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 [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce

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Sadık Adnan / Turquie


Sadık Adnan / Turquie

Qui garde sa langue, garde sa tête.



[1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce Vide
MessageSujet: [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce   [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce Icon_minitimeMar 20 Mar - 21:14

Le masque tombe. L'homme reste, et le héros s'évanouit.

- Serge Gainsbourg

Ah, qu'il avait dû être beau en ce jour d'Octobre 1768, frappant du poing sur la table, entouré du conseil ottoman, enveloppé dans sa sublime tunique, l'air fier et imposant. Il avait dû briller, avec son air toujours très confiant, son gabarit impressionant, sa voix qui porte et son charisme qui avait fait baisser les yeux du russe - car Sadik était de la vieille école, pour lui, baisser les yeux était un signe de soumission ni plus ni moins.

Mais il fallait croire qu'il était vraiment de la TRES vielle école.

Pour être vulgaire, cela faisait déjà plus d'un siècle qu'Ivan le collait au cul dans l'espoir de lui chourer des terres et quelques pays ici et là. Bon, on ne comptait pas vraiment la guerre de 1568 car le contexte était complètement différent - une simple dispute musclée entre un tsar et un sultan n'avait rien de semblables aux yeux de la Russie rivés sur les failles de l'Empire. Depuis, il avait toujours été question de guéguerres territoriales. Hé Turquie, tu veux pas me filer l'Ukraine ? Sois cool. Ou alors juste la Crimée. Un quart de la Crimée ? Un tout petit bout de la Crimée ? Ou juste un tout petit accès aux mers chaudes, allez, il fait froid chez moi.

Hé Russie, tu veux pas me lâcher la grappe ?

Sadik restait toujours digne - autant que sa grand gueule et son côté très nature le lui permettaient - et malgré les deux victoires sur cinq concernant les dernières guerres face à la Russie, il était toujours confiant et certains que tout allait s'arranger.

Et pour montrer qu'il était encore LOIN d'être une nation vieillotte sur laquelle on ne peut pas compter en cas de pépin, il avait décidé d'apporter son aide à la Pologne, qui depuis peu, était sous le joug russe - et aussi parce que cet empaffé de russe s'était amusé à venir brûler un petit village sur son territoire, et Sadik n'aimait pas trop ce genre de blagues.

Bon. Les hostilités auraient pu commencer différemment. Ils auraient très bien pu s'expliquer calmement, car Sadik n'aimait décidément pas ce type et aimait encore moins l'avoir en face de lui sur un champ de bataille, mais Sadik avait toujours eu une grande gueule.

Et ça aurait pu mieux commencer s'il n'avait pas traîté Catherine II de putain. Entre autres.

En tout cas, il s'était passé bien des choses pendant cette guerre - en six ans mine de rien, il y a de quoi faire - et même si l'armée ottomane avait été vaillante et parfois surprenante dans ses batailles, Sadik avait lamentablement perdu la guerre, et sa crédibilité avec.

Il l'avait d'ailleurs vu s'envoler, sa crédibilité, pendant le traîté qu'il avait signé à contre coeur de son bras valide - l'autre s'était prit les débris d'une explosion - à Küçük Kaynarca, en Bulgarie. C'était sans doute le traîté le plus défavorable et rabaissant qu'il n'avait jamais été forcé de signer. Sur le coup il avait pris ça à la légère, lorsqu'il avait vu la liste des privations, de ce qu'il devait céder, des nations qui avaient secrètement pris part à la guerre ; il avait gardé un sourire amer, presque narquois, avait un peu plus subtilement insulté Catherine - non mais, une femme qui décide on aura tout vu - et en était ressorti avec l'air de celui qui voit le côté positif en chaque chose. Comme il l'avait fait à chacune de ses précédentes défaites.

Et pourtant. Celle-ci lui avait fait descendre le moral à zéro. Et c'était bien la première fois qu'il en étant réellement à se demander s'il ne perdait pas son influence, sa puissance et, pire, sa prestance au milieu des autres nations. Il avait connu son âge d'or, allait-il, comme Rome, comme Perse, comme Mongolie, se voir sombrer petit à petit et rejoindre l'ombre derrière les nations florissantes ? Pour la première fois, il prenait sa situation très au sérieux.

Mais il était hors de question de le montrer à ses colonies. Encore moins à ce petit con de grec, qui avait, paraît-il, contribué à la dernière guerre. Pas avec lui, mais contre lui. Bof. Ce n'était pas comme s'il ne s'y attendait pas, mais voir ses possessions se retourner contre soi fait toujours un peu mal au coeur. En quelques sortes.

Il était sacrément amoché lorsqu'il revint au palais ce soir-là. Ses bandages de fortune commençaient à se faire la malle, et il espérait bien ne croiser personne. Pas comme la fois pour Lépante où tous les gosses l'avaient observé rentrer avec de grands yeux. La honte.

Il avait pris de quoi se soigner un peu mieux que ça - non, sur ce coup, Egypte n'allait pas recommencer avec ses bandages en mode momie, il avait retenu la leçon - et était partit se réfugier dans son harem. En silence, sans bruit. La plupart des filles dormaient, et il n'avait pas non plus envie de les réveiller, alors il s'était isolé dans une pièce vide, un peu éloignée des chambres.

D'humeur à rien à part la solitude. Même s'il se doutait que ses quelques discrets - ou pas - gémissements de douleurs allaient en attirer quelques uns.
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Heraclès K. / Grèce


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MessageSujet: Re: [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce   [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce Icon_minitimeVen 30 Mar - 17:39

    Il avait longuement contemplé l'horizon ce jour-là. Assis sur une hauteur, il avait observé les heures s'écouler lentement et pour une fois sans dormir - ou presque. Car ce jour-là, des choses changeaient et de nouvelles perspectives s'offraient à lui, il s'agissait de ne pas les ignorer. Grèce avait peut-être encore un corps d'enfant, mais il n'était de loin pas né de la dernière pluie et était pleinement conscient que son avenir en tant que Nation prenait un nouveau tournant. La Russie avait battu l'Empire Ottoman et dans cette guerre, les armées grecques avaient prêté main-forte aux russes. De ce fait, le Russe avait décidé de se faire protecteur de la nation de ces soldats et ceci, c'était le premier pas vers sa croissance.

    Heraclès lui-même, trop petit encore et n'ayant de toutes manières aucune envie de délaisser chats et siestes pour aller combattre, était resté chez Sadık, suivant les événements avec intérêt. Un petit sourire satisfait se dessinait souvent sur ses lèvres, à l'idée que le grand, méchant et bête turc se prenne des coups.

    Oh, il était conscient que tout ce que faisait ce dernier était...plus ou moins "légitime", après tout, les hommes étaient faits pour se battre et les Nations suivaient le mouvement de près ou de loin. Il savait que les conquêtes étaient chose normale, aussi ne trouvait-il pas sa situation injuste, elle était même plutôt confortable. Mais lui aussi voulait pouvoir grandir un jour et cette guerre avait été une occasion trop belle pour être manquée.

    Trois siècles et des poussières qu'il pouvait profiter d'une petite vie agréable, nourri, logé, libre de responsabilités et faisant ce qu'il voulait de ses journées. Trois siècles et des poussières qu'il devait supporter la sale tronche de Sadık, aussi. Le détestait-il vraiment, au fond ? Il faut dire qu'à force, le petit grec s'était habitué à lui, parfois l'avait-il aussi apprécié. Mais il n'oubliait pas, tout simplement. Il n'oubliait pas que l'Empire Ottoman a été, en quelques sortes, l'acte final de la longue tragédie qui avait emporté sa chère et tendre mère, la belle et fière Empire Byzantin, ou Grèce Antique comme on l'appelait au début. Il n'oubliait pas, c'est pourquoi ce ne sera jamais la paix entre lui et le vieux chameau masqué.

    Et aujourd'hui il était content. Content d'être passé à l'étape supérieure et d'avoir frappé autrement le turc qu'en lui démolissant le tibia ou en mettant un coup de boule dans son gros nez. Cependant, alors que le soleil disparaissait, Heraclès eut un frisson d'inquiétude. Il fallait rentrer. Et il savait qu'il ne restait que peu de temps entre le moment présent et celui où il allait se retrouver face à celui qu'il avait...trahit ? Non. Il n'avait jamais déclaré être son ami non plus. Rien à foutre. Sur le chemin du retour, il se demanda si la teinte rouge et crépusculaire du ciel était le reflet de la guerre, à la fois terrible et fascinante, lugubre et spectaculaire. Il se demanda également si Sadık avait encore assez de force pour l'admirer, son ciel.

    Bientôt, ce fut la nuit, et Grèce se tenait à une des fenêtres du palais pour admirer le paysage baigné de la lueur froide de la lune. Derrière lui, les autres possessions ottomanes, du moins les plus jeunes d'entre elles, dormaient déjà. Les plus âgées...il ne savait pas où elles étaient, et il ne s'en souciait pas. Parmi celles qui dormaient, donc, Égypte et ses yeux grands ouverts qui fixaient le plafond - un spectacle étrange qui rendait n'importe qui nerveux à chaque fois. Il songea vaguement à le réveiller, mais pour quoi faire au juste ? Il y réfléchissait quand il entendit un son discret. Piqué dans sa curiosité, il sortit de la chambre en silence et alla voir ça de plus près.

    Dans la semi-obscurité du couloir, la silhouette vêtue d'un long manteau qui s'engouffra dans une des pièces ne fut pas assez rapide pour échapper à la vue d'Heraclès, qui trottina toujours sans faire de bruit à sa suite. Au passage, il percuta un vase qui manqua d'éclater sur le sol mais il put le sauver de justesse et le laissa là, au milieu du passage. Peut-être que quelqu'un d'autre le brisera du coup et tant pis, les poteries étant faites pour être cassées à un moment donné. D'ailleurs, ce n'était pas comme si le palais ottoman en manquait. L'enfant poursuivit son chemin, passa dans le harem - les femmes de Sadık étaient gentilles, douces et sentaient bon, contrairement à leur mari là (oui, il s'agit de parti prit) - et le vit partir ailleurs. Ce qui ne l'empêcha pas de lui coller aux talons. Et là, à la porte de la pièce, il jeta un coup d'oeil, curieux de voir dans quel état se trouvait l'Empire Ottoman.

    Bon, on voyait qu'il avait connu des jours bien meilleurs, d'ailleurs on pouvait l'entendre souffrir. Du coup, le jeune grec hésitait à s'en réjouir ou bien le plaindre. Il se rendait d'ailleurs compte que c'était triste de constater en face que cet homme que rien ne semblait pouvoir vaincre n'était pas tout-puissant, combien même c'était ce qu'il avait toujours espéré voir. Son voeu s'était réalisé, et ça l'attristait. Il s'avança doucement vers Sadık qui lui tournait le dos et lui planta un doigt entre les omoplates, avec la délicatesse habituelle dont il faisait preuve à l'égard du plus grand.

    — καλησπέρα. T'es toujours vivant ?

    Il le fixa de son regard naturellement endormi, un léger sourire lui relevant le coin de la bouche, toujours à cheval entre le malaise et le sarcasme.



    καλησπέρα (kalispéra) = bonsoir.
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Sadık Adnan / Turquie


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[1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce Vide
MessageSujet: Re: [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce   [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce Icon_minitimeVen 20 Avr - 21:39

Parfois dans la défaite, il savait falloir rester léger. Après tout, Sadik avait toujours été ce genre de gars optimiste qui lance un sourire même dans les moments les plus graves, alors ce n'était pas la raclée qu'il venait de se prendre qui allait lui imposer une nouvelle façon de voir la vie. Il ne s'était pas laissé démonter après Lépante, malgré ses blessures en rentrant, le sourire narquois de la plupart de ses colonies et ses grognements de mécontentement. Il était resortit avec un grand sourire après Karlowitz, le premier traîté qui l'avait traîné dans la boue, signé avec la délicatesse autrichienne et profitant à un tiers de l'Europe. Et pas un seul instant il n'avait imaginé se laisser abattre par la défaite, quelle qu'elle soit.

Il était grand, il était fort. Il était majestueux, cultivé, il possédait le meilleur système social, éducatif et économique d'Europe ; il y avait même apporté la poudre à canon et ses inventions. Sa technologie s'était arrachée à prix d'or, sa culture s'était propagée sur chaque lopin de terre, il était autant crain que respecté ; et si les cauchemars des petits occidentaux avaient été peuplés de terrifiants sarrasins, les ottomans nationalistes des quatre coins de l'empire avaient levé la tête avec fierté en sa direction.

Mais ça, c'était sous le reigne de Soliman.

Et depuis la mort de celui-ci, peut-être Sadik se faisait-il vieux, et sa façon de penser et d'arbitrer le monde, obsolète.

Alors, seulement alors, peut-être que cette angoisse qui l'avait pris aux tripes depuis qu'il avait quitté la Bulgarie, le lieu de signature du traîté ; peut-être que cette angoisse se justifiait au fur et à mesure qu'il se comparait avec les autres Empires qui avaient mal vieilli et avaient fini par mourir dans l'oubli ou la satisfaction d'autrui. Et il imaginait déjà le petit grec, parmi tant d'autres, se pencher sur son corps sans vie avec cette expression bien trop explicite qui se traduit en "il était temps".

Mais imaginer ne veut pas dire y croire. Ce n'était qu'une idée, insuflée par son instant d'angoisse. Et si une boule était née au fond de sa gorge, il n'était certainement pas prompt à se laisser étouffer par celle-ci.

Il tentait de se bander l'avant bras - après s'être rendu compte qu'une écharde de cinq centimères s'y était enfoncé, et à retirer avec les ongles ce n'est pas agréable - lorsque la douloureuse sensation de quelque chose de pointu qui s'enfonce entre ses deux omoplates le fit émettre un petit "irk" pas très viril. Pile poil sur une plaie. C'était bien plus amusant.

- καλησπέρα. T'es toujours vivant ?

Il tourna légèrement la tête vers la provenance de la jeune voix grecque. Il aurait pu lui répondre un simple "grumpf" que la fatigue, la faiblesse et la douleur auraient expliqué.

Mais il n'avait jamais eu l'intention de laisser paraître quoi que ce soit.

- Qu'est-ce que tu crois, hm ? Que je suis en sucre ? En parlant de ça, va donc me chercher un thé et quelques loukoums, si tu veux te rendre utile. Et avec le sourire !

Son ton était presque trop enjoué, trop excité pour ne pas paraitre suspect et complètement crispé. Sa tunique était ruinée, maculée de sang et trouée de part et d'autres, ses muscles étaient douloureux, son épiderme avait été tranché ici et là et le moral n'était pas au top. Etait-ce considéré comme inconvenant d'avoir l'air un tant soit peu touché par les évènements, quand bien même il s'efforçait de le cacher du mieux possible ?

- Et toi, comment s'est passée ta soirée après m'avoir honteusement et machiavéliquement trahi au profit du ruskov, hm ? Tu t'es fait une petite moussaka pour l'occasion ?

Le ton montait un peu. Pas assez pour être franchement agressif, mais on sentait l'irritation.

- Oh au fait, tu sais peut-être, mais j'ai dû verser une indemnité de guerre exhorbitante à la putain tzarine et à son russe de compagnie - y voir Catherine II et Russie - j'espère que tu en profiteras un peu, ça serait dommage que tout reste pour sa bonne poire. Enfin, toi et les autres.

Il se contenait, du mieux qu'il le pouvait. Mais une seule parole déplacée, un seul geste moqueur ou rabaissant, et le grec allait se prendre toute la frustration d'une nation défaite, humiliée en pleine poire.
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Heraclès K. / Grèce


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MessageSujet: Re: [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce   [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce Icon_minitimeMer 16 Mai - 13:21

    Une des grandes qualités du grec était certainement sa patience - à certains égards, du moins. Il y avait un proverbe qui disait « tout vient à point à qui sait attendre » et il collait particulièrement bien à la situation actuelle. Qu'avait fait Heraclès pendant toutes ces années passées sous le règne des Ottomans ? Attendre, ni plus, ni moins. Attendre que le temps fasse son oeuvre. Rien, et sûrement pas le pouvoir n'était éternel. Même la plus haute et la plus solide des montagnes finissait réduite en sable par la pluie, le vent et les années, combien même il en faut des milliers. Un empire, c'était pareil. C'était bien beau, c'était impressionnant, mais c'est soumis aux mêmes lois que toute chose en ce monde. Ça subit des attaques, aussi insignifiantes soient-elles sur le moment, ça connaît des problèmes externes comme internes, et tout ça mène à un effondrement, parfois lent, mais toujours inexorable.

    Ce genre de réflexions, il s'en était faite des centaines et des centaines de fois, à tout moment de la journée ou de la nuit. Après tout, il avait si peu de choses à faire, il pouvait donc passer le temps qu'il voulait à faire de la philosophie. À d'autres moments, il s'amusait avec des mathématiques ou révisait sa mythologie, précieux héritage de sa défunte mère. Non, l'enfant ne passait pas son temps à dormir comme on pouvait le penser. La vérité, c'était qu'il dépensait beaucoup d'énergie intellectuellement. Et aujourd'hui, il avait bien assez réfléchi pour être fatigué - or, il s'agissait là d'une fatigue douce voire agréable, celle qui nous invite à aller se réfugier dans les bras de Morphée, et non pas une fatigue éreintante et lourde comme celle que devait éprouver Sadık.

    Ça se voyait parfaitement dans son regard, et les bleus et les bosses qui étaient visibles ici et là, sans parler des plaies qui ne devaient certainement pas arranger l'ensemble.

    Mais bien entendu, il faisait comme si de rien n'était. Du moins, il tentait. Quelques doutes planaient sur ses talents de comédien, du moins aux yeux du jeune grec. Quoique, tout bien réfléchi, ce devait être plus facile d'être dramatique alors qu'on se sent parfaitement bien que l'inverse. À méditer.

    — Qui a parlé de se rendre utile ? Il lui adressa cependant un plus grand sourire, sans bouger pour autant. Et puis, non, pas de moussaka, en fait on a justement fini les loukoums avec les autres, je crois qu'il n'en reste plus des masses. Si ce n'est pas du tout.

    Par « les autres », il sous-entendait bien sûr les autres possessions ottomanes, et parmi elles, il n'était pas le seul à avoir observer le conflit avec la petite satisfaction de voir le turc se prendre des coups là où ça fait mal. Enfin, l'armée turque, dont il avait fait partie - il aurait très bien pu rester chez lui à surveiller les événements, vautré sur sa pile de coussins et étudier la situation en fumant la chicha. Mais Sadık n'était pas comme ça, et il allait toujours guerroyer avec ses hommes. Question de principe, la nation avec le peuple. Heraclès fera sûrement pareil, mais pas tout de suite. Quand il sera plus grand. Bientôt.

    — Ne sois pas triste, déjà c'est ta faute, tu nous fais une grosse colère pour un incendie, suivit d'un caprice ignoré et maintenant tu boudes comme un enfant. Son visage avait reprit son habituel air endormi, parlant d'une voix égale et toujours lente. La Russie est patiente, pas comme certains qui n'ont pas trop réfléchi et déclarent la guerre alors que leur armée n'est pas prête.

    Il s'abstenu d'en rajouter davantage. Non pas qu'il manquait de mots ou de cran pour rappeler à l'ottoman tout ce qui était allé de travers pour lui dans cette guerre, mais il était tard et puis, ce ne serait pas sage. Même si c'était tentant.

    — Et puis, votre argent, ça vous regarde. Je sais que toute cette histoire va de toutes façons permettre à mon peuple de s'enrichir et de renaître - moi avec, du coup. Tu t'affaiblis de plus en plus, on n'a plus vraiment besoin de toi et tu le sais, entre nous ce n'est plus qu'une affaire de décennies. Il recula d'un pas, et tourna légèrement les talons. Sur ce, passe une douce nuit.

    Que ces derniers mots grinçaient d'ironie. Il n'avait pas pu s'en empêcher, après lui avoir clairement annoncé que d'ici peu, tout le monde allait le quitter. Il ne l'ignorait certainement pas, mais ça devait être relativement désagréable à entendre. Ça devait effectivement l'être. Combien même ce sont des gamins insupportables et qu'on avait souvent envie de les envoyer balader d'un coup de pied bien placé, combien même c'était la Grèce qui se foutait ouvertement de sa gueule à coup de paroles parfois bien élaborées pour son jeune âge, Sadık ne voudrait lâcher aucune de ses possessions.

    Peut-être que pour cette raison, Heraclès sentit qu'il n'allait pas s'en sortir impunément.
    Peut-être que le petit grec allait s'en prendre une, pour changer.
    Peut-être que ce serait la dernière, aussi.

    Peut-être qu'il devrait fuir, là, tout de suite, ou ça allait chauffer.
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Sadık Adnan / Turquie


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MessageSujet: Re: [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce   [1774] Küçük Kaynarca ou "nananananèreuh" | pv Grèce Icon_minitimeLun 25 Juin - 2:20

Une des grandes qualités du turc, ce n'était certainement pas sa patience. L'empire était quelqu'un de sympathique, avec qui il n'était jamais difficile de créer des liens positifs. Mais comme il se plaisait à le dire, s'il pouvait se montrer agréable, il ne fallait pas en abuser. Il savait offrir sans rien demander en retour, mais il valait mieux ne pas se montrer ingrat. Certes il avait l'emportement facile et la main prompte à frapper, mais uniquement quand on venait l'asticoter assez longtemps pour qu'une petite rancoeur ait le temps de naître et d'armer son bras. D'ailleurs, la Russie était récemment en tête de liste, niveau "j'en ai ras le turban de me faire baiser et avec le sourire" - métaphoriquement, bien sûr.

Et parfois, le petit grec semblait vouloir se mettre au même niveau ; et il venait purement et simplement chercher les ennuis auprès de Sadik. Pourquoi au juste était-il venu si son unique but était de venir se moquer d'un type qui fait trois fois sa taille et dont la frustration d'une défaite le poussait à avoir encore moins de patience qu'à l'accoutumée ? Le pauvre enfant n'avait-il pas de cervelle ?

- Qui a parlé de se rendre utile ? Et puis, non, pas de moussaka, en fait on a justement fini les loukoums avec les autres, je crois qu'il n'en reste plus des masses. Si ce n'est pas du tout.

Il soupira. Premier signe d'agacement. Première craquelure sur le masque.

- On en a déjà parlé de ça, je crois, au moins à chaque fois que je reviens de bataille.

Il n'en dit pas plus, car le grec devait très bien comprendre. S'il y avait bien une chose qui insupportait Sadik - à part piétiner ses tulipes et, a priori, tenter d'envahir son territoire - c'était que tous les loukoums, ses précieux loukoums, passent dans l'estomac de ces petites morveuses de nations vassales sans qu'aucune ne songe à lui en laisser. Quoi, il ne leur offrait pas assez ? Pas assez de territoires, pas assez de place, de richesses, d'organisation et de justice sévère mais juste - et, évidemment, sanglante - ; il fallait en plus qu'ils viennent finir ses parts ? Quoi, après il allait devoir leur passer ses concubines avant le dodo ?

- Ne sois pas triste, déjà c'est ta faute, tu nous fais une grosse colère pour un incendie, suivit d'un caprice ignoré et maintenant tu boudes comme un enfant. La Russie est patiente, pas comme certains qui n'ont pas trop réfléchi et déclarent la guerre alors que leur armée n'est pas prête.

Et maintenant, le silence ottoman. Deuxième signe d'agacement. Plus exactement, il attendait. Comme lorsqu'une gueuse demande "quoi ?", pas parce qu'elle n'a pas entendu ce que monsieur a dit, mais parce qu'elle attend de voir s'il a les couilles de continuer sur sa lancée insolente - comme l'avait souvent fait Perse en fait.

Comme un enfant. Tu boudes comme un enfant. Elle était bonne, sans doute la meilleure, mieux encore venant de ce petit bout de nation. Là, Sadik ne souriait plus du tout. Il était fatigué, blessé, réellement mal en point pour la première fois de sa vie - Lépante n'avait été que deux flèches à retirer de son corps robuste, pas une promesse de ressembler à un vieillard boiteux pendant des jours - et il y avait ce grec, ce petit rien du tout, qui venait appuyer sur les plaies avec ses mots tranchants.

Car Sadik savait pertinament que la jeunesse du gamin n'empêchait aucunement sa sagesse. Il avait déjà expérimenté. Et sans nulle doute qu'il ferait une bonne nation s'il n'était pas si feignant et faiblard. Et sous son joug aussi, tant qu'à faire.

- Et puis, votre argent, ça vous regarde. Je sais que toute cette histoire va de toutes façons permettre à mon peuple de s'enrichir et de renaître - moi avec, du coup. Tu t'affaiblis de plus en plus, on n'a plus vraiment besoin de toi et tu le sais, entre nous ce n'est plus qu'une affaire de décennies.

Et la réponse ne fut que silencieuse, car la patience de l'ottoman était à bout. En temps normal, Sadik aurait regardé le gosse, aurait éclaté de rire et, après avoir tapoté le haut de son crâne, lui aurait sommé de retourner jouer avec les autres, ici les grands sont occupés avec des affaires bien réelles, pas de place pour les inepties infantiles.

Mais Sadik était frustré, endolori et, pire, conforté dans son angoisse de voir la fin se rapprocher petit à petit. Et si Yunanistan n'avait pas la science infuse, il savait toujours mettre le doigt là où ça fait mal en l'instant précis. Peut-être était-ce à cause de cela qu'il avait toujours tendance à se prendre plus facilement le courroux de l'ottoman en pleine figure. Peut-être.

- Sur ce, passe une douce nuit.

L'Empire avait déjà prévu sa soirée. Après s'être calmement refait quelques bandages, il serait parti se coucher, la tête contre la poitrine d'une beauté de son harem, et se serait endormi comme une pierre en espérant pouvoir passer le reste de ses jours dans cette même situation, les bandages en moins.

Mais corriger le grec venait de s'ajouter à la liste des choses à faire avant de sombrer dans un sommeil profond.

- Attends un peu, morveux.

Habituellement, il en fallait peu pour que les gamins comprennent que non, ce n'est pas le moment d'agacer Sadik. Et souvent, ils n'allaient pas plus loin, parce que l'Empire n'était pas réputé pour aller doucement dans ses corrections. La fameuse claque ottomane était reconnue comme potentiellement dangereuse au combat, et c'était cette même main qui allait s'abattre sur la fesse grecque.

Le gamin décolla du sol un court instant avant de se ramasser face contre terre. Sadik avait volontairement évité de frapper au visage, car le but n'était jamais de blesser. Et la fessée était bien plus humiliante. Même si la rage actuelle du turc ne l'avait pas vraiment fait réfléchir.

Et le ton de sa voix s'était haussé d'un coup.

- Tu peux m'aimer ou ne pas m'aimer, c'est bien le cadet de mes soucis, salak ! J'accepte tes caprices et tes révoltes à la con uniquement parce que te donner à l'ennemi c'est l'amener à mes portes ! Et quand bien même ça devait arriver, que va-t-il se passer, à ton avis ? Tu penses être capable de créer ton Empire ? Ta propre Nation ? Gérer ton économie et te forger une armée puissante ? Parfait ! Je te regarde, va donc demander conseil à Russie pour ta prochaine rebéllion, jusqu'à ce qu'il t'enfonce tes beaux espoirs dans le fion et que tu reviennes en chouinant pour que je m'occupe de toi.

Le masque tombait. Le masque de grandeur, de puissance. De noblesse. Et sa voix, bien que puissante et emplie de rage, avait quelque chose de brisé. Quelques courtisanes s'étaient réveillées, avaient levé la tête vers eux et observaient la scène, interdites.

- Mais jusqu'à preuve du contraire et décision de ma part, tu es toujours sous mon toît, alors tant que tu te comporteras comme un sale petit con avide de traîtrise, attends-toi à être considéré comme tel et corrigé à chaque haussement de sourcils qui me déplaît ! Et si vraiment j'en n'ai plus pour longtemps, alors tu peux me croire que je passerais les dernières décennies de ma vie à te regarder de haut et à te botter le cul avec les forces qui me restent !

Et puis, le silence. Il avait crié, puissamment. Ses concubines s'étaient toutes réveillées. Bien d'autres personnes avaient dû se réveiller. Et il reprenait son souffle, lentement, tandis que la rage s'estompait pour laisser place à ce sentiment désagréable ; celui que l'on ressent quand s'est inutilement agacé, à un moment peu propice, et sur un point qui n'était pas nécessaire. Ses blessures le lançaient, il ne se tenait pas droit, et il venait sans doute de perdre le peu de prestance que le garçon lui accordait.

- Sors d'ici.

Le ton était redevenu calme, presque froid, tandis qu'il voulait juste qu'il sorte de ses appartements. Il soupira, passa une main sur son visage. Il avait toujours eu le sang chaud et le haussement de ton facile. Pourquoi cette situation lui paraissait-elle si dégradante ?

Ah, oui.

Parce que c'était bien la première fois qu'il se montrait aussi faible, faible au point de réagir si violemment à quelques piques lancées par un enfant.
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