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 {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander]

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{Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Vide
MessageSujet: {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander]   {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Icon_minitimeMar 6 Juil - 7:27

La Mecque, époque actuelle

    C’était impressionnant. Non pas que les bâtiments étaient immenses, ni même qu’ils pouvaient faire face au plus petit building de New York, mais la ville rayonnait de par la splendeur qui s’échappait de chacune des fenêtres, de par l’omniprésence de la religion musulmane… Oui, il y avait des immeubles. Le pays, bien que pauvre, tenait à donner de lui-même l’image d’une contrée qui se développait et allait de l’avant. Les rues étaient grandes et pavées, les allées étaient larges. Dehors, l’agitation régnait, mais tous se dirigeaient vers un seul point de la carte de la ville. Les minarets, d’une blancheur immaculée, chatoyants dans le lever du soleil, n’avaient jamais paru aussi irréels au Kazakhstan. On lui avait appris à pratiquer l’Islam, à diriger ses prières vers La Mecque, on lui avait appris qu’il faudrait, un jour où l’autre, que ses pas le dirigent vers ce lieu de prières et de recueillement, mais jamais dans ses rêves les plus fous, il n’avait songé qu’elle fut ainsi. Ou plutôt, à présent qu’il se trouvait en son sein, il ne se rendait pas réellement compte que sa longue marche avait aboutie, qu’il contemplait de ses propres yeux la ville Sainte.

    Pourtant, Sasha n’était pas le plus croyant de tous, loin de là. Les autres, avaient dû s’y reprendre à plusieurs fois avant qu’il ne se résigne à se plier occasionnellement la religion musulmane. Lorsqu’il parlait d’ailleurs, des conquérants qui avaient tentés de le lui présenter, il pensait surtout à un : Sadiq, le Turc barbare qui ne vivait que par son harem et ses conquêtes féminines. Il avait dû s’y reprendre à deux fois, pourtant. En premier, il avait débarqué sur ses terres, comme un grain de sable dans l’océan ; il s’était accaparé son territoire sans rien lui demander –comme nombre de nations-, il avait fait circuler dans les immenses steppes la route de la soie… et il avait tenté d’apprendre à son hôte provisoire le Coran. « Oui oui, non non », les doux mots de la religion de son conquérant étaient entrés dans l’oreille du Kazakh pour en ressortir, quelques années plus tard, lorsque le Turc était reparti. Mais, rebelote encore lorsqu’il revint, cette fois pour lui inculquer les bases les plus profondes, et en s’assurant que le nomade ne les oublierait pas. De crainte de le voir sillonner à nouveau ses terres sans scrupules, Sasha s’était arrangé pour paraître un minimum attaché à ce qui devint sa religion officielle. En apparence seulement. Au fond, le Kazakh n’était pas vraiment attaché à ces traditions souvent lourdes et dénuées d’intérêt. Pourtant il était là, devant les minarets de la Grande Mosquée de La Mecque, la bouche grande ouverte, prêt à avaler une mouche, voire même un insecte bien plus important vu que la surprise l’émouvait au plus haut point. Ils s’étendaient en hauteur, prêts à lier le Ciel et la Terre, autant par le symbole de ce qu’ils représentaient que par leur prestance, le détail des traits sculptés dans la pierre…

    « La religion est l’opium du peuple. » Karl Marx

    Difficile d’imaginer pire drogue, que celle qui s’accapare votre façon de penser et qui vous réduit à un être humain parmi tant d’autres, une personne manipulée par ceux qui l’entourent, et manipulant ces mêmes personnes. Difficile de résister à cette tentation douce qu’est celle de s’en remettre à une autorité supérieure, d’excuser ses actes en les faisant passer sous son compte et de se repentir en glissant au travers de quelques prières de vagues demandes d’absolution. Pour le Kazakh, l’Islam remplaçait, en partie du moins, ces maîtres stricts sous les jougs desquels il avait bien longtemps vécu. Il se pliait sans grâce à la volonté d’Allah, sans faire plus ni moins que ce que lui ordonnait le Coran. Pourtant, il avait son indépendance à présent : les dominations mongole, chinoise, turque, russe même, étaient derrière lui, il ne devait plus obéir à personne.

    Et pourtant.

    C’était tellement simple de se reposer sur autrui, sur autre chose même. Tellement tentant. Lui qui n’avait connu que la demeure des autres, il avait fallu qu’il s’impose un rythme de vie, qu’il se conforme encore aux normes d’un autre. Il aurait pu tout stopper, dés lors où il avait été seul, mais l’Islam s’était intégré à lui à présent. Comme une drogue. Il en avait besoin pour vivre, ou même survivre précairement, en attendant… quoi ? En attendant quoi ? Il n’avait plus grand-chose à perdre. Il n’avait cependant plus grand-chose à gagner non plus. Seul, comptait son peuple, qu’il devait protéger à tout prix des autres. Et son peuple, croyait en Allah. C’était tout. Il fallait qu’il soit auprès d’eux dans le moindre recoin de leur pensée, ou du moins, des pensées qu’ils se partageaient tous.

    C’était pour cette raison qu’il en était là, à rejoindre le lieu de prière de la Ville Sainte. Comme chaque année, l’Aïd El-Kebir, fête religieuse en hommage au sacrifice d’Ismaël, était organisée en ce jour. Cette année, mû par une envie de changement, le Kazakhstan avait décidé de se mêler aux convives musulmans qui se regroupaient dans la ville d’origine. Il avait donc préparé ses affaires, prévenu son gouvernement –chose qui lui avait encore donné des frissons, lui qui était habitué à en référé directement à Russie-, puis, avec quelques uns des paysans qui peuplaient ses plaines, il avait marché pendant des mois, effectuant ce fameux pèlerinage dont il avait entendu parler de nombreuses fois, et qui lui avait tinté aux oreilles par l’abondance de monts et merveilles. Pour se retrouver finalement dans l’enceinte de La Mecque, une semaine avant la Grande Fête.

    La veille, il avait, comme chacun, clamé les louanges d’Allah dans les rues, s’interpellant à moitié sur la ressemblance qu’il pouvait trouver avec un troupeau de mouton, dont le berger était un Dieu invisible, et les chiens les muezzins. Il s’était endormi le soir avec la gorge sèche et les mains qui tremblaient. Le matin, en se réveillant, il avait mangé un nombre impair de dattes, comme l’exigeait encore le livre sacré. Puis il s’était purifié, paru de ses plus beaux atours, et s’était dirigé ici, vers la Grande Mosquée, où ils allaient tous prier et écouter les sermons de l’imam pendant plusieurs heures. La patience était une qualité requise et mise à l’épreuve par nombre de religions… Sasha avança, et, après avoir prié les deux unités, il écouta le sermon qui ne changeait pas au fur et à mesure des ans. Peut-être qu’écouter un messager l’informer sur les représailles de son Dieu lui permettait-il de ne pas se perdre dans le flot des évènements, qui sait ? Le temps passait, l’imam parlait. Une drogue qui le détruisait autant qu’elle le maintenait en vie. C’était ça l’Islam. Et la Grande Fête, c’était l’occasion pour la Nation de se mêler au commun des mortels pour une journée dans l’année. C’était ce qu’il se disait, écoutant pourtant avec attention le discours du messager, quand il aperçut un mouvement à côté de lui…
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{Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Vide
MessageSujet: Re: {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander]   {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Icon_minitimeMar 20 Juil - 16:30

Spoiler:

Remarque aux lecteurs :
Après le sermon de l'Imam, ce dernier doit sacrifier le mouton et les fidèles doivent en faire de même. Pour ne choquer personne, j'ai préféré ne mettre que quelques lignes vagues sur cette scène mais je préviens quand même. Sur ce, bonne lecture =)

Ce n’était ni la première fois, ni la seconde, ni la troisième, ni même pas la dixième. C’était peut-être la centième fois qu’il venait ici, sans pour autant garder la même ferveur ni la même modestie religieuse, comme lorsqu’il avait foulé ce sol pour la première fois et qu’il avait versé une larme de saint devant des bâtiments d’une blancheur aveuglante et des milliers de corps prostrés vers une boite noire, pour une immense divinité devant laquelle il s’était agenouillé, lui qui avait plus de mille d’histoires, de religions, de dieux. Jamais les siens, pourtant. C’était d’abord les phéniciens, ensuite les romains, puis les chrétiens et pour finir, les musulmans. Tous passaient sur sa terre et en profitaient pour graver leurs propres pensées, leurs propres convictions et il se contentait de suivre le troupeau avec flegme.
Il s’était toujours montré respectueux, presque reconnaissant. Il buvait ces apprentissages nouveaux et les adoptait naturellement. Certes, cette image de lui devenait de moins en moins vraie, de plus en plus entachée par une nouvelle averse, de nouvelles influences. C’était toujours ainsi. Il y avait toujours eu deux sortes de Nations. Celles qui conquièrent et celles qui sont conquises. Et il faisait irréfutablement partie de la seconde catégorie.
De toute manière, il n’avait pas du tout une tête de vainqueur. Il ne pouvait même pas se dire, d’un air nonchalant, qu’il était un « solitaire ». Bien au contraire. La position géographique de ses terres étaient même une invitation aux étrangers, comme un de ces panneaux, à chaque entrée d’une ville, qui vous dit : « Bienvenue à Kairouan* », par exemple.

Mais bon, là, c’était plutôt « Bienvenue à La Mecque. »

Au bout d’un certain temps, il essayait d’être détaché. Pourtant, il n’y avait pas plus fatigant et plus gênant que de faire ces jours de pèlerinage. Il fallait mettre les affaires de côté, passer dire bonjour à Arabie Saoudite, papoter entre pays musulmans et ensuite faire le pèlerinage pour recommencer le tout dès le début. Je veux dire par là : Re-dire bonjour à Arabie Saoudite et re-papoter entre pays musulmans. Un très excitant programme qui avait lieu au moins une fois tous les… dix ans ? Quelque chose dans ce goût-là. Ils n’étaient pas toujours les mêmes au rendez-vous – et il lui arrivait de leur poser un lapin – mais autant l’avouer, il n’y échappait jamais totalement. Ce n’était pas réellement une corvée, loin de là. Après presque mille ans, l’Islam était devenu une part entière de son peuple et les traditions s’étaient peu à peu encrées en chacun d’eux, malgré la nouvelle influence occidentale. Eh oui, lui aussi souffrait de l’ère gothique et des gamins athées*.

Pourtant, certaines habitudes étaient devenues plus culturelles que religieuses. Comme les longues nuits de Ramadan, avec l’odeur du couscous, la saveur sucrée des friandises et le rire des familles réunies autour d’une table bien remplie. Lorsqu’il y pensait, il lui arrivait de se dire que malgré le chemin que certains de ses ‘frères’ avaient pris, l’Islam ne perdrait jamais sa pureté première. Sans doute. Peut-être.

Mais qui pouvait contredire ce mince espoir, devant cette ville claire et blanche. Aussi blanche que ces tuniques simples dont chacun devait se draper. Elle avait changé au fil des ans. Elle n’était plus cette petite ville simple, sauvée par Abraham*. Elle était grande, immense, un peu étouffante. Elle était à l’image de toutes ces villes que l’argent essayait de corrompre. Et il devait croire en ça ? Son peuple devait offrir toute sa dévotion pour ça ? Il lui suffisait de regarder cette foule, une foule blanche et noire à la fois, pour deviner que parmi tous ces visages, plusieurs étaient venus de sa terre, plusieurs avaient durement économisé pour ce voyage, ce périple, ce pèlerinage. Et de retour chez eux, on les comblerait de compliments, on les appellerait Hâj ou Hâjja, on les regarderait avec une envie pieuse. Et même si le temps emporte ce mois gravé dans le foulard qui emprisonnerait leurs longues chevelures, ou la Jebba que les vieillards porteraient chaque matin en allant au marché, il y aurait toujours ce suffixe, et cette admiration parfois vraie lorsqu’ils raconteraient leurs semaines passées à La Mecque.

Et pourquoi n’y auraient-ils pas droit ?

Ces cinq jours lui paraissaient toujours vides et longs, portés par la petite brise estivale et brûlés par un soleil d’une blancheur qui se reflétait sur chaque visage, gravant avec indifférence une rougeur maladive par-ci ou des rides creuses par-là. Mais ces cinq jours rapportaient tant. Le Coran ne disait-il par que ce pèlerinage effacerait tous les péchés commis ? Mus par ce désir simple et humain, ils s’agenouillaient, priaient et écoutaient sagement la voix grave de l’Imam qui sonnait le début de la Fête du Sacrifice. Il parlait, sermonnait, citait des paroles du prophètes ou des versets du Coran. Et peu à peu, ça devenait une mélodie imprimée dans le vent, dans les minarets blancs de la Mecque, dans ce cocon vitreux qu’il ne retrouverait nulle part.

En ce jour béni qui fêtait la fin du pèlerinage, il regrettait les tuniques blanches. Les plus proches Nations le savaient, Tunisie aimait le blanc. Le blanc de Sidi Bou Saïd, le blanc des mosquées, le blanc de la Mecque. C’était éblouissant, simple, pur. Ce n’était pas cher aussi, mais ça, on ne va pas en parler…
C’était la Grande Fête. C’était la fin, aussi. Dans quelques jours, il retrouverait sa terre, ses soucis, ses airs de diplomate. Il ne lui restait plus que ces dernières heures pour profiter de ce qui lui avait toujours semblé être un arrêt dans le temps, pendant lequel il n’était pas Tunisie, mais l’un de ses millions de pèlerins, sans que personne ne le reconnaisse. Qui le regarderait ? Ils avaient tous les yeux rivés vers l’Imam. Et dans cette enceinte sacrée, il ne rencontrerait jamais aucune autre Nation. Jamais…

En arrangeant les plis de ses vêtements, il aperçut ce qui aurait dû n’être qu’un humain parmi trois millions d’autres. Ce qui aurait dû, bien évidemment, car ce ne l’était pas vraiment. Il savait que ce visage appartenait à une connaissance. Ces cheveux noirs, cette peau mate ne lui étaient pas inconnus… Kirghizistan peut-être ? Non, non… Les deux avaient eu à supporter Ivan, qu’il ne connaissait pas le moins du monde, si ce n’est à travers ce que racontaient Francis & cie. C’était… C’était… Kazakhstan ! Il était tout à fait normal qu’il ait du mal à s’en rappeler, il ne connaissait la Nation qu’à travers le fait qu’ils aient la même religion principale… Ce qui, en d’autres mots, ne voulait pas dire grand-chose. Il le voyait pendant certaines réunions mais autant l’avouer, il ne se souvenait pas lui avoir adressé la parole ne serait-ce qu’une fois !

Au loin, il entendait les sermons s’évaporer. Il se retourna vers l’Imam. Le moment était venu, cet instant long enraciné dans le corps de chaque musulman, enregistré dans les yeux de chaque enfant. Lorsqu’on sacrifiait cette bête, au nom d’un très lointain événement dont personne n’avait le souvenir. Et l’odeur du sang qui en résultait qui devenait de plus en plus forte, de plus en plus sale, à mesure que le liquide rougeâtre s’écoulait. Et le temps venait pour chacun d’eux, fidèles à cette tradition que certains trouvaient barbare, d’en faire de même. Ensuite, ils avaient droit au festin. A la joie simple et à la saveur brûlante de la viande. C’était l’un des seuls jours de fête.

Il se dirigea vers la Nation qu’il avait remarquée plus tôt.
« Taqabbal Allâhu minnâ wa minkum*. C’est bien la première fois que je vous vois présent au pèlerinage. Si nos frères l’apprenaient, ils en seraient joyeusement surpris ! »

Quoi de plus ‘naturel’ que de débuter ainsi une conversation...

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{Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Vide
MessageSujet: Re: {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander]   {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Icon_minitimeDim 25 Juil - 21:51

    Le sacrifice de l'agneau. Il fallait le dire, ça le dégoûtait un peu, à chaque fois, et il attendait avec appréhension le moment où l'Imam se levait pour prendre la vie de l'innocente créature et exhortait les fidèles à le suivre. Non pas que Sasha tournait de l'oeil, ou devait supporter un quelconque faiblissement à la vue du liquide rouge écarlate, mais il avait la sale manie de s'identifier à cette pauvre bête qui avait juste le malheur d'être. Souvenir d'un instant qui n'avait plus dans la mémoire des gens qu'une vague résonnance, l'empreinte de l'encre qui avait été tacher la page du livre sacré. L'être faible sacrifié pour une entité invisible, ça ne lui rappelait que trop bien les différentes situations dans lesquelles il avait été fourré. Son statut de faible, forcé de subir les volontés d'un autre, plus grand, plus imposant, pus sûr.
    Mais qu'importait. Comme chacune des personnes présentes ici, il avait du sang sur les mains. Comme chaque musulman, il se devait de ressentir ce sentiment d'humilité qui le poussait à respecter plus encore ce dieu qu'on lui avait appris à aimer, et à craindre.

    « Taqabbal Allâhu minnâ wa minkum*. C’est bien la première fois que je vous vois présent au pèlerinage. Si nos frères l’apprenaient, ils en seraient joyeusement surpris ! »

    Ehhhhhm, oui. Très bien, très bien.
    Une fois que les sonnettes d'alarme se soient tues dans la tête du Kazakh -"Intrus, intrus, potentiel envahisseur, fais attention"-, il tenta vainement de se rappeler le nom de la personne qui lui faisait face. Tenta, parce que le nom ne lui revint pas en tête.
    Mais alors, pas du tout. Son visage, ses traits taillés, lui disaient vaguement quelque chose, pour sûr. Il lui semblait l'avoir aperçu durant quelques réunions où il cherchait encore l'ombre rassurante de son ancien protecteur russe. Mais comment se rappeler le nom de toutes ces têtes, de tous ces pays qui se tenaient aux réunions mondiales? Impossible. Encore moins d'apposer les noms en question sur leur tête respectives. C'était une mission aussi suicidaire que celle de se métamorphoser en agneau ce jour sacré.
    Enfin, presque. Le pire, c'est qu'il savait qu'il le connaissait. Il était certain d'avoir ce sunnite en mémoire. Il l'avait sur le bout de la langue, mais... ça lui échappait. Du moins, pouvait-il encore lui rendre son salut et passer sur les détails. Autant éviter que son interlocuteur ne le considère comme malpoli. On ne sait jamais, s'il lui venait l'idée d'étendre ses terres. Même si il n'avait en lui rien de bien méchant, même si sa présence n'était pas agressive, se montrer courtois était prendre un risque en moins. Et puis, il était à une fête. Autant oublier les doutes, et profiter de l'instant présent. Un mince sourire s'échappa de son visage épuisé encore par la route longue qu'il avait traversée de part et d'autres, priant, pour se rendre jusqu'à la Ville Sainte.

    - Taqabbal Allâhu minnâ wa minkum... Il est vrai que je mentirais si je me mettais à affirmer que j'ai déjà maintes et maintes fois effectué le trajet... C'est la première fois que je me rends sur ces lieux.

    Il fit une courte pause, scrutant des yeux la ville sainte, dévorant de son regard ce paysage sacré. En ne baissant jamais la tête, jamais. La Mecque, se devait de garder sa pureté et son innocence aux yeux de ses fidèles, sans qu'ils ne voient ce lieu qu'ils viennent de profaner et de teinter d'une couleur rubis pour leur dieu. Du moins, c'était ce que pensait le Kazakhstan. Il se sentait stupide. Vouloir se fermer les yeux alors qu'il était lui-même au coeur de ce qu'il ne voulait pas voir. Mais qu'importait. L'odeur du feu montait, lentement, de légères vapeurs s'élevaient, dansant dans l'air environnant. Il faisait beau, c'était bien. La pluie aurait pu gâcher cet instant, salir de son rideau opaque les grandes tours blanches, le décor si pur. Pittoresque. Et pourtant... Même si il venait ici des dizaines, des centaines, des milliers de fois, Sasha devinait aisément qu'il ne se lasserait jamais de ce paysage. Jamais. Et Arabie Saoudite devait être bien fier de sa petite ville, qui avait prospéré au fil des ans grâce à la religion musulmane.
    Bien qu'il n'était pas question de tourisme.

    - A vous entendre, vous devez vous rendre régulièrement ici... non?

    Il sourit chaleureusement. Il fallait l'avouer, il ne s'attendait pas à croiser une autre Nation, bien qu'il aurait dû s'en douter. Après tout, quoi de plus naturel pour les pays musulmans que de se diriger vers le lieu de toutes leurs prières? Si les circonstances avaient été autres, Sasha se serait sûrement traité de... crétin. Mais non. Il faisait beau, la journée était belle, tout se devait d'être radieux. Il n'y avait pas tant de fêtes que ça, dans le calendrier musulman. Alors il fallait profiter au maximum de chaque opportunité qui se présentait de faire régner la joie dans leur coeur.
    Et pourtant, il restait cet écart, simple, cette tension qui existait, millénaire, entre deux pays autrefois conquis. Le vouvoiement. C'était simple, mais ça restait l'une des meilleures façons de garder une certaine distance avec l'autre, de ne pas se brûler les ailes en s'y approchant de trop près. Même si, théoriquement, il n'avait pas grand-chose à craindre de la personne qui se trouvait en face de lui.

    - C'est un endroit magnifique, je regrette de ne pas y avoir mis les pieds plus tôt.

    Mais il fallait avouer qu'il n'en avait jamais eu l'opportunité. La ville semblait être un rêve qui pourrait s'échapper sitôt qu'il aurait tenté s'en approcher de trop près. Un rêve qu'il avait peur de blesser. Sasha observa un instant le tumulte jovial qui se déroulait autour d'eux. Tout ça, lui donnait un sentiment de paix, de bonheur. Et peut-être devrait-il en remercier Sadiq un jour. Peut-être...
    Sadiq. Le sursaut qu'il eut ne passa sans doute pas inaperçu. Il avait trouvé! Il avait trouvé! C'était Tunisie, le petit Tunisie qui avait vécu pendant un moment avec le Turc! Enfin, petit.... Pas si petit que ça, mais bon, l'essentiel était qu'il avait retrouvé son nom. Tunisie. Une appellation qui n'était pourtant pas si compliquée, pas si arrachée, pas si dure à l'oreille que beaucoup d'autres, dont il se souvenait parfaitement bien. Et surtout, il n'aurait jamais pu se permettre de faire une quelconque remarque au vu de la façon dont il s'appelait lui-même. Kazakhstan. Pour un nom écorché, c'en était un. Non, Tunisie, il aurait dû s'en souvenir. Surtout que la splendeur de certaines de ses villes lui était revenue au oreilles, durant un temps. Par son peuple, par les autres islamistes.
    Par Turquie, aussi.
    Non, Tunisie, c'était joli, agréable, épuré. Un peu comme la ville. Alors il était content, oui, d'avoir réussi à s'en souvenir. Il avait mis du temps, mais bon, maintenant, tout était arrangé. Au moins ne ferait-il pas la grossière erreur de l'appeler par le patronyme d'un autre. C'était à la fois une question de fierté et de principes.

    Ou presque.
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{Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Vide
MessageSujet: Re: {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander]   {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Icon_minitimeVen 3 Sep - 16:31

Spoiler:

    Durant les dernières décennies, il avait dû s’approcher un peu plus de ses « frères » arabes. Ce n’était pas une question de choix, et bien qu’il ne les détestait pas réellement, leur compagnie ne lui était pas tout à fait agréable non plus. Lui avait vécu avec l’emprise occidentale, passant tour à tour dans les mains de plusieurs pays européens. La seule nation arabe qu’il avait réellement connue était Sadiq, qui n’était pas ce qu'on appelle un bon exemple. Il y avait eu aussi les campagnes islamiques qui lui rappelaient les campagnes présidentielles des temps actuels. Les humains ne savaient décidément pas innover. Ne pouvaient-il pas trouver autre chose ? Il lui semblait qu’avec eux, rien n’était spécialement nouveau et tout se répétait à l’infini. Et l’infini, il en savait assez pour s’ennuyer d’avance. Heureusement qu’il existait certaines nations qui, bien qu’en étant réellement difficiles à supporter, faisaient passer le temps. Mais les arabes n’en faisaient pas tout à fait partie. Entre ceux qui parlaient de pétrole – sujet de discussion on ne peut plus antipathique aux yeux et aux oreilles d’Alexander – et ceux qui projetaient de construire les plus grands gratte-ciels – ce qui n’intéressait nullement le tunisien -, il lui était quasi impossible de se sentir en agréable compagnie. Et disons qu’eux aussi ne devaient pas l’apprécier plus que ça.

    Mais voilà, son patron actuel n’était pas du même avis et grand bien lui fasse, ça ne le dérangeait pas tant que ça lorsqu’il réfléchissait à ce que ces nations avides de luxe pourraient construire dans son pays et à l’argent que ça rapporterait. Oui, c’est moche direz-vous mais un pays, ça n’avance pas sans argent. Et contrairement au grec, lui, il ne pouvait compter sur personne en tant de crise. La preuve : Quelques siècles plus tôt, il s’était retrouvé au même rang que tous ces pays officiellement colonisés… ou pas. Vu que Francis lui avait fait la gentillesse de cacher la colonisation derrière le fait qu’une commission l’avait envoyé pour surveiller son compte bancaire et en substituer les montants servant soi-disant à payer ses dettes. Sa guerre avec l’Allemand, plutôt, oui !

    Bref, les dernières années l’avaient donc vu essayer de se familiariser avec les coutumes des Nations Arabes, lui qui était plus maghrébin qu’autre chose. Parler football ou handball avec Maroc ou Algérie, c’était passable. Mais parler de lingerie féminine avec l’Arabie Saoudite, c’était une toute autre histoire !* Et autant dire que ces expériences ne l’avaient pas encouragé à faire connaissance avec les autres pays musulmans moins connus, dont Kazakhstan. Non seulement la géographie et la distance en kilomètres entre les deux terres comptaient assez, mais leurs passés étaient très différents. Si ses souvenirs ne le trompaient pas, il faisait partie de cette poignée de petits pays colonisés par le russe. Russe dont, soyons francs, il ne connaissait absolument rien. A part ce que pouvaient raconter les autres Nations sur lui et les quelques contacts rarissimes qu’il eut avec lui, il n’y avait strictement rien entre eux. Pourtant, Russie ne semblait pas être une Nation très désagréable vu que Kazakhstan n’était ni pauvre, ni psychopathe. Enfin… d’après ce qu’il savait, ce n’était pas le cas.

    Il avait l’air poli… Okay, c’est normal pour un pays arabe, me direz-vous. Avoir l’air poli, c’est un sport national, culturel et tout ce que vous voulez. Ceci dit, ça comptait énormément, sachant qu’en des circonstances moins joyeuses et moins festives, le Tunisien n’aurait jamais adressé la parole à une Nation alors qu’il lui avait fallu plus de cinq minutes pour mettre un nom sur son visage !

    - Taqabbal Allâhu minnâ wa minkum... Il est vrai que je mentirais si je me mettais à affirmer que j'ai déjà maintes et maintes fois effectué le trajet... C'est la première fois que je me rends sur ces lieux.

    La première fois ? Il laissa échapper un petit regard étonné. Il était rare qu’une Nation soit musulmane et tienne aussi longtemps sans faire le pèlerinage. Alors que normalement, ils n’avaient pas à le faire. D’après le livre sacré, il fallait le faire au moins une fois dans une vie. Et sans mort, la vie n’est pas. Ils n’étaient donc pas vivants. Ils n’avaient pas réellement l’obligation de faire cette longue semaine douloureuse, qui, d’un point de vue extérieur, ne leur rapportait rien du tout. Un soupir cueillit ses pensées et il les chassa d’un sourire entendu à Kazakhstan. Ce dernier devait être assez impressionné. La Mecque faisait partie des lieux religieux qui vous emplissent de respect et de petitesse quand vous y plongez pour la première fois. Et la deuxième et la troisième aussi. Mais au fil du temps, la passion s’essouffle. Quoi qu’en disent les romantiques, pour lui, la beauté perdait de son attrait avec les années et l’habitude. Il n’y avait pas de chose matérielle qui puisse rester belle tout au long de son existence. Tout comme les humains, ça se fanait, se dépérissait et s’effritait. Mais ils survivaient tant qu’il y avait encore des gens pour les trouver magnifiques. Voilà à quoi servaient les sept milliards de têtes présentes sur la planète.

    C’était sans doute pour ça qu’il était incapable de prendre soin de ses sites archéologiques et de les mettre en valeur…

    Mais s’il y avait quelque chose qu’il trouvait toujours merveilleuse, c’était bien la sérénité que l’on ressentait dans cette cité blanche, bâtie sur une religion, un Dieu, une chimère pour certains. Il lui semblait que cette « illusion » pouvait pourtant annihiler toute trace de noirceur dans un cœur humain, le temps d’un pèlerinage, d’une fête, d’un instant. A part la passion violente, laide, aveugle qui naissait dans certains esprits, il y avait le calme et les sourires doux après une semaine lourde de fatigues, de chemins faits et refaits, de prières humbles, d’égalité presque parfaite entre chacun. Dire que cela disparaissait vite lorsqu’ils quittaient la cité blanche pour s’engouffrer dans leurs vies grisâtres pour être mangés par un noir abyssal.

    - A vous entendre, vous devez vous rendre régulièrement ici... non?

    Il lui rendit son sourire, tout en essayant de cacher sa surprise. Non pas que la question en elle-même le dérangeait, elle était même très banale et tout à fait parfaite pour débuter une discussion douce, sans casse-tête mais il avait perdu l’habitude d’entre des Nations arabes lui parler aussi poliment. Il avait toujours adoré la langue arabe, parce qu’elle était juste. Pas de vouvoiement, pas de tutoiement. C’était un pronom pour tous, riche ou pauvre, roi ou roturier. Un peu comme la langue anglaise mais lui n’était pas maltais et n’avait aucunement envie de vanter les choix linguistiques d’Arthur. Bref.
    Sans vous ou tu, il n’y avait que le ton pour créer un lien, accentuer un sentiment, un espace entre l’interlocuteur et son public. Et celui de Kazakhstan était distant, ce que Tunisie comprenait. C’était bien là la meilleure façon d’agir. Il aurait été encore plus surprenant de voir la Nation lui parler familièrement, comme le faisaient ses voisins algériens et libyens !

    « Oui, j’ai pris l’habitude de venir tous les dix ans à peu près. C’est calme et il y a peu de risques de tomber sur de vieilles connaissances. »

    C’est sûr que le jour où il verrait un de ces occidentaux à la Mecque, il considérerait le monde comme officiellement au fond du gouffre.
    La Mecque resterait sans doute le seul endroit où il ne pouvait pas rencontrer un de ces européens excentriques. Mais il n’en était pas de même pour les pays musulmans ; le risque était toujours là et la présence de Kazakhstan le démontrait fort bien… à l’exception près qu’elle ne lui était pas désagréable.

    - C'est un endroit magnifique, je regrette de ne pas y avoir mis les pieds plus tôt.

    Il acquiesça d’un air entendu. A ses yeux aussi, la cité sainte était magnifique. Protégés par ses remparts et par le culte qu’on y servait depuis des siècles, on ne pouvait penser aux soucis extérieurs, aux querelles politiques qui nous y attendent. C’était simple et rassurant.

    « Rares sont les lieux où on peut allier aussi facilement le calme et la joie. C’est en regardant ces êtres simplement heureux d’être lavés de tout pêché, qu’on se dit que la religion n’est pas née seulement pour servir d’excuse aux décisions de certaines personnes. C’est éphémère mais je suppose qu’en ces temps de fête, même l’éphémère est beau. »

    Il eut un sourire triste en regardant la fumée, chargée parfois d’une odeur succulente de viande, d’épices et de légumes et les humains qui, ayant perdu leur tunique blanche, riaient de joie dans leurs couleurs chaudes, comme s’ils jouaient à qui serait le plus beau paon. La musique accompagnait leur allégresse et cette exaltation victorieuse née après une semaine de souffrance, de privations, cette semaine qu’ils avaient idéalisée et rêvée pendant toute leur vie. Il devait avoir l’air bête à jouer le rabat-joie en soupirant des paroles aussi grises.

    « Je suis désolé, ce n’était pas la meilleure chose à dire alors que tout nous pousse à l’alacrité. »

    Un petit rire gêné accompagnait ses excuses piteuses et il replongeait son regard dans un tableau vivant qu’il admirait pour la centième fois.


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MessageSujet: Re: {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander]   {Epoque actuelle} A l'intérieur des murailles, se réveillait la cité blanche... [Alexander] Icon_minitimeJeu 9 Sep - 20:30

Spoiler:

    Il fallait l'avouer, le Kazakhstan avait rarement eu l'occasion de se montrer en dehors de l'Union Soviétique aujourd'hui tombée. Bien sûr il n'en avait cure, préférant rester bien sagement chez lu... non loin de chez Ivan, plutôt que de courir le risque d'être agressé et annexé d'un instant à l'autre. Il n'aimait pas courir le monde, et il appréciait le Russe, malgré son caractère quelques fois... inquiétant. Des nations arabes, il n'en connaissait pour ainsi dire pratiquement pas. Il y avait bien ses frères ; bien qu'il n'avait plus souvent l'occasion de côtoyer comme auparavant Kirghizstan, Ouzbékistan, Tadjikistan et Turkménistan. Il était difficile pour les uns comme les autres de penser que sous la tutelle russe quelques années plus tôt, ils étaient constamment dans les traces les uns des autres, et qu'à présent il leur fallait faire leur chemin seuls... Il divagua un instant, se demandant si la Nation qu'il avait en face de lui avait connu ces mêmes préoccupations. Avait-il été sous la tutelle d'un autre? Sûrement, les nombreuses avancées de Turquie n'avait pas dû l'épargner. Mais les autres? N'avait-il été que sous la tutelle de ce simple d'esprit ou s'était-il déjà retrouvé face à un pays plus sournois, plus ambitieux? Certes, on ne pouvait pas dire de Sadiq qu'il était un Saint. Néanmoins il n'était pas un monstre d'opiniatreté et il arrivait fréquemment aux oreilles de Sasha que le Turc ne traitait pas mal ses "collocataires forcés".

    Lui-même en avait été témoin, après tout.

    On ne pouvait pourtant pas dire que Kazakhstan était arabe. Certes, il était musulman. Certes il avait été sominé par Turquie. Certes il parlait cette langue mélodieuse. Et pourtant. Ses paroles n'étaient teintées que des durs reproches de son ancien protecteur à l'ombre si rassurante pour lui, si terrifiante pour bien d'autres. Alors oui, il était Kazakh, il était le mélange de nombreuses cultures plus différentes les unes que les autres, il avait été créé par ces peuples emplis d'avidité qui avaient su s'adapter à la Nature des steppes et s'accorder avec elle. Oui, il était musulman. Oui, il était Kazakh. Mais qu'était devenue l'identité nationale après tant d'années perdues dans les sillages d'un autre? Lui-même le savait, au fond de lui, cette Nation qu'il était, arborait fièrement le drapeau strié des couleurs russes.

    Mais son propriétaire n'était pas un fervent croyant concernant l'Islam, bien au contraire. Souvent Sasha n'était pas d'accord avec Russie lorsque l'idée de la religion venait à apparaître dans leurs conversations, alors autant de fois elle partait étrangement sur une autre rive, les emportant bien loin de querelles religieuses. On ne pouvait définitivement pas comparer l'Islam à la religion orthodoxe. C'était impossible. Puis, Sasha avait assez souffert des multiples passages de Sadiq pour se résigner à ne pas oublier les grandes lignes du Coran. Pour sûr il aurait préféré être d'accord avec Ivan. Mais prendre le risque d'être converti à nouveau par le Turc? Ah, ça, non. C'était hors de question. Il n'avait pas que cela à faire de passer d'une religion à une autre, 1 à 1, balle au centre. A la limite, se mettre au football, okay... S'enfermer dans une maison lorsqu'arrivent des invités, okay... MAIS changer de dieu tous les trois/quatres matins, euh, c'était niet. De plus, il pouvait partager quelque chose avec ses frères, ce qui... n'avait été guère possible pendant longtemps. Se raconter des histoires au clair de lune pendant que le vent soufflait une brise légère dans le dos? Niet, il fallait constamment vaquer à droite à gauche pour régler multiples affaires concernant l'URSS. Partir en balade tous ensemble dans les steppes? Hors de question, imaginez qu'une bome nucléaire vous tombe sur la tronche?
    Enfin, tout cela lui faisait beaucoup de raisons pour ne pas avoir de liens plus étroit avec la fratrie orientale à laquelle il appartenait. En tout cas, il n'y avait pas grand rapprochement entre eux, si...? Lui ne les voyait pas mais peut-être se ressemblaient-ils après tout. Il était souvent dit que les frères et soeurs se ressemblent toujours mais qu'eux-mêmes ne le voient pas car ils se rejettent les uns les autres et refusent d'être enclavés dans un moule et d'être des copies conformes les uns des autres...

    Peut-être devraient-ils se lancer dans la production de photocopieuses?

    Trêves de plaisanteries, soyons sérieux. L'ambiance était détendue, l'atmosphère agréable. Restait toujours ce recul et cette distance que Kazakhstan prenait garde à conserver entre Tunisie et lui-même, mais c'était vrai que le Tunisien avait l'air cruellement sympathique. Au point de lui faire confiance? Non, non, il ne fallait pas exagérer. Le nombre de personnes/Nations/crétins -rayez les mentions inutiles- à qui le Kazakh faisait confiance se rapprochait dangereusement du zéro... et y était même arrivé, depuis un moment déjà. Il se réfugiait chez les uns chez les autres sans prêter de fiabilité à leurs paroles. Chaque fois que quelqu'un lui adressait la parole il restait sur la réserve, écoutant et ne disant rien de plus que les autres n'attendaient entendre de sa bouche. Ce n'était pas triste, c'était ainsi et c'était tout. Difficile de faire autrement.

    En écoutant Alexander, il leva à un moment un sourcil interrogateur. Ainsi, il venait ici tous les dix ans? Ainsi il pensait ne pas rencontrer de vieilles connaissances? Le Kazakh esquissa un sourire. Il le dérangeait sans doute, lui-même venant affronter de plein fouet la religion musulmane dans toute sa splendeur. Oui, sans doute ces immenses tours blanches ne pouvaient être partagées. Pourtant ils n'étaient pas "de vieilles connaissances". Pouvait-il au moins considérer le Tunisien comme une "connaissance", tout simplement? Sûrement pas. Il ne pouvait pas se permettre de donner un titre de familiarité à une Nation qu'il n'avait qu'entre aperçue entre deux hamburgers américains et les postillons qui allaient avec.

    « Rares sont les lieux où on peut allier aussi facilement le calme et la joie. C’est en regardant ces êtres simplement heureux d’être lavés de tout pêché, qu’on se dit que la religion n’est pas née seulement pour servir d’excuse aux décisions de certaines personnes. C’est éphémère mais je suppose qu’en ces temps de fête, même l’éphémère est beau. »

    Et tout ça accompagné d'un sourire bien triste et pénible à voir. Sasha détourna un instant les yeux. Il n'aimait pas voir ce reflet dans les yeux des autres, celui qu'il connaissait si bien, cette expression qu'il avait vu lui-même modeler son propre visage à travers un miroir brisé. C'était les yeux d'une personne qui avait souffert, prié, qui avait souffert de ses prières et de ses croyances. Pourtant, croire, c'était la seule raison potable à accorder à ceux qui s'obstinaient à se ranger religieusement. La croyance était l'espoir de ceux qui avaient tout perdu. Elle était celle qui conduisait leur âme à s'élever bien loin des tourments de leur vie quotidienne et ne voir que les côtés positifs de cette vie. Puis, dans l'Islam qui est le symbole même du sacrifice pour l'absolu, qu'était-ce que le monde alentour? Alexander avait raison. La Mecque était le symbole d'une religion que beaucoup avaient perdue, mais que beaucoup d'autres encore conservaient dans leur sang pour avoir un immortel auquel s'accrocher.
    Peut-être le monde en avait-il bien besoin, de cette pureté, de cette brèche dans le réel? Qui sait. Oui, c'était éphémère. Oui, demain, les sourires et la joie partiront pour aller rejoindre ce qui leur servait de monde, mais, n'étaient-ils pas pareils? Ne voyaient-ils pas dans les yeux de ces hommes ce qu'eux étaient dans une échelle plus démentielle encore? Bref, le débat n'était pas à cela. La Mecque était un endroit merveilleux où le mal ne traversait pas la palissade, où chaque geste, chaque pensée, n'était que velours teinté de nacre. L'on eut dit qu'un bouclier d'espoir avait été tissé tout autour de la ville pour empêcher les mauvais songes de la rejoindre et apposer dans le coeur des Hommes la tristesse et la déception.

    « Je suis désolé, ce n’était pas la meilleure chose à dire alors que tout nous pousse à l’alacrité. », ajouta-t-il avec un petit rire gêné.

    Sasha reposa à nouveau les yeux sur Tunisie et lui sourit, d'un sourire franc qui ne cachait ni peine, ni déception, ni amertume. Seulement un sourire amical voulant dire implicitement à l'autre qu'il n'y avait pas de gêne, que ses paroles étaient exactes et justifiées. Puis, son visage se ferma légèrement et il leva les yeux au ciel. Les nuages. Il y avait quelques nuages vagabonds qui se disputaient en duel dans les profondeurs du divin. Il s'accordaient avec la mélodie envoutante de la ville, avec sa blancheur écarlate, sa sobreté parfaite et pure. Le nez toujours en l'air, il ferma légèrement les yeux avant de baisser à nouveau la tête et de parler, les yeux fuyants, dans le vague.

    - Rien n'est éphémère du temps qu'il accompagne ceux qui ont vécu ces instants dans leur coeur. Du temps qu'il y aurait des croyants pour venir prier ici, du temps qu'il existera des musulmans pour réfugier leurs espoirs dans la Ville Sainte, alors jamais la joie ne disparaîtra, car tous ceux qui viennent en pélrinage se recueillir entre ces murs, tous ceux qui admirent la pureté de la Ville Sainte, y sont pour se laver de toute faute et repartir par la suite en paix. Je ne vois pas la Mecque comme une ville de passage, mais de transition. Elle est cette limite qu'il existe entre la fragilité et le bonheur, cette simple ligne qu'il faut franchir pour accéder à la perfection de l'être. Personne ne peut aider quelqu'un qui ne veut pas aller mieux, mais ceux qui le souhaitent alors, repartent en emportant dans toute leur âme un fragment de la Ville Sainte.

    Il se tut brusquement, s'informant soudainement que sans doute le Tunisien n'avait pas vraiment envie de parler de ce genre de choses, d'autant qu'ils étaient tous deux à une fête et que euh... les fêtes étaient à la base créées pour s'amuser et non pas pour assomer un pauvre interlocuteur de discours monotones et ennuyeux. D'autant plus qu'il ne partageait peut-être pas sa vision des choses. Tunisie semblait voir le bonheur de la Mecque comme un bonheur éphémère, un espace de vie totale dans laquelle tous baignaient puis que tous quittaient à nouveau à regret, alors que Sasha le voyait comme éternel, un sentiment que chacun emporterait avec lui jusqu'au plus profond de ce périple perpétuel plus fréquemment nommé "vie".

    - Enfin, ce n'est que mon opinion, se hata-t-il d'ajouter, peu envieux de se trouver au milieu d'une querelle -encore plus en ces temps difficiles.

    Pour ça, demander à Kazakhstan de ne pas se cacher dés qu'un désaccord pointait le bout de son nez, c'était demander à Brad Pitt de devenir une femme. Autant dire que ce n'était pas de la tarte.
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