Sunhilde est très protectrice envers ses enfants. Comme une louve avec ses petits, elle ne laisse pas facilement les étrangers les approcher. Hermann disait souvent qu’elle exagérait, qu’elle devrait les laisser un peu être indépendant à leur manière. Mais l’ancien empire du nord trouvait toujours une excuse en disant que les enfants allaient bien chasser avec leur père. Il faut l’avouer, quand ils partaient à dos de cheval, une inquiétude se faisait sentir. Et s’ils disparaissaient ? À l’époque, la scandinave était assez anxieuse pour un rien, mais cela s’est assagi avec le temps.
Scandi’ aime se battre. En plus de faire bien la cuisine –contrairement à une certaine celte-, c’est un domaine dans lequel elle excelle. Que ce soit avec une épée ou une hache. Ou tout autre objet, son agilité lui permet bien des choses. La nordique est cependant moins forte que Germania, mais a souvent du mal à l’avouer. La chasse et la pêche sont aussi ce qu’elle apprécie le plus. D’une, ça nourrit les gosses, de deux, ça permet de s’occuper quand l’ennui se fait sentir. Avouez-le, sur ses terres il n’y a pas grand-chose à faire…
La mère nordique apporte beaucoup d’attention. Ça peut être véritablement à n’importe quoi. Envers ses enfants, Hermann, à la neige, la glace, l'étendue de la nature. Parfois, il lui arrive d’être trop curieuse et foncer tête baissée là où il ne faut pas.

Tel que la glace et la neige, Scandinavie est d’un tempérament glacial. Ce n’est pas rare de la voir comme ça. Pas avec ses tout petits, avec qui elle est (trop?) affectueuse, mais surtout avec Sterenn, qu’elle considère comme une « rivale » à cause des désirs de procréation de Germania. Il arrive qu’elle envoie des pics, comme ça, par pur désir de vengeance ou de jalousie. (Et ça, Norge l’a très bien vu. Après, il a voulu imiter maman et a choisi comme victime Danemark. Pauvre chose !).
Si elle n’est pas d'un calme absolu en vous envoyant des crasses, elle se mettra vite en colère et n’hésitera pas à vous provoquer pour commencer un duel. Comment ça, cela ne se voit parce qu’elle ressemble à une belle jeune femme innocente ? Ne vous fiez pas aux apparences !
Mais en plus de la provocation pure et simple, Sunhilde, c’est quelqu’un de TRÈS direct. Elle dit souvent ce qu’elle a sur le cœur sans faire vraiment attention aux conséquences de ses mots. D'ailleurs, elle en dit beaucoup, des mots. Elle a la parlotte, contrairement à Germania qui bavarde peu.
Ah, et n'oublions pas le plus important. La nordique est tolérante, autonome et amoureuse de la nature.

Hermann. Un frère, un amant, un ami. Tout pour elle. Quelqu'un de très important pour elle. La scandinave y tient énormément. Les seules choses qu'elle lui reproche, c'est son désir de procréation et aussi le fait qu'il soit parti loin d'elle, à la conquête de nouveaux territoires. Mais intérieurement, Sunhilde lui a toujours pardonné et racontera toujours à ses fils l'épopée vers l'autre monde, de l'autre côté de la mer.

Ses trois garçons. Aujourd'hui sa fierté, ceux qui portent son nom, la Scandinavie. Ils ont tout hérité d'elle. Ses pouvoirs, son tempérament, sa force.Berwald est l'aîné de cette fratrie, contre toute attente. Sagesse est un mot qui lui va fort bien. Dommage qu'il ne parle pas autant que Danmark. Nous y voilà, Johan est sans aucun doute celui qui ressemble le plus à sa mère. Le plus bagarreur et bavard de la troupe, mais aussi celui qui fait le plus de bêtises... Combien de fois elle a dû le réprimander lorsqu'il rentrait de chasse avec de la boue jusqu'aux genoux ? Ce petit est une véritable pile électrique. Enfin, Einvind. Ce dernier a hérité de ses pouvoirs, celui de voir les fées et autres créatures fantastiques. D'un calme cornélien et pose beaucoup de questions. Vous savez, la barrette en forme de croix qu'il porte dans ses cheveux, c'est sa mère qui lui a faîtes.

« Est-ce que ces trois là se souviennent de moi ? J'espère que... je n'ai pas totalement disparu de leur mémoire. »

_____

Dans l’air frais de la nuit, Scandinavie errait sur le bord du rivage qui séparait la mer et le campement dont elle s’était éloignée. L’air absent, elle marchait d’un pas lent, accompagnée de quelques fées lumineuses voletant autour d’elle. La jeune femme leva un regard vers le cosmos au-dessus d’elle, où dansaient des voiles couleur émeraude dans le ciel nocturne.


La scandinave fronça les sourcils, tout en s‘asseyant sur un rocher non loin d’elle. Elle ferma les yeux un moment.

« Je vais très bien. Laisse-moi. » Lâcha-t-elle avec indifférence.

La créature magique s’envola un peu plus loin. D’un coin de l’œil, Scandinavie la regarda s’éloigner. Il y eut un silence lorsqu’elle sentit quelqu’un s’approcher en courant. Curieuse, elle tourna la tête vers l’individu.

« …Dan’ ? Tu n’es pas censé dormir, mon adorable chérubin ? » Fit-elle avec un sourire.

Le punir ? Oh non, les enfants s’inquiètent pour leur mère, tout simplement. Elle n’était pas fâchée. Au contraire, elle était heureuse que quelqu’un se préoccupe d’elle. Il faut avouer que, depuis le départ de Germania, tout était assez… vide. Terriblement vide. En prenant Johan, elle vit non loin deux petites têtes blondes sortir de la tente. Sunhilde leur fit signe de venir jusqu’à elle. Une fois réunis, Danemark monta sur ses genoux et lui demanda, un grand sourire aux lèvres :


Allons bon. Une histoire. En plein milieu de la nuit. Les enfants n’arrivaient tout simplement pas à dormir, finalement. Cela ne la dérangeait guère, elle ferait n’importe quoi pour que ses enfants soient heureux. Ceci depuis leur naissance. Mais là, sur le coup, elle n’avait pas la moindre idée de ce qu’elle pourrait leur raconter… Ah, si, les péripéties de leur père ? Non, à chaque fois, c’était la même chose. « Soyez fier d’être les fils de votre père, mes enfants. » répétait-elle sans cesse, en accumulant les qualités de leur paternel. Oui, Scandinavie admirait Hermann. Et elle ne le cachait pas. Pas le moins du monde.
Elle leva la tête vers le ciel obscur. Les aurores dansantes avaient disparu, laissant place aux mille et une étoiles mystérieuses qui regardent ce monde. Elle serra son manteau de laine. Le froid se faisait sentir. Dan’ s’était levé pour s’approcher du lac, avec Norge qui l’avait suivi. Sve’ était resté près de sa mère, tout en la fixant. De l’inquiétude ? De la peur de la part de la progéniture ? Qui sait…


Elle fronça les sourcils et ferma les yeux. Tant de mots désignant la « mère ». Tant de choses qui différencient les trois frères qui seront obligés de se séparer un jour ou l’autre, qui seront obligés de vivre sans leur mère. Apprendre la loyauté, connaître l’adversité, la renaissance, la perte d’un être cher. Ah ! La scandinave en avait bien conscience !


Alors laisse parler les étoiles. Dis leur ce qui les attend dans quelques siècles. L’avenir ? Si tu leur raconte, ils ne se rendront même pas compte que ça les concerne. Ce sont encore des âmes pures et innocentes… Qui ne connaissent rien. Rien du monde qui les attend.
Elle frotta ses yeux embués du revers de sa main et allait dire à Sve’ d’appeler ses frères. Mais elle s’abstint lorsqu’elle les vit près d’elle, le regard anxieux.

« Bon, et bien, autant commencer l’histoire ! » lança t’elle comme si de rien n’était. « Hum… Vous connaissez l’histoire des trois mages ? – face à l’interrogation, elle continua sur sa lancée.- Il y a fort, fort longtemps, trois mages qui étaient amis d’enfance. Ils régnaient en maitres sur un continent où le froid et la neige étaient un temps particulièrement néfastes. Parmi eux, se trouvait un devin particulièrement autoritaire, violent, et beaucoup trop fier de lui. Il se croyait puissant, car il possédait la partie la plus riche de leur territoire. Ses deux autres compères conservaient des terres moins denses, mais cela leur suffisait amplement. Ils le considéraient surtout comme un grand immature ne prenant pas conscience des réalités. »

Elle s’arrêta un moment. Etait-ce nécessaire de continuer là-dessus ? Face à l’attention de ses bambins, la nordique se dit que ça en valait la peine.

« Face à une invasion venue de l’autre côté de l’océan – mais aussi pour faciliter le commerce entre les peuples-, ils décidèrent de créer une union en faisant un pacte. Mais tout ne se passa pas comme prévu. Le mage des Ours blanc n’était pas d’accord que ce devin s’autoproclame roi de cette union. Il faisait tout ce qu’il voulait sans demander l’avis à personne et méprisait tout un tas de personnes… Et là… Soixante-dix années de batailles éclatèrent entre les deux mages… Le mage rouge et le mage bleu… Où est le mage violet… ? J’ai l’impression de l’avoir oublié… Ah… AH ! »

Scandinavie sursauta. Elle venait d’avoir une vision. Du sang qui coulait à flot. Elle chassa ses frissons en secouant la tête, encore tremblante. C’était la dernière fois qu’elle demanda aux étoiles de lire l’avenir.
C’était stupide. Complètement stupide.

Elle jeta un œil vers ses rejetons. Ils dormaient à poings fermés, encore assis sur la neige.

Elle eut un petit rire et s’approcha d’eux. La scandinave les prit dans ses bras et leur posa un baiser sur le front. Il ne fallait plus qu’elle pense à ça. Juste de l’instant présent.