juste incapable de se faire respecter, mais la raison était tout autre. Le pays, le peuple, la nation. C'était elle, rien quelle. Tout se réglait entre quatre yeux, à coups de poing, dans la mesure du possible. Donc non, elle avait plus à s'inquiéter pour les autres que pour sa petite personne. Si Ludwig n'avait pas l'âme d'un assassin, celui qu'il servait serait probablement bien loin d'être aussi 'magnanime' envers son peuple.

    - Oh pitié, de quoi aurais-je à m'inquiéter ? Ce n'est pas comme si je pouvais avoir peur de toi, alors s'il te plait ne m'insulte pas.

    Sa voix s'était voulue douce, mais ce ne fut qu'un aboiement qui sortit de sa bouche. Elle n'avait pas peur de lui, elle n'avait peur de personne ici bas. Helenka se voulait maître de son destin, et voilà qu'il débarquait, près à prendre ses aises en se croyant chez lui. Cette ville, c'est elle qui l'avait battis, tout comme le reste de ce pays. Elle ne devait rien à personne, et surtout pas à Ludwig qui se voyait déjà régner en maître sur le reste du monde, suivant son guide partout où il y aurait un peuple à écraser. C'était triste, de voir que mêmes les nations étaient sous le joug de leur dirigeant, qu'ils n'avaient pas plus d'importance que n'importe quelle poudre à canon.

    C'était une vérité que tous connaissaient, mais à laquelle elle avait refusé de se résoudre. Roderich pouvait se défendre, lui n'avait rien à craindre. Mais il avait choisi d'abdiquer. Helenka ne pouvait faire de même. Elle s'était déjà soulevée contre lui, qu’elle considérait pourtant comme son père. Se rendre, c'était signer son arrêt de mort, rien de plus. Ses petits yeux gris ne voyaient que le mal, rien d'autre. Contrairement à Autriche, qui semblait voir Ludwig comme un fils, elle ne pouvait pas s'estimer fière de lui. Elle se rangerait du côté d'Ivan, quoiqu'il arrive. Le sang qui coulait dans ses veines resterait slave, jamais germanique.

      Les réprimandes de Roderich n'y auraient rien changé. L'un comme l'autre, ils étaient nés pour finir ennemis. Aujourd'hui, Prague serait la scène d'un nouvel affrontement. Pas le premier, pas le dernier. Ils n'auraient pas eu leur place sur ce tableau s'ils n'avaient été que de simples mortels. Voilà deux nations, emprisonnées dans des corps d'enfants, prêt à accomplir l'histoire. Une histoire sanglante, marquée par l'acier d'une arme et le sang d'un peuple. Ce n'est que seize ans plus tard que le corps malade de l'un finira par avoir raison de la silhouette fièrement campée sur ses jambes de l'autre.

      Il y en avait eu des croisades. Personne n'aurait pu dire le déclencheur de la guerre. La religion fut l'enjeu qui excusa ce règlement de compte où la tchèque demeura vainqueur si longtemps. Les croisés étaient les premiers à prendre la capitale, puis furent les derniers à s'imposer à leurs ennemis. Du bas peuple, voilà ce qu'Helenka amena pour se défendre contre les fiers soldats allemands. La haine prima, chez elle du moins. Pour elle, la religion n'était qu'un motif parmis tant d'autres. Elle le détestait, lui ne faisait qu'accomplir ses devoirs, sa foi envers Dieu. Rien que leurs valeurs morales les départageaient.

      Une croisade, puis deux, puis trop et quatre, puis cinq croisades. La dernière. Première arrivée, première partie, Helenka n'avait jamais flanché, malgré la douleur. Son erreur fut de concentrer ses forces, d'en faire plus que nécessaire pour prendre le dessus. Souvent, malgré son visage qui ne reflétait rien d'autre que la colère, elle aurait voulu s'effondrer de douleur, se noyer dans le sang pour ne jamais se réveiller. Ces choses, elle ne l'avouera jamais, même pas à Autriche, à personne. Elle continuait à se battre, contre Ludwig qui luttait toujours malgré l'échec. Pourtant, elle s'était surestimée, et n'avait pas tenu aussi longtemps.

      Elle avait trébuché, juste une fois. Son épée avait glissé, au mauvais moment, et il était déjà trop tard. Elle se releva bien plus tard, en apprenant que c'était finit, qu'une majorité de ses hommes avaient acceptés de se rendre, de signer la paix, sans son accord. Qu'aurait-elle pu faire, sinon se plaindre, sinon déclarer faire cavalier seul. Depuis toujours, qu'elle affirmait pouvoir gagner sans l'aide de personne, elle venait de perdre contre celui qu'elle avait juré de faire disparaitre de sa vie, de la vie de Roderich. Les hussites firent table rase, et Helenka se réfugia dans une chapelle. Ici, elle pouvait pleurer sans être vue.


    - C'est drôle, en y repensant. Je veux dire... que mes hussites ait résistés aussi longtemps à tes hommes alors que vous étiez bien plus nombreux.

    Cette phrase s'était échappée de ses lèvres, prononcée entre deux époques, triste et à peine sarcastique. L'Helenka du passé avait parlé pour celle de maintenant, à peine sortie de ses songes. Inutile de dire qu'outre physiquement, la jeune femme n'avait pas changé d'un pouce, et Ludwig sera probablement le dernier à dire le contraire. La blague -qui n'en était pas vraiment une- ne serait pas du goût de l'allemand, mais la République tchèque s'en moquait. Elle ne voulait se souvenirs que de ses victoires, rien d'autres. Elle voulait se convaincre que Ludwig était toujours l'enfant trop faible qu'elle voyait comme un parasite, qu'elle pouvait briser comme une allumette. Il faudrait pourtant se résigner un jour et réaliser que c'était lui qui était sur le point de la mettre échec et mat.

    Helenka demeurait à l'écart, le regard perdu, comme si le monologue de son bourreau ne lui faisait ni chaud ni froid, ce qui était à demi vrai. Son esprit était encore loi, elle qui demeurait pourtant à moins de deux mètres de lui. Même si on avait coutume de qualifier Ludwig de géant (étrange contraste avec l'insecte qu'il était autrefois), Helenka pouvait elle aussi se vanter de sa grande taille, surtout à une telle proximité de son éternel ennemi. L'effet du sang slave, sans doute, mais inutile d'espérer dépasser un jour Katya ou pire, Ivan. Cette expression de dédain, cette façon de regarder les autres, lui conférait une impression de grandeur et de supériorité. Et suivant la logique implacable de la tchèque, un être grand était automatiquement fort et puissant, qui ne se laisse jamais marcher sur les pieds.

    Que faire, telle était la question, se dit-elle en se triturant les mains. Pourquoi elle, pourquoi lui ? Roderich, elle aurait compris. Elizaveta, elle s'en serait doutée. Ivan, ça ne l'aurait pas dérangé. Mais Ludwig, elle aurait préféré éviter. C'était juste une vengeance, un moyen de récupérer ce qu'elle lui avait déjà arraché. Seule cette explication prenait du sens, sinon, pourquoi laisser son frère Slovaquie hors de cette histoire. Ils étaient un tout, autrefois, et maintenant des étrangers. Elle n'osa pas poser la question, de peur de la vérité, de peur qu'on l'ait bel et bien abandonné. Après tout, elle avait l'habitude de se défendre seule contre tous, peu importe où. Qu'Ivan se charge de lui, il pouvait bien ça. Helenka devrait se contenter de dévier, de lancer des piques, comme toujours.

    - Mais croire que je me rendrais sans opposer de résistance, ce serait mal me connaître, n'est-ce pas mon petit Ludwig ?

    Helenka stoppa son manège, arrêtant de craquer ses phalanges aux articulations à présent blanches comme neige. Ses mains coulèrent le long de sa veste sombre, feignant d'ôter la poussière qui aurait pu s'y perdre, comme si se trouver à proximité de l'allemand lui attirerait tous les maux de la terre. Ce geste qui, aux yeux du monde, respirait l'innocence même, était l'unique moyen de vérifier le contenu de ses poches sans paraître suspecte. Ses mains avaient légèrement tressailli, malgré le tissu, au contact avec le métal froid d'un petit pistolet. Un mince sourire à peine perceptible vint illuminer son visage. Au moins elle n'aura pas à l'étrangler de ses mains.

    Elle quitta son pan de mur pour s'avancer vers Ludwig, qui se tenait toujours droit comme un piquet, le visage fermé en un sérieux religieux, ou plutôt militaire en vue de la situation. Elle fit un détour pour se glisser derrière lui, son esprit traversé par l'idée de l'assommer d'un coup bien placé derrière la nuque. C'était sans compter le régiment qui ferait payer l'acte inconscient. Il faudrait comme revoir ses techniques de défense, puisque la tchèque n'avait pas d'autres atouts dans sa manche. La subtilité n'avait jamais fait partie de ses principes, et pourtant il allait falloir jouer avec les nerfs de l'autre pour en tirer quelque chose.

    Comme une jeune femme éméchée le ferait avec un ami de longue date, elle s'appuya sur l'épaule allemande sans crier gare. Au contraire, elle semblait même se mettre à son aise, donnant une légère chiquenaude sur la veste de Ludwig pour y enlever les restes de la porte qui auraient pu s'y accrocher, comme une moule à son rocher. Elle ne l'aimait pas, d'ailleurs présentement rongée par une irrésistible envie de tirer cette tignasse blonde qui avait déjà vécu des pires horreurs sous les griffes acérées de la tchèque, des années auparavant. Il y avait fort à parier que l'effet ne serait pas le même aujourd'hui. Alors elle se pencha vers lui et lui glissa à l'oreille :

    - Que feras-tu quand je me serais rebellée, Lulu ?

    Peut-être qu'elle le défiait, peut-être qu'elle en avait juste assez d'entendre ces sarcasmes qui n'étaient pas les siens. Dans tous les cas, cette simple question sentait la menace à des kilomètres à la ronde. Helenka n'aimait pas s'avouer vaincu, aussi se chargerait-elle personnellement de bouter les compagnons de Ludwig hors de son pays. Depuis des siècles qu'ils se rendaient la pareille, chacun cherchant à recouvrir son honneur, ses terres, ou tout simplement se venger l'un de l'autre. L'allemand devait savoir qu'il aurait plus de fil à retordre avec elle qu'il n'en aurait jamais eu avec Roderich. Dans le cas contraire, Helenka comptait bien le lui faire savoir.

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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeJeu 5 Aoû - 20:26

    Belle et dangereuse la Helenka. Elle était de ces femmes forgées de fer et de sang, créées pour couper la main qui oserait se lever sur elles. Du sang slave elle en avait tiré la froideur, recouvrant son esprit d’une carapace de givre qu’aucun feu ne pourrait fragiliser. Ludwig la sentait cette aura de steppe hivernale, et il n’y avait aucun doute sur les attentions de la Tchèque. Si elle avait eu un pic de glace sous la main, nul doute qu’elle l’aurait plongé au plus profond du corps allemand. Afin de dissoudre cette chaleur moite et écoeurante qui y régnait, et offrir à ses loups le corps devenu pan de glace. Chez les slaves on aime les fins orchestrées comme une pièce tragique, et les apothéoses sur fond blanc.

    Cette menace sous-jacente n’arrivait pas à faire trembler la grande et fière (à écrire en Arial taille 30, gras, sur une banderole) Allemagne. Au contraire, une telle résistance éveillait en lui quelque chose proche de l’admiration. Oui, il admirait cette nation qui n’était pas partie se cacher en voyant l’ombre du Reich baigner ses terres, qui ne s’était pas jetée à genoux pour implorer sa clémence. La slave avait perdu d’avance, toutefois sa volonté de demeurer reine de l’échiquier encore quelques instants ne pouvait qu’être saluée.

    - Sans résistance, l’invasion n’a plus de goût. Et je n’attendais rien de moins de ta part. Si tu avais agi autrement, tu m’aurais déçu.

    Elle avait toujours été ainsi Helenka, à combattre jusqu’au dernier souffle plutôt que de se rendre. Cela avait souvent coûté des blessures et de la honte au Saint Empire. Être vaincue par une femme était une chose, être humiliée par celle-ci à chaque occasion en était une autre. La Tchèque avait tâché de faire payer à cette nation balbutiante l’affection qu’elle avait attirée sur elle depuis ce soir d’orage où la Prusse l’avait confié à un frère et ennemi. L’Allemagne avait, certes, relégué le passé dans un repli éloigné de son esprit, toutefois jamais Ludwig n’avait oublié les prunelles grises – grises comme une pluie torrentielle – qui le regardaient de haut, alors que lui était encore un bambin dans un berceau, n’ayant comme défense que de crier. Ni la main qui le giflait, lui tirait les cheveux et cette voix qui se faisait innocente quand accouraient la Hongrie et l’Autriche. Çà non, il ne l’oublierait jamais.

      Blotti dans son berceau comme une chenille dans son cocon, le Saint Empire percevait les échos d’un monde qui lui était encore extérieur, et surtout hostile. Les autres enfants étaient bien trop bruyants, et leurs cris de joie le poussaient à se blottir dans les draps. Trop de bruits, trop de vie, trop de mouvement pour un être qui venait à peine de naître. Seul le silence lui plaisait, un silence doux et réconfortant.

      Les bruits de pas lui firent ouvrir un œil immense, bien trop grand pour un visage si petit. Ludwig sortit le pouce qu’il avait dans la bouche, la peau blanche marquée de rouge là où les dents s’étaient plantées. Le Saint Empire cligna des yeux quand quelqu’un tira les rideaux, lui envoyant un rayon de soleil sur le visage. La silhouette apparaissait à contre-jour : l’enfant ne pouvait que discerner des cheveux longs ce qui supposait que cette personne était une femme. Mais cette information ne lui était d’aucune utilité. Il ne savait toujours pas associer des noms à des visages.

      Curieux, Ludwig posa ses mains sur le rebord du berceau, se hissant avec toute la force que possédaient ses bras. Une main glacée le saisit par les cheveux et le força à enfoncer son visage contre l’oreiller. La bouche ouverte, les yeux écarquillés, l’enfant sentit l’air se raréfier tandis que la main demeurait inébranlable. Seule la pression se faisait plus forte, les ongles dans son cou plus tranchants. Si l’enfant cria, ses appels furent étouffés par l’oreiller et les larmes qui obstruaient sa gorge. Larmes d’incompréhension qui se mêlaient au bourdonnement qui l’emplissait peu à peu, le privant de ses sens.

      Au loin une voix se fit entendre dont il ne saisit pas le sens. Amie, ennemie, quelle importance. Il allait mourir dans son berceau, étant dépourvue de la force qui avait permis à Héraclès de tuer les serpents qui s’étaient faufilés dans ses draps. Il ne sentit pas la main le lâcher, ni d’autres plus douces le blottir dans des bras inquiets. Il fallut toute la patience dont était capable la Hongrie pour que la petite poitrine se soulève à nouveau à un rythme normal. L’enfant, encore trop jeune pour comprendre ce qui lui était arrivé, ne put que serrer sa main autour de l’index de la Hongrie.


    Il n’y avait plus de nation plus âgée que lui pour le protéger de son ennemie. De toute façon ce qui jouait maintenant ne regardait personne d’autre que lui et la Tchèque, et les nations qui l’avaient chaperonné jusqu’à présent n’étaient plus que des pions à sa botte. Le serpent n’avait pas réussi à mordre le bambin encore sans défense : la couleuvre qui se dressait maintenant devant lui ne pouvait que finir écrasée sous la botte militaire.

    Le serpent s’était déjà glissé contre lui, son corps dégageant ce contact désagréable de froid et de mesquinerie. Ludwig avait l’impression d’être un rocher où venait se prélasser le reptile pour s’abreuver des rayons du soleil pour être fin prêt à s’attaquer à sa proie. Etant donné qu’ils n’étaient que deux dans la pièce, la proie… c’était LUI. Cela aurait été fou de s’attaquer à lui à un tel moment, alors que ses troupes emplissaient la ville mieux qu’une fourmilière dévastée. Mais cette insinuation de la Tchèque sur ses rébellions futures ne laissait planer aucun doute sur ses intentions.

    Reléguant tout frisson de peur – voire de dégoût – qui aurait pu sonner pour son ennemie le coup d’envoi, Ludwig se contenta de rester aussi impénétrable qu’une porte de prison. La moindre faille serait une ouverture aux attaques tchèques.

    - Je continuerais ce que j’ai toujours fait. Te combattre. T’empêcher de me tuer. Tu n’as jamais supporté ce premier échec : d’avoir été battu par un bébé, de ne pas avoir su l’étouffer dans son berceau et ainsi, te débarrasser de celui qui avait changé ton univers.

    Une tension se fit sentir : celle des corps et des esprits. L’approche imminente d’une explosion de violence déposait un goût agréable sur les lèvres allemandes Un goût aux relents de revanche purement égoïste. Aujourd’hui il ne se battrait pour personne autre que lui-même, un « moi » du passé dont les monstres sous le lit avaient des prunelles gris de pluie et des mains de glace.

    - Je me suis toujours demandé si ce n’était pas à partir de ce jour que tu t’es mise à haïr Elizaveta. Même si l’option du complexe d’Œdipe n’est pas à négliger.

    La moquerie avait le goût acide du fiel. L’Allemand était pleinement conscient de dégoupiller lui-même la grenade qui lui exploserait dans les mains. Il en riait, intérieurement. Que la Tchèque cherche à le détruire, il n’attendait que cela. Ils avaient entamés les premiers pas pour un tango mortel, ils ne pouvaient plus se retirer de la piste. Quand leurs corps se rapprocheraient davantage, ce ne serait que pour échanger une étreinte où l’un d’eux succomberait sous les assauts de l’autre, le sang aux lèvres.

    - Mais il est peu probable que l’Autriche s’inquiète d’une nation tel que toi. Sinon il m’aurait donné un petit mot à te confier. Ou mieux il serait venu te protéger, ou m’aurait dit quelque chose quand je lui a annoncé l’invasion. Non, il n’a rien dit. Il n’a rien fait. Cela fait quel effet d’être ignorée par celui qu’on admire ?

    Le dernier coup venait d’être donné. Les doigts de Ludwig s’étaient refermés sur la crosse du pistolet semi-automatique. Les balles allaient remplacer les mots, ricochant contre les murs, brisant les corps et les cœurs. Et comme un dément Ludwig souriait à cette vision.




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[1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Vide
MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeLun 9 Aoû - 12:05


    L'air était saturé d'animosité, et le froid sibérien qui s'infiltrait par la porte ne semblait faire frémir aucune des deux nations. Etait-ce vraiment une baisse de température, ou simplement la conséquence des regards glacés que chacun faisait glisser dans des directions opposées. Helenka n'avait pas brisé le contact, un iceberg collé à un autre iceberg. Chacun attendait de voir l'autre fondre de colère et transformer l'ambiance malsaine en véritable bain de sang. La tchèque prit une position plus droite, comme espérant écraser la montagne allemande qui ne bougeait pas d'un pouce malgré la légère grimace qu'elle lisait sur son visage.

    Helenka accentuait le contact, visiblement ravie de mettre l'Allemagne mal à l'aise. Leur proximité lui donnait envie de vomir, mais elle gardait un sourire terriblement cruel qui n'avait rien à envier à d'autres requins du pacifique. S'il y avait eu un miroir en face d'eux, elle n'aurait pas supporté de voir son reflet se comporter de manière aussi familière avec son pire ennemi. Famille, ce mot lui aurait écorché les lèvres à sang. Ils n'étaient pas frères, ni cousins, ni rien. Elle n'avait pas d'obligations, pas de remords à avoir, comme si ce mot avait jamais fait parti de son vocabulaire un jour. Ces caresses factices n'étaient que du poison, un cancer qui finira par avoir raison de lui.

    - Tu n'es pas content ? Pour une fois que je me montre gentille, tu pourrais faire semblant de sourire, non ? tout était bien trop mièvre, mièvre à vomir, mièvre à pleurer. Elle-même répugnait à autant de proximité vis-à-vis de son ennemi. Tu préfèrerais autre chose, peut-être ?

    Ses ongles semblaient transpercer la chaire de l'allemand, une main sur chacune de ses épaules, glissée derrière lui tout en laissant son corps contre le sien. Il ne pouvait pas s'échapper, il ne le souhaitait pas. Elle le sentait, elle le connaissait. Depuis toujours, c'était une vengeance inévitable qui se renouvelait encore et encore. Et il en jouait, il ne faisait rien pour arranger son cas. Le sarcasme était sa matière de prédilection, pourtant Ludwig semblait se débrouiller comme un chef pour l'irriter de plus belle. Mais il était tellement plus facile de voir les différences que les similarités. La seule chose que la jeune femme souhaitait, c'était qu'il abandonne.

    La tête posée sur la large épaule, elle sentait qu'au rythme de ses répliques acerbes contre lesquelles elle se retenait de répondre, Ludwig se montrait un brin nerveux. Dans le sens où il se tenait droit comme un i, presque trop calme étant donnée la situation. Elle voulait le voir fléchir, mais il semblait lutter pour ne rien laisser transparaître, comme elle luttait pour ne pas lui arracher la langue. Il ne ripostait pas par le geste, mais une remarque pouvait blesser plus qu'une épée plantée en plein coeur. Sa main à présent posée sur le crâne allemand, elle cessa de tirer sur quelques mèches, et saisit d'une main de fer les cheveux blonds pour l'attirer vers l'arrière.

    - Pardon ? elle avait presque hurlé de colère. Son bras se referma autour du cou de Ludwig, son coude appuyant innocemment sur la gorge de l'allemand. C'était le premier pas vers la mort par strangulation, pensa t-elle. Je ne pense pas qu'y mêler Elizaveta et Roderich soit une bonne idée. Une bonne idée pour toi, j'entends. Mais j'ai trop peur de blesser ton ego, alors je tâcherai de me taire.

    C'était du bluff, rien d'autre. Elle ne pouvait prétendre que l'affection qu'Autriche portait à Ludwig n'était qu'un mensonge. Il y avait peu de chances que ses désirs se révèlent justes. Elle n'en avait que faire d'Elizaveta et de son prétendu côté maternel, elle ne voyait que la femme dure et sauvage qui peuplait ses cauchemars d'enfants. Les deux nations s'étaient détestées du premier coup d'oeil, et ni l'une ni l'autre ne comptait faire l'effort d'une petite trêve. Quant à Roderich, les moqueries de l'allemand ne changeraient rien à son jugement. Il espérait l'irriter, profiter d'un éclat de colère, d'un faux pas pour prendre le dessus et l'emporter.

    Un éclair ricocha sur la fenêtre qui éclairait leur visage, et Helenka remarqua alors le petit pistolet qui brillait dans la main de Ludwig. Chacun respirait le calme et le contrôle de soi, pourtant elle sentait son rythme cardiaque s'accélérer. Il était trop tard pour changer la donne, et penser éviter d'en venir aux mains serait naïf. Ses mains quittèrent les mèches blondes de Ludwig, mèches alors ordonnées en un véritable champ de bataille, comme autrefois. Ses mains étaient toujours agrippées aux épaules de Ludwig, l'empêchant de poser ses yeux sur elle. Le signal était donné, et toutes les bonnes paroles de son tuteur n'aurait pu calmer un jeu qui ne faisait que commencer.

    Un coup de pied entre les cuisses de l'un, et la jeune blonde en profita pour relâcher son étreinte sur l'allemand. Dans le feu de l'action, elle ne prit pas la peine de le désarmer et recula de plusieurs mètres, ne le quittant pas des yeux. Ludwig n'était plus l'enfant d'autrefois, il ne laissera pas ce coup bas impuni, aussi Helenka l'attendait de pied ferme. Elle plongea sa main sous sa veste, en extirpant le pistolet. Au poids qu'elle estimait entre ses mains blanches, il était bel et bien chargé. La crosse pointée vers son éternel ennemi, elle n'attendait qu'un signe de sa part pour faire feu, sachant qu'il ne manquerait pas d'en faire de même.

    Helenka aimait la guerre, elle ne le cachait pas. Tenir une épée ou un pistolet entre les mains lui procurait une impression de sécurité, elle ne pouvait pas fermer l'oeil sans une arme sous la main. Les combats étaient son environnement, étaient l'environnement de toute nation qui se respecte. C'était un terrain sur lequel elle excellait. Voir Ludwig plié en quatre par un simple coup dans l'entrejambe la faisait à peine sourire. Ce n'était rien, rien d'autre qu'un petit avant-goût de ce qui l'attendait s'il ne pliait pas immédiatement bagage avec son petit bataillon d'opérette. Un léger rire secoua les épaules tchèques, tandis que son doigt était crispé sur la gâchette du pistolet.

    - Alors, qu'es-ce que tu attends Ludwig ? Tu vas appeler tes soldats peut-être ? C'est vrai, j'avais presque oublié que tu ne savais pas te défendre tout seul.

    Elle le pensait. De tout son coeur, de toute sa hargne, elle savait quel genre de chance avait baigné le berceau du Saint Empire, il y a longtemps de ça. Il avait eu l'amour parental, l'amour fraternel. Il n'avait pas le droit de se plaindre, il n'avait pas le droit de la narguer. Il était content, il était fier, il avait réussi. Elle avait perdu beaucoup en quittant Roderich, plus qu'elle ne l'avouera jamais, plus qu'elle ne l'aurait pensé autrefois. Elle tenait plus à Autriche qu'à son peuple, ses hommes, c'est pour cela qu'elle se battait toujours sans en affronter les conséquences, sans voir le mal qu'elle infligeait à sa chair et son sang, à son propre pays.

    Elle le détestait, elle les détestait tous. Elle en venait même à détester son frère, elle en était venue à détester Roderich, à lui déclarer la guerre. Helenka ne supportait personne, elle refusait l'amour des autres, elle prétendait parfois les apprécier. Et toujours de la même manière, elle appelait à l'aide quand tous étaient partis. Alors elle ne pleurait pas, non. Elle frappait, elle criait, elle insultait. Comme elle regardait Ludwig, les yeux aveuglés de colère, comme elle l'avait regardé la première fois, quand la Hongrie s'était dressée entre elle et le berceau. Elle aurait pu se débarrasser de lui, le noyer dans une rivière, et il n'aurait pas été là, devant elle, à l'affronter.

    - De quoi tu as peur, que je te règle ton compte une bonne fois pour toute ? Après ça, tu pourras pleurer dans la jupe d'Elizaveta autant que tu voudras.

    Elle ne changera jamais, Helenka. Toujours à se croire la plus puissante, toujours à envenimer les choses au lieu de se créer des alliés. La simple idée de perdre contre Ludwig lui semblait presque absurde, la douleur future ne l'inquiétait pas davantage que d'ordinaire. Elle le provoquerait, encore et encore, comme elle l'aura toujours fait. Et si il était impossible pour elle de gagner, si tous se levaient pour condamner ses efforts, ses combats comme vains, elle se lèvera toujours, frappant jusqu'à succomber à sa propre douleur. Pluie de balles ou pluie de coups, elle fera toujours en sorte que la douleur de Ludwig soit plus forte que la sienne.

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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeLun 16 Aoû - 21:13

    La douleur qui traversa son corps sonna le début du duel tant attendu, une douleur qui le faisait grimacer alors que son esprit riait de la tournure des évènements. Il n’en avait pas espéré moins de la Tchèque : cette femme était un esprit sauvage qui refusait tout asservissement. Un adversaire à la hauteur de ses attentes. Toutefois ses coups étaient primitifs, classiques même. Elle n’était pas la première femme à viser le point vital masculin pour tirer son épingle du jeu. C’était ce qu’on appelait un coup bas – sans mauvais jeu de mot.

    Devant un tel déchaînement de violence, un psychologue y aurait vu l’expression d’un manque dans le couple et aurait poussé les deux protagonistes à le combler par une fusion physique (ou plus vulgairement, leur aurait proposé de « coucher sur la table, qu’on en finisse ! »). Sauf que définir la Tchèque et l’Allemagne en tant que couple était un acte suicidaire car ni l’un, ni l’autre ne se voyait ainsi. Et tant mieux pour nous, sinon la fin du monde aurait déjà eu lieu.

    La confrontation actuelle en avait déjà les relents. La supposée victime du conflit avait repris les rênes, riant d’avoir su déjouer aussi facilement le sac de nœuds dans lequel on l’avait emprisonné. Rien n’empêcherait la Tchèque d’aller jusqu’au bout de son projet, n’importe qui l’aurait senti en entrant dans la pièce. Il n’y aurait aucun regret, juste de la satisfaction. Celle du devoir enfin accompli.

    Le pistolet reposait dans la main allemande, objet sans vie qui n’attendait que son réveil pour faire éclater sa fureur. Le pointer maintenant sur son ennemie serait mal avisé, d’autant plus que la douleur était encore trop importante là où elle l’avait frappé. Pourquoi les femmes aimaient-elles tant porter des chaussures à talon ?

    - Si j’avais jugé que te faire face nécessitait une aide, j’aurais laissé le régiment dans le couloir. Or c’est ce que je n’ai pas fait. Ne parle donc pas pour rien dire. Je t’ai connu moins loquace.

    A chaque point, Ludwig amorçait un pas vers la blonde. Cette démarche à rebours avait des allures de danse menée par un alcoolique prêt à trébucher à chaque instant. Peur de mourir ? Mais qui n’avait jamais connu cette crainte de disparaître corps et âme, tel un bateau prestigieux sur lequel se refermait l’océan : humain comme nation, tous tremblaient à l’idée que la Mort vienne les prendre dans ses bras. Aucun n’était prêt à porter le linceul. Et surtout pas l’Allemagne qui préférait de loin les palmes de la gloire à une épitaphe.

    La gueule du pistolet le narguait toujours, à l’instar de sa propriétaire. Ludwig effectua alors un geste qui tenait plus du jeune fanfaron que du soldat rompu par l’expérience : il lança son arme en direction d’Helenka, comme pour lui offrir. L’instant d’après son corps se détendit, sa main se refermant sur la gueule du pistolet tchèque. L’arme allemande finit sa course à quelques mètres derrière eux, brillant quand un rai de soleil se posa sur lui.

    Désarmé, sa main menacée de finir en charpie, Ludwig continuait à être certain de sa victoire. Enorgueilli par les batailles antérieures, l’Allemagne se croyait immortelle. Une machine qui ne pouvait aller que de l’avant et que rien ne pouvait stopper ; tout au plus on pouvait la ralentir.

    - La seule personne qui geindra ici ce sera toi. Je n’ai nullement besoin d’un quelconque artifice pour te briser, comme j’ai brisé les autres. Tire donc puisque tu aimes faire parler la poudre, et nous verrons… si je tiens toujours debout.

    Ludwig recula de deux pas, bras le long du corps – attendre bras écartés le coup « fatal » aurait été trop facile. Après tout ceci n’était qu’un jeu, un de ces jeux cruels que les nations adoraient sans se l’avouer. Personne ne mourrait ce soir, il en avait la certitude. Du moins pas des nations. Ceux qui allaient payer le prix de ce jeu étaient des humains, et cela faisait longtemps que l’Allemagne n’entendait plus leurs voix.

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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeLun 23 Aoû - 7:53


    La réputation d'antisociale d'Helenka n'était plus à faire auprès des autres nations, qui se créaient déjà des images de femme peu fréquentable sans même l'avoir fréquenté au préalable. Tout ce qu'elle pourra dire pour sa défense n'aura jamais lieu de contredire ses camarades, car il fallait avouer que la jeune femme se montrait rarement sympathique. Et pourtant, il en fallait peu pour satisfaire la tchèque et faire naître un sourire sur son visage. Si la simple présence de Ludwig suffisait à la répugner, la vision d'une Allemagne dominée par la douleur était une tout autre chose. Comme aujourd'hui, où elle semblait briller, où elle semblait dominer, où elle pouvait rire sans peur au nez de son supposé 'bourreau' attitré.

    Mais Helenka, c'est encore et toujours une nation très irritable, qui réagit toujours au quart de tours. Ludwig n'avait probablement pas apprécié le coup de pied cadeau, et espérait peut-être se venger par des remarques tranchantes, comme il avait l'habitude d'utiliser en sa présence. Par chance, la tchèque n'était pas contre le service après-vente, et ne voyait aucun problème à frapper de nouveau son éternel adversaire. Des mots, seulement des mots, et pourtant cela suffisait à raviver la colère de la nation. Helenka agitait son pistolet avec dédain devant l'Allemagne, se massant le crâne. Elle semblait chercher ses mots, avant de renoncer à employer un langage qui n'aurait pas convenu au message qu'elle souhaitait faire passer.

    - Ludwig ? elle tourna son visage vers l'interpellé, les sourcils froncés, adoptant une voix basse digne d'un murmure. Tu m'emmerdes, alors ferme ta grande gueule.

    Ludwig disposait d'un don extraordinaire, une faculté qu'il semblait ignorer et qui pourtant, se révélait être une arme redoutable. Il était le seul, par ses sarcasmes, à pouvoir donner un épouvantable mal de crâne à la république tchèque, pourtant connue comme aisément irritable. Non, ce n'était pas les sautes d'humeur de la Hongrie ou de l'Angleterre, les leçons prodigués par l'Autriche ou même la présence de l'Italie et de la France réunis qui pouvaient ainsi la troubler, mais bien l'Allemagne. Mais cela, elle ne comptait l'avouer pour rien au monde. Sa voix, son visage, sa manière de se croire supérieur à elle, tout cela la rendait malade, au sens propre du terme comme au figuré. Oui, elle haïssait vraiment Ludwig.

    Toute notion de calme avait été bannie, la politesse d'usage remplacée par des mots crus et un langage de plus en plus virulent au fil des secondes. Ce n'était pas une réunion mondiale, il n'y avait personne pour calmer le jeu. Et Roderich n'était pas là pour la reprendre sur ses manières indignes d'une nation. Elle s'en moquait. Elle se sentait exploser, les mots traversaient sa bouche sans qu'elle n'ait le moindre besoin d'y réfléchir. Et puis, elle n'avait pas à craindre de blesser les chastes oreilles d'un Ludwig à présent adulte, une Allemagne à présent accoutumée à ce langage cru. Mais il était bien trop poli, bien trop sévère envers lui-même pour s'autoriser ce genre d'écart. Helenka, elle, le pouvait et le ferait.

    - Ca t'arrange, hein, d'être une nation ? sa voix était empreinte d'amertume. Nous, on ne meurt pas. Mais les humains, on peut en faire n'importe quoi.

    La triste vérité surgissait toujours de son esprit, vérité impossible à réfuter. Quand bien même son corps serait criblé de balles, Ludwig ne cessera de respirer et de jouer les serpents par son impertinence et ces sarcasmes qui lui collaient à la peau. Les humains, peut-être sont-ils plus chanceux ? Si fragiles, qu'un simple bout de métal planté en plein coeur pouvait envoyer dans l'autre monde. Et eux, qu'avaient-ils ? Juste une immense douleur, une douleur lancinante qui ne les quitte jamais. Comme ces guerres, qui semblent ne jamais cesser. C'est si facile de trouver une excuse pour monter des nations contre d'autres. Et pourtant, les nations demeuraient subordonnées à leur peuple. Toujours à souffrir pour les mortels.

    - Alors combien d'allemands devront mourir pour que tu ouvres les yeux ?

    Ludwig pouvait mentir, Ludwig pouvait jouer à être le pire des salauds. Mais Helenka, immortelle ou pas, ne se battait pas pour faire couler le sang inutilement. Le Reich menaçait, menaçait son pays et tant d'autres. Elle tuera autant qu'il le faudra, qu'elle le pourra. Et pourtant, elle était troublée par le calme qu'affichait l'Allemagne. Elle détourna les yeux, frustrée, pour fixer le sol. Comme si un éclair foudroyant irait ricochait sur la pierre pour frapper l'allemand de plein fouet. Au lieu de ça, il l'a narguait. Un geste, incompréhensible à ses yeux. Et la vision, de son ennemi désarmé. C'était trop facile, un jeu d'enfant. Ce n'était pas son pistolet qui l'a narguait, mais ce petit air victorieux et ces doigts enroulés autours de l'arme tchèque.

    Son regard, froid et cruel comme les neiges éternelles, quitta le marbre qui recouvrait le sol pour se concentrer sur l'énergumène qui lui faisait toujours face. Elle ouvrit la bouche pour protester, et écarta la main de Ludwig en pressa ses ongles acérés contre la chaire. Il se croyait intouchable. Il n'attendait que ça, que ses nerfs soient à sang plus qu'à vif, qu'elle franchisse la dernière ligne avant de perdre l'esprit et de succomber à une colère insurmontable. La main d'Helenka restait crispée sur son petit pistolet, l'index courant le long de la détente sans jamais agir. Que faire ? Donner à Ludwig ce qu'il souhaitait avec la certitude de le regretter toute sa vie ou bien refouler l'élan de violence qui la submergeait pour parlementer ?

    Soudain, elle écarquilla les yeux, constatant qu'elle s'égarait au sentiment qui la terrifiait le plus : le doute. Ce doute qui conduit aux remords, qui favorise les erreurs. Un doute qu'il était rare pour elle d'éprouver. La tchèque s'osa un petit coup d'oeil derrière l'épaule, fixant le pistolet allemand qui se trouvait à l'autre bout de la salle. Que devait-elle comprendre de ce geste ? Que la seule issue était de se rendre, de finir perdante ? Non. Elle allongea un peu plus le bras, les doigts soigneusement refermés sur son arme, prête à faire feu. Elle pressa une main sur le bras qui tenait le pistolet, luttant pour ne pas trembler de colère et de frustration. Il ne fallait pas perdre. Elle ouvrit une nouvelle fois la bouche, sans montrer son trouble.

    - Dis-moi si ça fait mal.

    Et elle pressa la détente. Ce fut un bruit énorme, ce fut la poudre, ce fut le sang. Mais quoi que ce fût, ce n'était pas la fin. Pas encore, pas maintenant. Ce n'était jamais la fin.

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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeMer 25 Aoû - 22:02

    Le ciel était si dégagé hors du tombeau qu’était ce château qu’il donnait envie de danser et de chanter. La femme au foulard, dont les pieds nus avaient disparus sous la poussière des chemins, n’en avait plus le goût, ni l’espoir. Les soldats aux yeux de glace la firent tressaillir. Les croix sur leurs bras étaient autant de signes funestes. Elle rabaissa son foulard sur ses yeux, croyant qu’elle deviendrait invisible si elle ne les voyait plus – comme les enfants jouant à cache-cache. Les mains froides tombèrent sur elle, battant comme les ailes des corbeaux. Lui arrachant son âme, son nom.

    Elle n’était plus qu’une anonyme, une victime de la guerre. On ne la désignerait plus que sous le nom de tzigane, bohémienne, et ces titres avaient le goût de l’insulte. Victime de la guerre, victime de la peur de l’autre.

    Ses pleurs – s’il y en eu – n’atteignirent ni l’armée, ni l’Allemagne. Âme sans importance, comme celles que Ludwig avait emprisonné dans ses mains en Pologne, les tirant des débris fumants en emportant Feliks derrière lui. Le début de la faim. Le début de l’envie d’avoir plus d’âmes à son service. Les victimes d’hier devenaient les aides de demain, prêtant leurs mains à Ludwig pour qu’il puisse attraper d’autres âmes. Helenka croyait-elle donc que seuls des enfants de l’Allemagne composaient les troupes ? Non, oh non. L’Autriche avait du sacrifier les siens – après tout le pays avait rejoint le Reich de son propre chef. Et ces enfants-là, Ludwig n’avait aucun scrupule à les envoyer au charnier s’il pouvait gagner une terre et des âmes en compensation.

    Aucun scrupule. Aucune pitié. Aucune humanité. Pas même un regard pour un « père ». Pas un sourire pour une « mère ». Que du silence et des faux-semblants pour celui qui avait été un frère et modèle.

    La pression du canon contre sa poitrine éveilla un sourire éteint sur ses lèvres. Le Ludwig d’avant, le Ludwig qui n’était pas encore Reich, espérait presque que le coup l’abatte en plein cœur, le vidant de toute vie. Après tout il aurait déjà du disparaitre, le cœur cueilli par le fleuret français. Être libéré par la femme qui avait toujours souhaité sa mort en était ironique.

    Sauf qu’il était une nation et pas un humain.

    Elle le savait et pourtant elle répondait à sa prière, ou plutôt à sa résolution de fou. Lui laissant la possibilité de prouver qu’elle ne pourrait pas le détruire, non pas cette fois, pas cette fois encore.

    - Dis-moi si ça fait mal.

    La détonation le cueillit en plein cœur, de main de maître. Ludwig chancela, regardant le sang qui tâchait le sol comme s’il appartenait à un autre corps que le sien. Epais, d’un rouge presque noir, le sang coulait sur son uniforme en un filet paresseux, tandis qu’il remontait dans sa gorge pour l’étouffer. Nation à corps humain avec ses avantages, et surtout ses multiples inconvénients.

    Les gouttes tâchaient ses lèvres tant il se retenait de cracher le sang acre qui emplissait sa gorge. Plutôt s’empoisonner avec son propre fiel que de montrer une faiblesse. Point de mouchoir derrière lequel cacher la gerbe de sang qui veut éclore au grand jour. Le gant noir arracha le pistolet de la main blanche, taillée pour tenir les armes et arracher les gorges. La main fut tournée, paume vers le haut, en un retournement du baisemain. Les ongles arrachèrent les joues quand Ludwig posa ses lèvres sur la paume, y laissant une tache de sang, fraiche et repoussante.

    - Marquée. Comme un bétail. Comme un bien. Et encore, je suis là magnanime. Le sang s’essuie, se lave. Mais pas le souvenir du contact.

    La sensation de la peau de la tchèque lui refilait encore la nausée. Toucher rien que sa main lui avait arraché des frissons de dégoûts – mêlés à ceux d’extase en voyant combien le geste avait ébranlé son ennemie.

    L’Allemand ouvrit la fenêtre de la pièce, laissant entrer l’odeur de la peur et de la victoire, laissant entrer les voix de deux peuples. Cris du peuple qui se voit abandonné par son pays, de celui qui se venge des affronts du passé par les armes. Les deux voix se répondaient dans une langue différente, et pourtant chacun comprenait l’autre.

    - Tu peux descendre pour tuer mes troupes. Mais d’autres les remplaceront, et d’autres encore. Tandis que de ton côté pour un tchèque tombé, aucun ne viendra le remplacer.

    Le sang coulait sur le rebord de la fenêtre et il ne faisait rien pour en stopper le flux. Souffre donc corps humain, que m’importe. Ce sang qui émaille le sol c’est la marque de l’Allemagne, les traces de son passage. Si du regard Ludwig pouvait ancrer chaque parcelle de sang dans les pierres du château, ce serait déjà chose faite.

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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeLun 30 Aoû - 21:45


    La seule chose qui semblait inquiéter Helenka à ce jour était la propreté de son salon. Arrêtant quelques minutes de darder Ludwig de son regard noir, elle fixait la tâche écarlate qui recouvrait peu à peu la pierre encore immaculée quelques minutes plus tôt. Peut-être qu'il souffrait, l'abruti, elle ne le saura jamais. Tout ce qu'elle voyait, c'était son uniforme et ses lèvres se colorer de pourpre, et l'odeur du sang emplir ses narines. Elle avait attendu, de voir son visage de tordre de douleur, qu'il crie, ou même une simple exclamation. En vain.

    Une seconde plus tard, le pistolet n'était plus dans ses mains. Elle entrouvra les lèvres pour protester, mais fut coupée dans son élan. Un gant noir lui saisit la main, et une marque écarlate y fut laissée. Les lèvres ensanglantées de Ludwig sur sa peau eurent le même effet qu'une brûlure. Le contact la fit tressaillir, peigna une nouvelle grimace sur son visage. Le contact se brisa, heureusement pour chacun d'eux. Helenka improvisa une gifle bien sentie alors qu'il s'éloigna précipitamment. Elle recula de trois pas, furieuse, crachant d'affreux jurons.

    - Ne. Me. Touche. Pas. En-foi-ré. Et je ne suis pas un objet.

    Le ton était froid, maîtrisé, calculé, mais la colère était toujours là, couvée par un calme de rigueur. Chaque mot avait été soigneusement détaché. Le mot 'bétail' avait été lâché, blessant. Se voir comparé à une pièce de viande ou à un simple meuble, voilà qui fait rarement sourire. Touchée. La tâche de sang était bien là. Elle poussa un grognement avant de frotter sa main contre le tissu de sa veste, plus intéressée de la faire disparaître que de souiller son vêtement. Au final, elle se retrouva avec une veste marquée de rouge, ainsi qu'une irrésistible envie de tuer Ludwig.

    Dehors, des soldats, la croix gammée brillant sous les réverbères, encadrant une foule de citoyens effrayés. Pas de vague, juste des insultes glissées ça et là. Le visage de la défaite. Un courant d'air glacial lécha l'air, la faisant frissonner. Les gouttes de sang traçaient la route de Ludwig, avant de s'écraser contre la rambarde. Assez. Helenka, après un interminable soupir, joignit ses mains avec des airs de religieuse, plus agacée qu'autre chose. Les yeux presque clos, elle approcha ses mains de ses lèvres, avant d'offrir un sourire étincelant à l'allemand.

    - Très bien. Ca y est, t'es content, la vie est belle, hein Ludwig ? Dis-moi, ton Reich de mille ans, j'espère que tu ne pense pas réellement que ça va durer aussi longtemps ?

    Un coup de coude dans les côtes pour débarrasser le passage (« Tu gènes ! »), et les yeux d'Helenka quittèrent la fenêtre pour se poser sur le fauteuil pourpre et clinquant accolé au mur. Sur une table, des verres avec parfois un fond d'alcool, des bouteilles de bières vides et quelques Pilsner encore pleines. Le tableau d'une réunion interrompue, ses invités avaient été congédiés comme des malpropres. A quoi auraient-ils servi ? Certains avaient déjà pliés bagages pour rejoindre l'Amérique ou l'Angleterre. Pas d'armée, rien. S'en sortir, c'était tout.

    La tchèque se saisit d'une bouteille, avant de laisser son corps tomber comme une pierre sur le fauteuil. Ludwig pouvait rester debout, se noyer dans l'hémoglobine, se jeter par la fenêtre, il n'était pas question de lui offrir un siège. Allongeant le bras vers la table pour se saisir d'un décapsuleur, elle fit sauter le bouchon et se servit un verre. Elle observa un moment le liquide ambré, avant de boire à la bouteille. Helenka était frustrée, sur les nerfs. Et dans cet état, une fois les mots et la violence épuisés, elle se vengeait sur la boisson.

    - Tu as raison, là, maintenant, j'ai sans doute plus à perdre que toi. Mon patron est une vraie tapette, le tien un psychopathe. Je me demande qui a le plus de chance entre nous deux. Enfin, après, c'est à celui qui décide de suivre les ordres comme un brave toutou, tu piges ?

    La quantité de bière que contenait la bouteille disparaissant à une vitesse hallucinante entre les mains d'Helenka. Un coup de décapsuleur, et une deuxième bière fut ouverte. Affalée sur son fauteuil, elle n'accordait qu'un intérêt limité à son voisin. Peut-être qu'elle pouvait lui proposer de nettoyer le sang répandu sur le sol ? Inutile. Il ne s'en irait pas, elle non plus, que le meilleur gagne. Une nation pouvait-elle succomber d'un coma éthylique ? Si ça lui permettait de ne plus croiser Ludwig dans un couloir, elle était prête à courir le risque.

    - Alors quoi, t'as des problèmes de coeur, mon petit Ludwig ? On ne fait plus attention à toi, on t'ignore, et tu prends ta revanche ? Ton idiot de frangin là, Gilbert, il ne t'aime plus, c'est ça ? C'est ça, l'annexion des peuples germaniques, un prétexte pour ne pas perdre ta famille ? J'avoue que tu me déçois. Tu as besoin de conquérir le monde pour prouver que tu existes ?

    Elle espérait ces piques chargées de venin, que les mots blessent autant que des coups de poignard. Il avait bien joué, il en avait craché des moqueries, moqueries qui sonnaient comme d'effroyables insultes à ses oreilles. Helenka n'avait pas l'âme d'un psychologue. Comprendre les autres n'avait jamais fait parti de ses priorités, et la vie sentimentale de Ludwig l'importait autant que celle des Comores (vous avez dit Comores ?). Si elle touchait juste, tant mieux. Le contraire lui importait peu, tant qu'on lui laissa sa bière et son fauteuil. Et ça continue.

    - Pitié... Ah, au fait, tu as soif peut-être ?

    Le regard embrumé par les volutes de l'alcool, Helenka n'en restait pas moins lucide. Ce n'était pas un élan de sympathie provoqué par la boisson, juste une nouvelle démonstration d'ironie. Titubant, elle prit appui sur le bras du fauteuil pour se maintenir debout. Allongeant le bras, et poussa la bouteille vers l'allemand, sachant qu'il y aurait peu de chance pour qu'il consente à boire une bière de fabrication tchèque. La bouteille était là, dans sa main, et la seconde d'après, elle décorait le sol du salon. Un rire, puis la femme retourne à son siège.
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MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeDim 19 Sep - 16:13

    Le dégoût d’Helenka lui arracha un sourire, à défaut d’un rire macabre. Le fil de la haine les reliait toujours, et il aurait été malvenu que quelqu’un d’autre s’immisce dans leur jeu. Cela aurait été aussi discourtois que de venir s’immiscer dans un couple pour jouer le rôle d’amant. L’amour. La haine. Après tout, quelle différence entre les deux ? Jamais on ne laisserait l’aimé, le haï aux mains d’un autre que soi-même. Car on le considérait comme son bien, à jamais attaché à soi.

    Seule l’Allemagne pouvait outragé la République tchèque, et inversement. C’était un jeu de longue date entre eux, depuis l’enfance même. Tout avait commencé à coups d’ongles et de crachats, et maintenant ils en étaient venus aux armes à feu et aux taches de sang.

    Ludwig regarda justement celles qu’il avait laissé dans son sillage, sans même songer que la blessure n’était toujours pas cicatrisée. Comme si la douleur pouvait l’atteindre. La sienne n’était rien, et celle des autres ne lui tirait qu’un peu de satisfaction quand elle concernait des personnes bien particulières. Comme Helenka, bien entendu, qui en ce moment prenait ses aises ne voulant toujours pas admettre qu’elle avait perdu, que son roi avait été envoyé hors de l’échiquier par celui de l’Allemagne. Têtue... comme une femme.

    Prenant place sur un des sièges - chaises mal réparées - qui entouraient la table basse, écoutant Helenka cracher ses mots comme une mitraillette crache ses balles. Avec l’envie de blesser, de pousser l’ennemi à ses derniers retranchements, de relancer la machine de la violence. Car seuls les coups existaient entre eux, l’envie de tuer l’autre, de le rayer de son existence.

    Le sang appelle le sang.

    - J’ai juste bien compris qu’on ne peut rien tirer d’un sang qui n’est pas le sien, ou rendu bâtard par de mauvaises influences.

    Et il y avait là, peut-être, une attaque bien dirigée contre Helenka, la slave qui avait vécu dans le foyer germanique, telle une vipère dans une couvée de moineaux. Un oeuf lâché par un coucou qui, pour avoir sa place, dès sa naissance, avait tâché de faire tomber les autres oeufs du nid. Dont lui.

    - La famille, c’est juste un mot bien joli pour faire rêver les enfants mais çà existe pas chez les nations. Tu as bien un «frère», et vois-tu, je ne le vois pas accourir pour venir t’aider ou prendre de tes nouvelles. Il y a pas de famille chez les nations, juste des individus qui cohabitent.

    Ludwig l’avait constaté lui-même dans son propre foyer. Germania n’avait jamais reçu le moindre mot de remerciement de la part de ses multiples enfants. Juste de l’indifférence, le silence sur leur paternel en commun, et l’envie de mener une autre vie que celle qu’on leur avait offerte. L’Autriche et la Prusse pourtant frères n’avaient jamais manifester la moindre affection filiale entre eux : rien d’autre que l’envie de détruire l’autre, de le voir ensanglanté sous sa botte, rien que la haine et la violence. Et l’Allemand ne savait pas, ne saurait jamais que les deux frères avaient un jour pleuré l’un contre l’autre, avaient été des frères pendant un court instant en berçant chacun leur tour un enfant aux cheveux blonds.

    Du bout de sa botte, l’Allemand remua les débris de verre, reniflant imperceptiblement les fragrances de la boisson. Et le goût du sang se mêlait à l’odeur d’alcool, mélange détonant qui le captivait davantage que les propos abracadabrants de la Tchèque. Des propos de folle qui se sait condamnée mais refuse de se laisser marcher sur les pieds.

    Conquérir le monde pour prouver son existence ? Ils étaient des nations, l’envie de conquêtes faisait partie intégrante d’eux. Tous ils avaient pris les armes pour fonder des empires, des royaumes, des colonies, faire entendre leurs noms hors de leurs frontières. Pourquoi ne serait-ce pas son tour, après tout ? Que les anciens retournent à leurs fauteuils et leurs coutures et laisse la place aux jeunes, à ceux qui avaient des idées et des envies.

    - Et c’est quoi le mieux d’après toi, entre demeurer tapis dans un château qui s’écroule, à respirer les odeurs du passé et à danser avec les fantômes, et tâcher de voir plus loin, prendre les armes et se faire une place, montrer ses capacités ? Moi, je préfère la seconde option.

    Le gant allemand se posa sur une bouteille encore intacte - non touchée par la Tchèque - et se servit un verre. Inutile de se conduire comme un rustre devant cette Tchèque aussi vulgaire qu’un valet de ferme. La boisson ne valait pas celle du pays, mais c’était un maigre réconfort au vu de sa journée. Il s’amusait, jouait, sûr de lui. Comme un chat qui vient de trouver un oiseau et en arrache les plumes avant de croquer dedans.

    Le verre au bord des lèvres, Ludwig reposa la bouteille à l’attention de la Tchèque comme s’il lui offrait un verre de poison. Souriant, aussi accueillant qu’un chien enragé au pas de la porte. Et la main se posa sur le genou tchèque, donnant à Ludwig des airs de propriétaire qui vérifie la bonne tenue d’un bien qu’il vient juste d’acquérir. Ressemblant à un riche romain venant constater si l’esclave qu’il venait d’acheter respectait les promesses du vendeur.

    - Crois-moi. La seule soif que je connaisse en ce moment a pour mère vengeance, et pour soeur pouvoir.

    Il l’attendait, avec presque un frémissement de désir, la morsure qu’elle allait lui infliger, le coup de griffe qui allait le saigner. L’amour. La haine. Aucune différence.


Spoiler:
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[1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Vide
MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeDim 5 Déc - 0:18

Bonjour, moi c'est Pudding et j'adore poster des pavés en retard. ♥

[1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Av8
Ce fut un bain de sang, les témoins le diront
C‘est écrit noir sur blanc dans leur déposition


    Je vais t'arracher les yeux et te les faire manger, petit salopard. Je vais t'étrangler, brûler chaque parcelle de ton corps au quatrième degré, te donner en pâture à des chiens errants. Je vais te vider de ton sang, trouer ta peau de mille coups de couteau, te cribler de plomb. Je vais faire en sorte que plus jamais tu ne marche sur les autres, que plus jamais ce sourire satisfait ne traverse tes lèvres. Je vais te faire mal, tellement mal, je vais te briser de telle sorte que tu ne seras plus capable de crier ou de pleurer. Je te hais Ludwig, si seulement tu savais.

    Toujours la même rengaine, toujours les mêmes mots qui menaçaient de franchir la barrière des lèvres. La haine suinte de tous les pores de ta peau d'ivoire, tes yeux gris se voilent d'un regard meurtrier, un frisson de colère secoue tes membres, fait trembler ta bouche. Tu serres les dents jusqu'à ce que le goût du sang se propage, ta respiration se fait bruyante et menaçante, tu voudrais crier au monde entier ton aversion envers l'être hideux qui te nargues. Mais tu es bercée par la folie, tu coules en voulant jouer les maîtres du monde. Tu as perdu, et tu le sais.

    Tu es pathétique, Helenka, tout autant que lui, ton pire ennemi. Tu ne cherches même plus à te battre, tu te sais déjà perdante. Tu veux juste rester fière et droite, tu veux que les apparences gagnent sur le réel. Tu es pâle, beaucoup plus qu'avant. Tes yeux sont rouges; tu blâmes l'alcool, mais tu es aveuglée par la colère et la honte, tu sens des larmes te piquer les yeux. Et il se moque de toi, il prend ses aises, il te nargue. Il te noie dans la honte. Espères-tu encore l'immoler de tes mots glacés ? Tu t'enfonces dans l'ignorance. Tu sors un briquet et allumes une cigarette.

    ▬ Alors quoi ? Je ne suis pas assez germanique pour toi peut-être ? C'est ça ton problème. Tu sais, c'est pas très joli le racisme, mon petit Ludwig. Je ne suis pas assez blonde pour toi ? Mes yeux ne sont pas assez bleus ? Ah, mais suis-je bête ! J'avais oublié que tu préférais les italiens pleurnichards. Autant pour moi. Et en parlant d'italien, ça va la vie de couple avec l'autre abruti congénital de Feliciano ?

    La plaisanterie, le cynisme pour échapper à la colère qui bouillait entre ses veines. Un rire nerveux mourut dans sa gorge alors qu'il s'aventurait sur le thème familial. Le sujet qu'il ne fallait pas évoquer, pas devant elle, sauf si on aime les éclats de voix, les insultes obscènes et les jets d'objets. Avec un cousin psychopathe (j'ai nommé Ivan), un frère qui fait mine ne pas vous connaître (Lukas), un autre cousin amateur de poney qui vous trouve trop germanique à son goût (un certain Feliks), un père de substitution invivable (Roderich). On trouve tout de suite le concept de famille très lointain.

    ▬ Ah, Lukas ? Il choisit la position la plus confortable, comme d'habitude. Enfin, je ne vois pas quoi lui reprocher. Jouer les alliés en attendant ta chute, ce n'est pas une mauvaise idée, je ne vois pas de quoi l'accuser.

    Elle haussa les sourcils, coulant un regard dédaigneux vers Ludwig, comme si cela n'avait aucune importance. Elle porta de nouveau la cigarette à ses lèvres, s'imprégnant du parfum du tabac, laissant s'échapper quelques volutes bleutés. Helenka n'avait vraisemblablement pas la moindre idée des plans de son frère. Elle ne voulait pas savoir, rien savoir de lui, rien savoir des autres. Francis et Arthur étaient déjà de beaux idiots. Ils ne valaient pas mieux que l'allemand. Non, ils n'étaient plus que des traîtres à ses yeux. La tchèque n'en voulait plus de ces Alliés qui promettent sans donner.

    Elle sursauta quand une main se posa sur son genou. Par réflexe, d'un geste vif et nerveux, elle allait frapper Ludwig au visage, lui renvoyant la pareille. Sa main resta suspendue dans les airs, alors qu'elle dardait l'allemand d'un regard furieux. Elle ne le frapperait pas, c'était inutile. Elle grogna seulement, montrant les dents, comme un chien face à un voleur qui tente de pénétrer sa demeure. Elle regarda au loin, son pistolet sur le sol. Elle regarda le gant posé sur son genou, sur elle. Helenka + colère + pistolet = bain de sang. La tchèque posa une main gelée contre le front de l'allemand.

    ▬ Tu t'entends parler Ludwig ? C'est ça l'Allemagne ? Regarde toi, tu es tellement frustré d'avoir perdu la dernière guerre que tu es prêt à suivre les ordres de ce psychopathe. Elle appuya un peu plus la paume de sa main contre son crâne, comme si elle voulait y encrer ses paroles. Sa voix s'élevait un peu plus, sèche et cassée. Elle tremblait. Réveille-toi si tu ne veux pas faire la plus grosse connerie de ta vie. Tu dis peut-être amen à Hitler, mais ne crois pas que les Alliés feront de même. Ils t'écraseront Ludwig. Et ils écraseront aussi Japon, et ton cher petit Feliciano. Je l'entends déjà pleurer, pas toi ? Vas-tu pleurer sur son cadavre à lui, quand toute cette mascarade sera finie ?

    Ton rire est cruel, tes mots le sont bien plus encore. Tu veux juste blesser, tu veux juste frapper le plus fort possible. Mais c'est macabre, malsain, bien trop macabre. Tu craches des mots acides sur les absents. Le petit Feliciano, c'est si facile de lui cracher des horreurs, de lui faire mal à en pleurer. Son sourire revient, mais que se passera t-il s'il fane à jamais. Helenka, tu sais que toutes les insultes du monde, toutes les morsures et les brûlures glisseront sur lui. Alors tu attaque par derrière, à revers, tu fait la fourbe, tu t'en prends aux autres. Ce ne sont que des mots après tout.

    ▬ Aujourd'hui tu es peut-être un conquérant, demain un perdant. Un empire, ça ne dure jamais éternellement. Et quand on tombe, la chute est terrible. Les amis trahissent, les assiégés se rebellent. On ne gagne jamais contre le monde entier. La seule chose qui compte, c'est de survivre. Je n'en ai strictement rien à à foutre des autres pays, moi, tant qu'ils n'empiètent pas sur ma liberté. Je n'attaque pas, je n'ai jamais rêvé d'écraser les autres sous ma botte. Je me suffis à moi-même. La gloire et la renommée, c'est pour les faibles.

    Voilà de vilains mensonges que tu craches avec facilité. Pourtant, toi aussi, tu en as rêvé de conquêtes et d'empires. Tu en as rêvé, plongée dans les aventures des seigneurs d'autrefois. Tu en as rêvé, tes grands yeux pétillants, alors que tu préférais les livres d'histoire aux leçons d'allemand. Tu en as rêvé, et puis ils sont tombés. Tous, aussi grands soient-ils, les empires tombent. Non, ils s'échouent, s'écrasent, chutent d'aussi haut qu'ils sont montés. Dans ton orgueil, tu as trouvé ça pitoyable. Byzance, Rome, Mongolie, Russie impériale. Oui, tu as trouvé ça pitoyable.

    Tu veux être là, quand son empire à lui s'écrasera. Un Reich éclaté en morceaux, ce sera ton plus beau cadeau. Depuis ce canapé, tu jubileras devant ce spectacle, comme une bonne série télévisée, comme un roman à suspense. Mais pourras-tu vivre sans la haire, sans la colère que tu lui portes depuis la naissance, quand tout sera terminé - si cela se termine. Quand l'odeur de nazi aurait quitté ton château, de quoi vivras-tu. Des souvenirs, comme avant qu'il ne refasse surface. Oui, tu vivras des souvenirs où tu déversais déjà toute ta hargne d'enfant sauvage, contre ce garçon blond encore innocent.

    ▬ Je crois que tu n'as pas bien compris, alors je vais te la refaire. Quoiqu'il arrive, que tu ais gagné ou pas, il n'y aura jamais aucune collaboration entre mon pays et le tien. Si je peux profiter de l'annexion pour descendre quelques boches, je ne vais pas me priver.

    Elle agita sa cigarette sous le nez de l'allemand, les pupilles claires écarquillés, guettant un mouvement, peu importe. Elle saturait, la triste sensation de parler à un mur l'affligeait. L'écoutait-il seulement, ou pensait-il constamment Panzer et Blitzkrieg ? S'il pouvait juste esquisser une grimace, perdre son sourire, elle aurait gagné. Sa main descendit à la hauteur de sa gorge, l'effleurant juste, sans intention de lui briser la nuque. Ce qui l'intéressait, c'était la Croix de Fer qu'il portait au cou. Elle la fit tourner entre ses doigts blancs, jetant parfois un coup d'oeil au visage de Ludwig.

    Il s'agissait d'un cadeau de la Prusse à son cher petit frère. Sans doute qu'il rentrerait dans une rage folle si elle le lui subtilisait. Gilbert. Un autre crétin, un germanique par définition. Lui aussi, il pouvait pourrir dans un camp, ce n'était pas son affaire. Ils pouvaient tous crever, se défenestrer, se pendre, se jeter sous un train, s'étouffer avec des saucisses et ce noyer dans leur bière goût pisse de chat. Tous. Tout la dégoûtait. Elle bu de nouveau, s'asphyxiant de la fumée de sa propre cigarette, avant de s'approcher de lui un peu plus, tirant sur la Croix, prête à céder à tout instant.

    ▬ Compris ? Alors maintenant tu enlèves ta main où je te brûle les yeux avec ma clope, ok ?

    Elle recula légèrement son visage de son oreille, lui crachant lentement la fumée de sa cigarette. Des cendres roulèrent au creux de son cou avant de tomber sur son uniforme. Un dernier regard de glace avant de retrouver son fauteuil, un nouveau verre de bière. Helenka écrasa le mégot sur la table, puis grilla une énième cigarette. Tabac, alcool, pouvait-elle en mourir ? Non.
    Elle poussa un long soupir. Il y avait un vieil homme à barbe, tout là haut dans les cieux, qui devait bien s'amuser devant ce spectacle affligeant. Vraiment.
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Ludwig / Allemagne


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[1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Vide
MessageSujet: Re: [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig]   [1939] La nuit gardienne des pauvres hères. [Ludwig] Icon_minitimeVen 31 Déc - 18:35

    Elle frappait juste. Cruellement clairvoyante, Helenka disait tout haut des vérités que le Reich avait muselés pour les empêcher de murmurer. Ludwig se trouvait face à une sibylle qui ne prenait aucun gant pour lui déclarer la vérité, la lui montrant toute nue. Cela ne changerait rien pourtant. Il y avait bien trop d'animosité entre ces nations pour que Ludwig daigne croire une seule parole de celle qu'il prenait pour une vipère. Elle avait toujours cherché à la détruire, et maintenant qu'il avait enfumé le trou où elle se cachait, elle viendrait lui donner des conseils ? Assurément que non. La Tchèque ne cherchait qu'à l'embrouiller pour mieux le faire flancher. Elle voulait offrir une faille pour stopper ce flot de soldats allemands sur ces terres.

    Cette main glacée sur ce front le fit tressaillir. Oui, elle avait tout de la vipère. La perfidie et le corps de glace. Y avait-il jamais brûlé quelque chose dans ce corps, autre que la haine qu'elle lui lançait en pleine figure ? Aucun amour n'avait habité ce corps. Mais peut-on parler d'amour quand on est une nation ? On peut prodiguer de l'affection autant qu'on le voudra, cela n'empêchera pas des traitrises se montrer au grand jour. Nombreux furent les nations qui virent ceux qu'ils avaient considérés comme leurs enfants les rejeter comme une tare.

    Et tel un serpent, la main tchèque glissa jusqu'à la croix. Là où les mots avaient glissés sans rien toucher, le geste eut tout l'effet d'un long monologue. Qu'Helenka arrache cette croix, et elle aurait réussi à toucher l'Allemagne en plein coeur. Il y avait encore un soupçon d'humanité dans ce corps de fer, un soupçon d'affection qui était près de disparaître.

    Ludwig hésita à ordonner à cette femme d'ôter sa main de là. Avant de comprendre que s'il le faisait, ils entreraient dans une dispute futile et qu'Helenka serait bien capable d'arracher la croix. Elle aurait alors gagné. Gagné une bataille entre eux, mais nullement la guerre menée par les humains. Cette victoire, aussi minuscule qu'elle puisse être, lui déplaisait fortement. Ludwig voulait la dominer, sur tous les plans. Qu'elle se sache anéantie, asservie, dominée. L'Allemand retira sa main du genou tchèque, non sans ôter au passage les cendres que la femme lui avait envoyé.

    - Je te dois combien pour tous ces conseils avisés ? Je ne pense pas que tu fasses ça gratuitement, et encore moins par charité chrétienne. Il faut dire qu'il est facile de critiquer les autres quand on a soi-même échoué là où l'autre réussit.

    Un à un, il détacha les doigts qui continuaient à étrenner la croix. L'envie de les briser lui traversa l'esprit, mais il se retint de la mettre en action. Il se contenta de remettre la croix à sa place, de chercher même à la cacher aux regards tchèques. Ce geste était bien plus parlant que n'importe quel mot. Elle avait fini par l'ébranler cette vipère, à le toucher là où il y avait encore de l'humanité.

    Il se leva pour ne plus sentir l'aura de glace autour de cette femme, et ré-appuyer sa domination car il savait qu'il venait de montrer une faille.

    - Est-ce qu'on demande son avis à un pays envahi ? Non. D'autres liens que la collaboration peuvent exister entre nations. L'asservissement, entre autre. Enfin, ce n'est pas moi qui décide de tout cela, mais mon dirigeant. Si tu as des plaintes à proférer, pourquoi tu ne vas pas les lui dire en face ?

    Du sang et des éclats de bois sur le sol. L'odeur de la cigarette dans l'atmosphère. Dans cette pièce beaucoup de choses s'étaient jouées en peu de temps. Incroyable même que la pièce existe encore et qu'elle n'est pas été détruite sous la colère des nations. Chacun s'était contenté de marqué l'autre, par son sang ou des cendres.

    Il devait enfoncer ses mains dans ses poches pour s'empêcher de toucher la croix à son cou. Non elle ne l'avait pas brisée, pas même tordue, mais elle aurait pu le faire cette garce. Ou même lui arracher du cou pour la faire voler par la fenêtre. Que savait-elle des liens fraternels cette vipère ? Avec son mépris elle ne pouvait qu'être haïe. Alors que lui, l'Allemagne, il cherchait à créer une union des germaniques, à créer quelque chose de solide. Sans même voir qu'il détruisait ces liens filiaux.

    - La Tchèque asservie, cela donnerait quoi à ton avis ? Tu n'as jamais été douée pour les travaux féminins, le statut de servante risque de te dépayser.

    Dehors le soleil amorçait sa descente, donnant au ciel la teinte du sang fraichement versée. Ludwig voulut croire y voir les futures plaies qui émailleraient la peau blanche d'Helenka.
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