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 Le discours de Jéricho [3 mars 1965]

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Netsah / Israël


Netsah / Israël

Le sale gosse de la Synagogue


Poissons
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RPs en Cours : 1.la malédiction du golem. Autriche
2.Le discours de Jéricho. Tunisie
3.Petit air de paradis... Pologne
4.Le carnaval de Venise. Italie.
5.1er Avril 2010 : Asile de corruption. Liechtenstein
6.La ballerine et le musicien. Autriche et Ukraine
7. Et d'autres...

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Le discours de Jéricho [3 mars 1965] Vide
MessageSujet: Le discours de Jéricho [3 mars 1965]   Le discours de Jéricho [3 mars 1965] Icon_minitimeMar 23 Fév - 15:57

Spoiler:

Ce matin là, Netsah Blumenfeld s’était levé avec la certitude que sa journée se passerait mal, qu’il aurait quelque chose de gênant à faire ou alors que ce serait une réminiscence du dixième jour du mois de tevet(1). Autrement dit, un jour de malheur intense.

Cette pensée pessimiste pourrait sembler excessive, mais cette impression avait persistée dès l’instant où, par un geste brusque, son réveil (made in America) avait volé de sa table de chevet au mur d’en face. Et qu’alerté par le bruit, un homme avait accouru à son « secours ». Netsah l’avait accueilli en le menaçant instinctivement avec la première chose lui étant tombée sous la main.

La chose en question était une arme près de son lit. Cette même arme qu’il avait reçue en « cadeau » un jour de 1956 et qui avait donné lieu à une polémique de la part de ses « tuteurs » mortels. Surtout depuis que Netsah l’avait mis dans sa chambre comme l’avait suggéré un certain ainé blond donneur d’arme. Vous savez, histoire de contrer les menaces terroriste en tout genre, on ne savait jamais, n’est-ce pas ? Ce n’était pas un crime de vouloir se défendre ? Ce n’était même pas de la paranoïa, mais de la pure et saine prudence, mère de sureté, n’êtes-vous pas d’accord avec cela ? Enfin, bref, malgré ses excuses (sincères en plus !) sa menace irréfléchie le priva de petit-déjeuner.

Ensuite, il s’aperçu avec effroi que pendant son voyage à travers sa chambre, son réveil avait poussé l’encre qui s’était rependue sur son bureau, frôlant dangereusement sa pile de livres préférés. Heureusement, la jeune Nation pu les sauver de justesse de la version miniature de la marée noire, tout en poussant quelques jurons bien sentit. Histoire de déverser sa mauvaise humeur et son stress sur des objets et un vide qui ne le priveraient pas de manger, surtout si ses chers makrouds étaient en jeu. Ces petites pâtisseries si douces, croquantes et savoureuses, un délice pour le palais et... son estomac le rappela à l’ordre, manifestant son mécontentement par un grondement sourd et audible de tous.

Arriva midi et son cortège de douces promesses à dévorer. Cependant, loin de pouvoir ensuite se reposer de cette matinée désastreuse, quelques heures plus tard, on lui annonça qu’il était nécessaire d’aller rendre visite à une Nation. Puisque celle-ci avait l’intention de faire un discours, pour le reconnaitre lui. Il regarda le messager d’un drôle d’air, comme s’il hésitait encore entre le « vous vous fichez de moi, c’est ça ? » et le « Ha et comment le savez-vous ? La lecture dans les arrêtes de poisson ou dans les miettes de pain ? ».

Néanmoins, il se rappela d’un certain courrier qu’il n’avait pas voulu lire, un courrier rédigé en arabe… venant d’un pays anciennement colonisé par Francis… (Connaissant le Français, Netsah sentait venir la compassion voire la sympathie pour cette Nation. Surtout s’il s’avérait que ce fut une femme). La jeune Nation ne se frappa pas la tête uniquement parce qu’ensuite vient le grand, le gigantesque « enfin, bon sang, ce n’est pas trop tôt. ». Pour une fois qu’un pays arabe le reconnaissait. Iran et Turquie ne comptaient pas. Iran étant un être à double personnalité voulant se faire bien voir d’Alfred et Sadiq était… Sadiq. Dans le bon et le mauvais sens du terme.

Cependant, comme mentionné précédemment, Netsah avait pressentit que cette journée serait aussi mauvaise d’un plat anglais serait immangeable. En conséquence, l’adolescent en conclu que cette annonce était un piège, un traquenard perfide tendu par ses pires ennemis. Ou alors, la Nation_ c’était quoi son nom déjà ?_ voulait quelque chose, sa peau, son pays, son argent… quelque chose, n’importe quoi ! Netsah inspira profondément, rejetant ses pensées pessimistes en bloc.

Après tout, ne devait-il pas être content de se faire reconnaitre par un autre pays ? Surtout si on tenait compte de son raisonnement fort simple : un pays de plus aujourd’hui, demain tous les pays le reconnaitrons à sa juste valeur (mais non, ce n’était pas un rêve, absolument pas.).

Fort de ses pensées positives, il s’apprêtait à partir pour Tunis pour venir remercier/sonder les pensées de son nouvel « allié », lorsqu’on lui tendit les affaires qu’il devait porter.
Une chéchia couleur noire enveloppée d'un turban sombre et une jebba d’un bleu sombre (ah, s’ils comptaient l’attendrir en lui offrant l’une de ses couleurs préférées, ils se mettaient le doigt dans l’œil). Autrement dit, la tenue que devaient autrefois porter lest tunisiens juifs pour se différencier des bons tunisiens musulmans.

Inutile de dire que Netsah se mit en colère (et ce n’était pas dû au fait que la soie le gênait et que la chéchia le renvoyait inévitablement à une certaine publicité française pour du chocolat. Celle où un homme riait bêtement avec un sourire de pervers ou d’Ivan, ce qui était cent fois pire).

Enfin, bref, Netsah refusa en bloc cette… ces trucs infâmes, même pour des questions d’ordres diplomatiques (s’il n’avait pas été puni de déjeuner le matin, Netsah leur aurait immédiatement sortit les mots « pays d’Europe », voire un pays en particulier, mais il n’était pas d’humeur à faire de mauvaises blagues noires. Comment ça pour une fois ?). De plus, personne n’avait aucune idée du cadeau approprié à donner au Tunisien en remerciement. Les makrouds et pâtisseries étant exemptées, puisque la plupart des pâtisseries cuisinées ici étaient séfarades(2), donc il y avait un risque qu’Alexander en produise voire en mange tous les jours.

Agacé par toute cette masturbation intellectuelle inutile, Netsah s’avoua vaincu, seulement pour la tunique, la chéchia étant jetée à terre, piétinée sauvagement. Histoire que tous comprennent le message.

Personne n’osa le punir encore une fois et il fut décidé que le Tunisien recevrait comme présent la politesse suprême de Netsah (sans aucun sous-entendu plus ou moins sarcastique, sans aucune blague non désirée) et la certitude de se voir offrir le gîte et le couvert si un jour, il désirait retourner en Israël. La jeune Nation s’efforça de ne pas lever les yeux au ciel, même lorsqu’on lui jura de complimenter son hôte de marque.

Netsah se prépara donc à rencontrer son homologue et quelques temps plus tard, il était dans un avion à destination de Tunis, la capitale tunisienne. Apparemment, son ainé n’avait pas cherché bien loin le nom de sa capitale, mais bien entendu, l’adolescent ne devait pas le dire. Il marcha un peu dans la ville, guidé par l’un de ses nombreux guides internationaux (mais non, il n’en avait pas partout. Juste dans de nombreux pays, c’est tout), fut presque émerveillé par le souk, les nombreuses couleurs vives et sombres, une ambiance presque festive, les maisons.

Tout aurait été parfait si tous les commerçants ne s’étaient pas donné le mot pour l’apostropher en vantant de manière bruyante et presque convaincante leurs marchandises(3) (Bon, il avouait que ces chaussures étaient plutôt jolies, mais il avait autre chose à faire, bon sang.) Et puis, certains sourires sonnaient faux, comme imprimés à la va-vite sur les visages.

Ce détail était vraiment perturbant.

Netsah priait presque pour que son homologue n’ait pas le même sourire. Comme tous ceux connaissant le tunisien devaient s’y attendre, il fut donc un peu déçu lorsqu’il fut reçu dans un bâtiment administratif par un sourire qu’on ne saurait pouvoir qualifier de bienveillant ou de faux. Un sourire qui rendait l’israélien mal-à-l’aise, après tout, combien lui avait souri ainsi en lui faisant mal ensuite ? Un peu trop à son goût.

« Bonjour Monsieur Alexander » Commença il dans un arabe qu’il espérait naturel. Cette langue avait beau être la seconde langue officielle avec son cher hébreu, il avouait avoir du mal à la parler. Il avait une nette tendance à mélanger les mots, ce qui l’énervait rapidement et en général, il passait rapidement à l’hébreu par la suite.

« Je vous remercie de votre hospitalité et de votre considération à mon égard. Cela me touche qu’un si grand pays, tel que vous, me reconnaisse. »

Netsah se sentait mal en prononçant ces mots. Il n’aimait pas mentir, contrairement à ce que pouvaient dire certains. Netsah pouvait le faire, le faisait souvent lorsqu’il était en danger ou lorsque son peuple en avait besoin ou pour obtenir quelque chose d’important. Cependant, cela ne changeait rien au fait qu’il détestait tordre la vérité ou inventer quelques idioties pour s’attirer la bienveillance des autres. Or, s’il était content d’un pays le reconnaisse, il n’était pas touché. Ou il ne le sera que lorsqu’il aurait la conviction que cette action était sincère et dénuée d’arrière-pensée, ce dont il doutait fort. Et puis, « grand pays »… la Tunisie n’était pas bien grande par rapport à la Turquie (en taille, évidemment), mais autant ne pas le préciser.

« Sinon… votre Tunis est superbe… »

Il rougit en murmurant ces mots, presque comme si l’aveu lui coûtait ou était gênant. Pourtant, cette fois, il était parfaitement sincère. Tranquillement, il attendit la réaction de son vis-à-vis. En essayant de ne pas regarder le sourire qui faisait douter, qui lui donnait envie de fuir.

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MessageSujet: Re: Le discours de Jéricho [3 mars 1965]   Le discours de Jéricho [3 mars 1965] Icon_minitimeMar 2 Mar - 16:03

Alexander Osmane, plus connu sous le nom de « Tunisie », avait souvent fait des erreurs de calculs, des fautes de parcours, des bêtises d’enfant obstiné, des égarements coûteux. Il lui était arrivé d’être trop franc ou trop hypocrite. Il avait même regretté certaines de ses décisions, certains de ses gestes. Mais tant qu’il tenait debout à la fin, ça lui allait parfaitement. Du moins… en apparence.

En 1958*, le nom d’Israël l’avait quelque peu intéressé. Disons le tout de suite, malgré ses belles paroles de musulman qui veut aider ses frères de religion, il pensait d’abord à la politique qu’à ces histoires d’entraide. Il fallait voir qui des deux – Israël ou Palestine – serait plus utile dans le rang des collaborateurs. Ca ne servait à rien de se montrer sentimental même s’il se sentait assez gêné de tendre la main à une Nation juive. Ensuite, le projet s’était endormi dans son esprit. Il venait à peine de se débarrasser plus ou moins de Francis. Il fallait reconstruire le pays, le renforcer, le sortir de ses siècles d’infériorité.

Et un beau jour de Janvier 1965, en se réveillant lentement – comme d’habitude : il ne faut pas trop demander à un habitué du soleil et un ennemi du froid – il y repensa. Depuis le temps, Israël avait avancé et rien que son nom plongeait ses voisins maghrébins et « amis » musulmans dans une sorte d’embarras agacé. Il était clair qu’aucun d’entre eux ne voulait papoter du jeune garçon. Mais Alexander insista. La situation avait trop duré. Il était impossible de virer Netsah de là alors autant trouver un terrain d’entente. Or, malgré plusieurs heures de débats, personne n’approuvait sa décision. Même ceux qui avaient l’habitude de l’encourager avaient l’air de soupirer un : « On est désolés mais on ne te suit pas sur ce coup-là, mon vieux. » Il en était arrivé à douter de lui-même et il lui fallut presque deux mois pour faire un réel choix. Choix qui déplut fortement à ses camarades puisqu’il avait choisi de parler officiellement de la reconnaissance de « l’ennemi ».

Il avait donc envoyé une lettre à Netsah, en arabe – oui, parce qu’il faisait déjà des efforts pour parler l’hébreu, il ne fallait pas non plus lui demander de l’écrire ! – concernant ce qui aurait lieu un certain 3 Mars, à Jéricho, en Cisjordanie. A vrai dire, malgré les airs calmes et sûrs qu’il se donnait, l’idée de faire ce premier pas sur un pont incertain l’effrayait. Etre là, au milieu de ce conflit, sans être lui-même convaincu, le tétanisait. Combien de minutes s’étaient-elles écoulées depuis qu’il tenait son long discours dans les mains, le visage livide ? Il n’arrivait même plus à reconnaître les mots qu’il connaissait par cœur. Il l’avait tellement lu et relu, corrigé et recorrigé qu’il doutait de sa capacité à l’oublier un jour. Il était là, imprimé, avec cette peur agaçante de perdre quelque chose en en désirant une autre. Etait-ce la bonne décision ? Ne fallait-il pas suivre les autres et continuer à nier l’existence de la Nation, tout en lui tournant furieusement le dos ? Bien d’autres l’avaient fait et continueraient à le faire. Mais n’était-ce pas stupide ? Au lieu de jouer les gosses obstinés, il était plus intelligent de chercher un terrain d’entente. Quelque chose qu’apprécieraient les deux camps. Mais c’était impossible. Là, devant ces feuilles noires d’encre, il s’en rendait de plus en plus compte.

Or, il avait longtemps accueilli une importante communauté juive à Tunis. (Même si ça ne devait pas être la joie pour eux…) Jusqu’à cette satanée seconde guerre mondiale. Jusqu’à tous ces combats perdus d’avances pour toutes les Nations. Il inspira profondément, sentant sa détermination faillir légèrement. Allons, allons. Ce n’était pas le bon moment. Encore quelques heures et la Nation serait là, devant lui (Et non pas chez lui. Il aurait été mal vu de le rencontrer autre part que dans un bâtiment administratif construit pour les papotages politiques). Côté organisation, il n’avait pas à craindre quelque chose. Pour une fois, tout était arrangé. On ne dirait pas qu’il était incapable de bien accueillir un « honni » de ses frères*.

On finit par l’appeler, lui disant que son homologue israélien était arrivé. Il s’était donc présenté, son éternel sourire préfabriqué sur les lèvres. Il ne fallait pas lui en vouloir. Il avait une nature de commerçant et c’était bel et bien un sourire naturel ! Il ne pouvait pas y changer grand-chose. Il avait le même air pour tout le monde ; allié ou pas.

« Bonjour Monsieur Alexander » Il réprima sa surprise. Il savait que la Nation parlait l’arabe. Assurément. Sinon, comment ferait-elle avec ses voisins ? Mais c’était tout de même étonnant – et étrangement soulageant puisqu’il n’avait plus à utiliser l’hébreu. Certes, son arabe était un peu maladroit mais ce n’était rien à côté des européens. (Quoique Francis n’ait jamais pris la peine d’apprendre sérieusement sa langue.)
Il acquiesça, murmurant un « bonjour » poli.

« Je vous remercie de votre hospitalité et de votre considération à mon égard. Cela me touche qu’un si grand pays, tel que vous, me reconnaisse. »
Il fronça immédiatement les sourcils. C’était louche. Ca sentait non seulement l’hypocrisie mais le compliment mal choisi. Premièrement, Alexander n’était pas un grand pays. C’était gentil d’essayer mais l’adjectif était trop exagéré pour pouvoir flatter la Nation. Au moins, l’israélien savait les bases de la politesse et la courtoisie. C’était déjà ça, même s’il se doutait bien qu’il ne devait pas être un goujat sans manière. Heureusement pour la planète Terre, il n’y avait pas des Francis et des Sadiq partout !

« Sinon… votre Tunis est superbe… »
Ce dernier compliment – encore plus mal choisi que le précédent – arracha un petit rire amusé au tunisien. Tunis ? Superbe ? Ca ne collait vraiment pas ensemble ! Il était encore en train de reconstruire sa capitale. Pour quelqu’un qui avait déjà dû voir Paris, Moscou ou tout autre capitale étrangère, Tunis était un petit point assez… campagnard. Encore que la campagne tunisienne ait encore et toujours des airs de Moyen Age. Bref. Il s’arrêta de rire – oui parce qu’à force, Netsah finirait par le prendre pour un fou – et déclara d’une voix un peu essoufflée :

« C’est bien courtois de votre part d’essayer de complimenter mais il aurait été plus facile de choisir les souks ou la nourriture. »

Il n’avait pas tort. Lui-même adorait ses souks. C’était animé, joyeux et coloré. Chacun se remettait à sa façon de la colonisation. Et personne ne baissait les bras. Ce n’était certes pas très amusant de se faire bousculer et d’être assailli par des commerçants ayant plus des airs de brutes que d’humains normaux mais ça faisait partie du charme des lieux. N’importe qui, même en entrant hésitant et peureux, en sortirait de bonne humeur.
Il fit signe à Netsah de le suivre et ils entrèrent dans un bureau moins « administratif ». Il avait eu le temps de changer l’affreuse décoration française par une autre typiquement maghrébine. Evidemment, c’était bien plus chaleureux. Il s’assit sur un sofa qui, comme il en avait l’air, était peu confortable et invita l’israélien à en faire de même.

« Même si le thé et les accompagnements soient servis, allons tout de suite au vif du sujet. Vous devez savoir ce qui aura lieu demain*. » Sa voix était plus grave, moins joyeuse. Le sujet en lui-même ne lui permettait pas d’autre choix qu’un sérieux méthodique en attendant que les mets l’aident à mieux formuler ses idées.


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Netsah / Israël


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MessageSujet: Re: Le discours de Jéricho [3 mars 1965]   Le discours de Jéricho [3 mars 1965] Icon_minitimeMer 31 Mar - 18:18

Un instant, il avait cru que son pressentiment matinal n’était qu’un effet du stress, un relent de peur enfantine ou alors de la simple para… prudence mêlée à de la mauvaise humeur. En effet, tout se passait plutôt bien (si on comparait ses rapports avec la population de… disons, ses voisins (ou ses relations avec ses voisins tout court), cela se passait effectivement bien, même trop bien d’ailleurs.) Netsah désenchanta très vite en entendant le léger rire et les paroles de son interlocuteur :

« C’est bien courtois de votre part d’essayer de complimenter mais il aurait été plus facile de choisir les souks ou la nourriture. »

La voix était un peu essoufflée, encore empreinte d’amusement, d’ironie… de moquerie ? Peut-être, sans doute même.

Quelque chose empêcha la jeune Nation de répondre « Bah, la prochaine fois, je ne dirais rien. Tant que j’y suis, vos souks sont des pièges à touristes remplis d’harceleurs et d’hypocrites ambulants, voila ! ». Il ne savait pas vraiment quoi. La volonté de faire un effort, de ne pas se laisser aller ? Le fait que le ton ne lui semblait pas si moqueur que ça? (Il avait connu pire comme remarque cinglante, mine de rien) Ou alors, sa promesse de ne plus se laisser déborder par la colère ? Surtout devant un potentiel allié, surtout devant un allié.

« Je retiendrait la leçon. Et je n’ai jamais dit que je n’aimais pas la cuisine tunisienne. »

Il chercha à être le plus poli possible pour ne pas froisser son hôte. Cependant, il renonça à avouer qu’il cachait volontiers des makrouds dans son placard par milliers, avec son actuel état de malchanceux compulsif, Alexander croirait à un nouveau mensonge, mieux valait donc s’abstenir. Il n’allait pas (de nouveau) se mettre un dos un pays arabe, futur allié qui plus est.

Allié. Le mot lui semblait toujours aussi étrange, aussi froid, amer. Un bonbon cachant derrière la plus belle des apparences bien des secrets, des manipulations. Un mensonge égoïste, presque mesquin. Allié. Iran était son allié, ainsi que Sadiq. Pourtant, il ne ressentait pas avec eux l’intensité que décrivait Feliciano lorsqu’il lui parlait de ses alliés, ni même Francis. D’ailleurs, ni l’un ni l’autre n’employait ce mot. Ils disaient « amis ». Il lui semblait qu’Alfred disait aussi ce mot et l’autre. Ami et allié (Arthur étant plus discret vis-à-vis de ses relations, Netsah ne le comptait pas vraiment. Trop complexe parfois.)

Avec un allié de plus, Netsah pouvait gagner de l’influence, avoir une bonne image (hein ? Changer sa politique intérieur ? Heu… il verrait avec ses patrons. Si ses derniers n’avaient pas encore de soudaine crise de on ne savait quoi comme la dernière fois que Netsah avait seulement fait une petite remarque sur le sujet) profiter des relations commerciales, culturelles et économiques, ainsi que de la stratégie militaire s’il en avait l’opportunité.

Avec un ami, il pouvait faire d’autres choses. Plus futiles, plus vaines, sans doute inutiles et égoïstes. Ce que faisaient les Nations entre elles lorsque, las des conflits et des tensions, elles prenaient le temps de vivre comme ce qu’elles n’étaient et ne seront jamais : des Hommes. Certaines sortaient, mangeaient, riaient, d’autres lisaient, discutaient, parlaient de tout et de rien, sauf des conflits. D’autres enfin, se contentaient de serrer leurs proches, leurs amis dans les bras. Comme une certaine Nation le faisait parfois, trop souvent au goût de certains.

L’adolescent fut presque surpris lorsque le tunisien lui fit signe. L’israélien sursauta, puis se rabroua intérieurement, espérant n’avoir pas encore fait une bêtise ou une maladresse diplomatique. Cependant, il ressentit bientôt du soulagement : Tunisie voulait seulement l’emmener dans une autre pièce. Doucement, l’israélien s’assit à la place que lui désignait son homologue, tout en évitant de ne pas froncer les sourcils. Il n’était pas fondamentalement douillé, mais le sofa n’avait rien de confortable. L’adolescent regarda ensuite les deux tasses de thé fumantes, avant d’en saisir doucement une, résistant à l’envie de prendre les gâteaux d’accompagnements et de les manger entièrement sous les yeux (sans doute) scandalisés (à raison) de son vis-à-vis.

A la place, l’israélien se tint droit, tellement qu’il sentait venir quelques tensions le long de son dos et, après avoir remercié le Tunisien, but quelques gouttes de thé. Juste assez pour ne pas faire dire à son hôte que son attention lui déplaisait (au contraire, Netsah aimait bien cette boisson) et suffisamment peu pour ne pas paraître trop gourmand, voire glouton. Ensuite, il reposa lentement la tasse, lentement, comme si elle était du verre. Le thé servi était encore brûlant, mais délicieux, bon, il se sentait plus calme maintenant (note : acheter ce thé… après avoir vérifié si le Tunisien n’avait pas mis de produits plus ou moins douteux dans sa tasse, on ne savait jamais.)

« Même si le thé et les accompagnements sont servis, allons tout de suite au vif du sujet. Vous devez savoir ce qui aura lieu demain. »

L’israélien déglutit. Etait-ce à cause de cette sueur froide, de cette boule dans la gorge à chaque fois qu’on évoquait devant lui ses petits… disons, ennuis avec … certaines personnes ? La voix froide du Tunisien ? Ou alors, la peur d’avoir de nouveau fait une maladresse devant un Etat plus âgé que lui, et arabe qui plus est ?

Respirer, reprendre son calme. Se souvenir que les débordements de colère ou les crises de paniques ne menaient à rien.

Netsah inspira, respira, prenant son souffle, essayant de se concentrer. Cependant, il était de plus en plus gêné.

« Oui monsieur. Vous allez prononcer un discours à Jéricho, ou plutôt votre patron va le faire. Dans ce discours, vous me reconnaitrez, sans doute avec un but précis en tête et bien déterminé à le mener à bien. Bien entendu, de ce fait, vous deviendrez l’un de mes alliés et vous ferait sans doute des ennemis, ou dans une moindre mesure, des gens vous en voudront. »

Une pause, un répit, avant de replonger dans ce petit monologue, ce petit cours de politique, d’alliance que Netsah commençait à connaitre par cœur.

« Entant qu’alliés, nous devrons nous entraider, avoir des échanges et bien entendu, agir en faveur de l’autre si besoin est. »

L’israélien marqua une pause, les paroles se firent hésitantes, les yeux bleus troubles. Au final que différenciaient un allié et un ami ? L’intérêt. Un ami pouvait vous aider en ayant des intérêts en jeu, mais ce n’était pas nécessaire, pas obligatoire. Il y avait d’autres sentiments, d’autres lois, d’autres envies. Celle d’aider l’autre, de le sauver, de ne pas le perdre.

Avec un allié, ce n’était pas pareil, pas pareil. Manipulation, rationalité, pragmatisme et intérêt. Voila le lien que formaient deux alliés. Des ennemis pouvaient s’alliés. Oui, Ivan et Alfred ne l’avaient ils pas prouver à cette crise du canal de Suez ? Là où leurs influences combinées avaient à elles seules réussies à stopper le conflit ?

« J’aimerais savoir pourquoi vous faites ça, Pourquoi ? Vous allez vous mettre des gens à dos, alors, pourquoi ? »

Il aurait voulu mieux formulé sa question, y mettre moins de sentiments, plus de fermeté. Son « pourquoi » ressemblait à un autre, lointain, très lointain. Celui qu’en colère, il avait craché à un homme à terre. Celui qu’il se murmurait parfois, souvent depuis que certaines relations se faisaient moins tendus, plus ouvertes. Tandis que d’autres se fermaient, inexorablement. Iran lui semblait de moins en moins proche. Présage de leur rupture de 1975 ? Netsah ne le saurait jamais.

Ami. Allié. Neutre.

Ennemi.

Alors, que sera le Tunisien pour lui ?

Allié. Neutre.

Ami ?

Quelques mots, quelques détails, signes sur papiers, paroles au vent. Papiers, rapports signés, pactes. Et jamais autre chose. Voila ce qu’était un allié.

Etait-ce cela sa future relation avec Alexander ?
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MessageSujet: Re: Le discours de Jéricho [3 mars 1965]   Le discours de Jéricho [3 mars 1965] Icon_minitimeVen 9 Avr - 11:39

Lorsqu’il prenait la peine d’y réfléchir longuement, il n’avait guère envie qu’on le lie aux souks. Ca semble coloré, bruyant, joyeux, ça sent le jasmin et le cuir mais, au fond, ce n’est rien de plus qu’une façon comme une autre de profiter de la naïveté de certains. Il suffit d’un zeste d’exotisme, d’une poignée de teintes maghrébines, de quelques paroles mielleuses dans un accent trivial et grossier pour piéger un passant étranger. C’était facile et plus le temps passait et plus les lointains souvenirs d’un commerce florissant et honnête s’éloignaient. C’était à la fois triste et juste puisque cela s’apparentait parfaitement à sa propre évolution, à sa propre mascarade. A cette raison qui faisait qu’il était là, assis sur ce canapé, les yeux fixés sur un thé vert qui sentait le jasmin et l’eau de rose. Pensait-il y trouver une quelconque réponse qui expliquerait son comportement ?

Il n’avait jamais vu Netsah. C’était la première fois qu’il le rencontrait. Il ne lui avait jamais prêté grande attention avant d’avoir gagné son indépendance en renvoyant chez lui un Francis décidément trop occidental pour lui. Et au vu de ce que devait subir Palestine, il s’était toujours imaginé un Israël aussi imposant et collant que Sadiq. Autant vous dire que la surprise née en le voyant agitait encore son esprit. Petit, fluet, il avait plutôt des airs de gamin capricieux. Peut-être était-il réellement ainsi, laissant ses désirs dicter ses gestes, ses décisions. Son existence même ressemblait à un caprice d’enfant. Etait-ce pour cette raison que les autres Nations le reniaient aussi facilement ? Qu’il devait supporter les rejets quotidiens des arables ? Aucun ne le considérait comme un Pays réel, ne voyant en lui qu’un voleur prétentieux qui osait s’approprier la Terre d’autrui.

Et un sentiment gênant prenait place en lui. Quelque chose d’infiniment minuscule mais dont la simple présence était dérangeante. Il avait pitié. Tout comme il avait compati à la situation de Palestine. Il savait que chacun d’eux avait ses raisons pour vouloir cette terre et parce qu’il comprenait celles de son lointain frère de religion, il comprenait aussi celle de Netsah, bien qu’il soit incapable d’approuver les méthodes qu’il utilisait pour planter son drapeau et désigner un terrain comme sien.

Pourtant, en le voyant là, un peu gêné et sans doute mal assis, essayant de maintenir une conversation difficile, Alexander n’arrivait pas à l’imaginer vider une à une les dernières ressources palestiniennes. Mais c’était la Guerre. Tout comme le sang avait coulé pour qu’il puisse se défaire de ses chaînes, il doit en être de même pour que l’un d’eux gagne cette Terre Promise par un Dieu qui ne semblait plus se préoccuper de leur sort.

« Oui monsieur. Vous allez prononcer un discours à Jéricho, ou plutôt votre patron va le faire. Dans ce discours, vous me reconnaitrez, sans doute avec un but précis en tête et bien déterminé à le mener à bien. Bien entendu, de ce fait, vous deviendrez l’un de mes alliés et vous ferait sans doute des ennemis, ou dans une moindre mesure, des gens vous en voudront. »

Un but bien précis ? Oui, ce n’était pas faux. S’il avait écrit ce discours qui allait sonner faux et même un peu creux face à l’obstination haineuse de ses voisins musulmans, c’était bien parce qu’il avait un objectif devant lui. Que ce soit Netsah ou un autre… Il fallait que lui-même avance, qu’il se débarrasse de cette image de pays servant éternellement d’hôte à bien d’autres Nations ou Empires, sans jamais prendre le dessus. Il fallait changer même si, comme l’Israélien l’avait dit, bien des gens allaient lui en vouloir. Il imaginait déjà le groupe islamiste le fusiller du regard à sa prochaine visite. On lui ferait une énième leçon de religion sur le Peuple Juif et l’obligation morale d’aider Palestine en rejetant Israël jusqu’à sa moindre particule.

Mais n’était-ce pas douloureux d’être constamment bafoué, jalousé ? Tout juste parce qu’il avait l’unité que les Islamistes n’avaient pas et n’étaient pas prêts de construire.

« Entant qu’alliés, nous devrons nous entraider, avoir des échanges et bien entendu, agir en faveur de l’autre si besoin est. »

Alliés… Quel triste mot. Une phrase suffisait pour présenter leur « relation ». Une sorte de coup pour coup, un échange mutuel qui n’aurait pas lieu si les deux camps n’offraient pas quelque chose à l’autre. Des obligations et rien de bien profond. Il suffirait d’une mésentente pour tout briser, pour déchirer un traité et effacer ce mot. Alliés. Il n’avait jamais cru en ça, ni même aux « Amis » comme Feliciano aimait appeler Ludwig et Kiku. Quelque soit la situation, il voulait s’en sortir seuls, par ses propres moyens, petit à petit. Etape par étape. Et c’était bien avec cet esprit-là qu’il avait réussi à être libre, enfin ! Il s’était rabaissé, avait signé des traités. Se contenter d’insulter un ennemi et de se lamenter sur son sort ne servait à rien. Si Palestine voulait sa liberté, il fallait qu’il aille la chercher lui-même, qu’il se batte, qu’il gagne du terrain lentement.

C’était bien parce que Palestine avait refusé de faire des compromis, de suivre la même « tactique »* qu’avait utilisée Alexander pour se défaire de la dépendance qu’il se sentait obligé à prononcer ce discours, à mettre son nom à côté de celui d’Israël. Si lui avait continué sur le même chemin que suivait en ce moment-même la Palestine, il savait parfaitement qu’il serait encore à nourrir Francis et à lui servir de domestique pour bien des années encore.*

« J’aimerais savoir pourquoi vous faites ça, Pourquoi ? Vous allez vous mettre des gens à dos, alors, pourquoi ? »


Il eut l’air étonné. Très, même. Certes, il ne s’attendait pas à une réaction joyeuse ni même à une froideur de glace mais ce simple « pourquoi » avait de quoi le surprendre. Peut-être bien que ses raisons étaient moins visibles qu’il ne le pensait.

« Eh bien… C’est une longue histoire… »

Si longue qu’il avait l’impression qu’elle le poursuivrait encore longtemps, jusqu’à ce qu’il reconstruise son pays bout par bout, comme il avait fait pour se libérer.

« Vous devez savoir qu’avec les dépenses du Bey, j’étais on ne peut plus endetté. Francis et Feliciano se sont un peu disputés à mon sujet mais, comme vous le devinez, ce fut bien Francis qui vint chez moi et profita de mes faiblesses. Et je me suis retrouvé dans la liste des pays « colonisés ». Le reste ressemble à ce que vit Palestine avec la Guerre contre vous. Il s’obstine à désirer le souvenir lointain d’une terre qui lui appartenait entièrement. Si j’en avais fait de même, je ne serais pas là, à boire ce thé en votre compagnie. Francis serait encore en train de se balader dans mes palais en embêtant les demoiselles… »

Cette simple pensée, le ramenant quelques années en arrière, le fit légèrement frissonner d’horreur. L’image d’un Francis gambadant joyeusement chez lui était encore un cauchemar qu’il ne voulait absolument plus revivre. Et de ce point-là, il comprenait parfaitement la Palestine. Avant d’être un discours pour l’Alliance et le traité de Paix, il voulait que ces mots poussent le palestinien à changer de politique, à voir Netsah sous un autre angle que celui d’un gamin qui avait profité des blessures de la Seconde Guerre Mondiale et de la culpabilité occidentale pour être là et se dire maitre des lieux.

« Avec ce discours, je veux surtout, plus qu’être votre allié, qu’une Paix soit enfin créée au lieu de tout arranger avec des armes et des moyens que vous possédez mais que Palestine est loin d’avoir réellement. »

Il avait beau avoir pris cette voix cérémonieuse et sûre qu’il avait utilisée pour motiver son peuple lors des combats pour l’Indépendance, il ne savait pas où allait mener ce discours, cette alliance, cette guerre.
Où toute cette haine allait mener ?

Spoiler:
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Netsah / Israël


Netsah / Israël

Le sale gosse de la Synagogue


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RPs en Cours : 1.la malédiction du golem. Autriche
2.Le discours de Jéricho. Tunisie
3.Petit air de paradis... Pologne
4.Le carnaval de Venise. Italie.
5.1er Avril 2010 : Asile de corruption. Liechtenstein
6.La ballerine et le musicien. Autriche et Ukraine
7. Et d'autres...

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Le discours de Jéricho [3 mars 1965] Vide
MessageSujet: Re: Le discours de Jéricho [3 mars 1965]   Le discours de Jéricho [3 mars 1965] Icon_minitimeSam 12 Juin - 10:15

« Eh bien… C’est une longue histoire… »

« J’aime les longues histoires. » Répondit-il immédiatement, essayant d’adopter un visage calme et serein, alors qu’il sentait le malaise le gagner.

Ce n’était plus seulement une question de confort matériel, mais la certitude d’un nom allait apparaitre sitôt la dite histoire finie. D’un geste lent, il reprit la tasse de thé, effleurant du bout des lèvres, le liquide qui avait un si bon goût, se demandant s’il serait possible d’en importer chez lui. Les thés de là-bas n’étaient pas aussi bons que ceux d’ici. C’était une certitude. Ce fut ainsi qu’il écouta son vis-à-vis, les yeux braqués sur lui, des reflets sombres dans les prunelles bleues. Et quelque chose de lourd commençant à battre dans son cœur, comme un mauvais pressentiment.

« Vous devez savoir qu’avec les dépenses du Bey, j’étais on ne peut plus endetté. Francis et Feliciano se sont un peu disputés à mon sujet mais, comme vous le devinez, ce fut bien Francis qui vint chez moi et profita de mes faiblesses. Et je me suis retrouvé dans la liste des pays « colonisés ». Le reste ressemble à ce que vit Palestine avec la Guerre contre vous. Il s’obstine à désirer le souvenir lointain d’une terre qui lui appartenait entièrement. Si j’en avais fait de même, je ne serais pas là, à boire ce thé en votre compagnie. Francis serait encore en train de se balader dans mes palais en embêtant les demoiselles… »

Un souvenir le gagna. Celui d’un homme blond guettant les demoiselles, les invitant une par une à dîner, comme un chasseur avide de proie, un Valmont plus raffiné et sentimental, plus agaçant encore certainement. Un vague air compatissant vient orner son visage encore jeune malgré les siècles passés. Chassant par cela la vague tension, le froncement de sourcils à l’évocation de Palestine. Oui, il fallait se concentrer sur Francis, sur sa débauche, son égoïsme, ses défauts, les calomnies qui n’étaient que vérités. Tout, plutôt que de penser à l’autre, l’adolescent du même âge que lui, né sous la même mauvaise étoile. La même souffrance, la même haine dans le regard brun, dans le regard bleu. L’un faisant souffrir l’autre, l’autre se vengeant de l’un. La violence amenait toujours la violence.

Pourtant, un jour, il faudra que l’adolescent aux yeux bleus se regarde enfin dans un miroir, qu’il regarde ce qu’il faisait au lieu de regarder ce que d’autres avaient faits ou font toujours.

Un jour, il faudra qu’il demande pardon.

« Jamais, je ne le dirais » pensait toujours Israël « jamais ».

« Un jour » songeait Netsah, « un jour, j’irais le voir, et je lui demanderais pardon. »

Cependant, un jour cela devenait long tandis que les conflits s’accroissaient, que les cris se répercutaient de par et d’autres des deux camps liés à une seule terre, une seule ville que chacun voulait sans partage. Deux peuples, deux noms. Israël, Palestine. Une seule terre, une seule ville. La Terre Sainte, Jérusalem. La raison de la haine ? Le fait que personne ne voulait partager, que personne ne voulait écouter l’autre. Et que Dieu semblait les avoir abandonné, lui qui leur avais jadis promis cette terre. Mais à qui ? Pourquoi ? Cela, c’était aussi une longue histoire.

« Avec ce discours, je veux surtout, plus qu’être votre allié, qu’une Paix soit enfin créée au lieu de tout arranger avec des armes et des moyens que vous possédez mais que Palestine est loin d’avoir réellement. »

Une légère tension sembla poindre dans la voix de son vis-à-vis, petite hésitation, presque recul de l’homme. Pour la première fois depuis le début de l’entrevue, Netsah se prit le luxe de le détailler plus en profondeur. Excellant moyen de feindre une concentration, la recherche de mots ou encore… une sorte de méditation amère ? Alors que justement, il faisait tout pour ne pas le faire, pour ne pas non plus penser à l’autre, l’adolescent aux yeux bruns et à la volonté de fer, l’ancienne colonie britannique et son rival, son ennemi (et non sa victime, comme parfois certains le disaient, le pensaient).

Cet adolescent, cet autre sur lequel Netsah avait tiré une fois, par bravade, par orgueil.

(Tu as vu ? C’est moi le gagnant, cette terre est à moi, rien qu’à moi.)
(Tu… tu mens, cette terre… j’y suis né, j’y habite, alors…)

Va-t-en…Pars loin d’ici, que je ne te revoie plus sur cette terre qui est mienne…

(Hé, arrête de dire des conneries, cette terre n’est pas à toi, pas à toi. Cette terre, j’y suis né moi aussi et je ne t’ai jamais vu, jamais vu ici.)
(Oui, tu y habitais, il y a deux milles ans, mais tu es parti. Et moi, je suis né.)
(Je ne suis pas parti de mon plein gré !)

Ce souvenir maintenant vague, cette mère adorée cette étreinte qui le dépose devant une maison qu’il ne connaissait pas, dans un pays encore inconnu pour lui. Cette mère qui partait, sans rien dire, sinon au revoir, sinon adieu. Et cette sensation perturbante et horrible d’être abandonné. Cette mère qu’il ne verra plus, la blessure au cœur, ce truc qui battait trop fort à ce moment-là…

Il aurait pu lui dire, mais il ne l’avait pas fait. Le savoir toujours un peu triste, toujours un peu souffrant aurait sans doute trop rempli de joie l’autre. Après tout, les rivaux n’étaient-ils pas aussi, dans un certain sens, les pires ennemis ? Et celui-là, jamais Netsah pourrait le considérer comme ami. Bien entendu, c’était parfaitement réciproque. Son regard bleu se perdit un instant, pour mieux se retrouver devant ce que Netsah tenait dans une main, l’arme à feu qu’il avait appris à manier récemment.

(Hé, lâche ton arme, cela peux être dangereux, il y a des gosses par ici, mes gosses. Hé, Tu m’écoutes ? Lâche-ton arme, arrête de faire l’abruti ! Lâche-le…)
(Retire ce que tu viens de dire.)
(Je ne vois pas pourquoi ! Regarde-nous, nous avons le même âge, la même taille… pourquoi devrais-je m’incliner devant toi et partir ? Au nom d’un syndrome du martyr ? Laisse-moi rire, garde ça pour les occidentaux qui doivent supporter tes pleurnicheries, tu sais, ceux qui t’ont vraiment fais mal hum ?)
(…)

Même âge, même taille, même lieu de naissance, d’habitat, même cheveux noirs sous un soleil de plomb. Même désir, besoin de protéger un peuple ayant assez souffert comme ça,
Douleur dans les yeux clairs, dans les yeux sombres, haine dans les gestes, les paroles, envie de se battre, fusse avec les poings, avec les pierres. Cris dans la nuit, cauchemars du passé trop proche, toujours trop proche. Presque jumeaux, presque semblables, autres alors qu’ils auraient pu être… qu’ils auraient du être…

‘ Je te hais.’ Mots soufflés en arabe, main sur la blessure, main se teintant de rouge. Dégoût dans un regard noir, haine grandissante, grandissante. Et ce quelque chose en plus, ce quelque chose qui rappelait à Netsah…

L’enfant qui pleure, l’enfant qui souffre. Une main se tendant dans le noir à la recherche d’une lumière certaine, de quelqu’un qui le sortirait enfin de l’obscurité. Sentiment d’abandon dans les yeux bleus, peine indicible. Comment parler d’une peine de plusieurs siècles ? L’enfant qui court, qui tombe. Sous les coups, les injures, les menaces, les crachats.

Pourtant, l’israélien ne tendit pas la main, alors qu’il sentait son cœur se fendre, lui hurlant de faire quelque chose, oui quelque chose. Ce que les autres n’avaient pas fait, ou souvent trop tard, si peu longtemps. Netsah voulait le faire, mais Israël ne le pouvait pas.

Parce qu’il était trop lâche pour s’opposer à ses patrons alors qu’il sentait la culpabilité encore en lui pour n’avoir rien fait pour empêcher… pour arrêter…. Ludw…

Parce qu’il était trop lâche pour reconnaitre ses fautes, pour reconnaitre dans son visage la même haine tentée d’indifférence de ses anciens bourreaux.

Oui, Netsah n’était qu’un lâche, trop peureux, trop immature, trop tout. Et pas assez pour tendre la main à son ennemi d’aujourd’hui. Et d’hier aussi, puisque…une rumeur disait que…
Non, c’était plus qu’une rumeur. Le mufti de Jérusalem rencontrant, sympathisant, avec le patron de l’ancienne Allemagne, voulant aussi… mettre en place…même régime à l’égard des siens. Les détruire comme le voulait l’Allemagne de ce temps là. Cela, Palestine n’en parlait pas, mais lorsqu’il voyait ses yeux, Netsah savait que c’était vrai.

Ou comme tous les lâches bourreaux, il cherchait une excuse pour justifier ses actes, sa violence, sa haine ?

Celle qu’Israël entretenait.

Celle qui tuait Netsah à petit feu au profit d’un autre soi, plus dur, cruel. Plus haineux.

‘Moi aussi.’

Plus haïssable.

Oui, Netsah le savait, il savait comment et pourquoi Palestine le haïssait. Les autres le lui crachaient à la figure tant qu’ils le pouvaient, tant que Palestine le pourrait, il le lui dira. Alors, dans ce cas, pourquoi l’adolescent prendrait-il la peine d’y réfléchir si tous l’avaient déjà fait à sa place ? Si tous le lui disaient, il pourrait leur répondre. S’il se le demandait, s’il demandait les raisons, il serait obligé de se regarder vraiment dans un miroir. Et il avait peur de reconnaitre dans son visage, les traits de ses anciens bourreaux.

Israël regarda l’adolescent qui saignait (regarder son visage ? Impossible) ses deux yeux bleus n’exprimant rien. Ni trouble, remords ou regret. Et Netsah partit, laissant tomber par pur hasard…

« Je comprends ce que vous me dites, même si je ne suis pas d’accord. »

Ses mots le firent eux-mêmes sortir de sa torpeur. Comme si une autre personne que lui les avaient prononcés. Peut-être était-ce pour cela qu’il ne reprit qu’après une courte pause, inconsciemment persuadé que l’autre allait encore parler en son nom.

« Palestine et moi… c’est pas vraiment possible qu’on puisse s’entendre. Je l’ai vu, deux ou trois fois… euh, oui, je sais, ce n’est pas beaucoup. Mais à chaque fois, c’est pareil, on s’insulte, on se traite de tous les noms possibles et inimaginables, on se bat. Même qu’une fois, j’ai tiré sur lui…»

Voix songeuse, presque coupable. Il se laissait aller, oubliant le visage tunisien, le regard palestinien. Parlant comme il aurait aimé à ses patrons de cette affaire, de cette haine violente qui le faisait grandir, qui le rongeait aussi. Sentiment malsaine pour situation insupportable. Puis, il se reprit, conscient d’en avoir trop dit, ou pas assez. Déjà la peau bronzée de son interlocuteur devenait livide malgré une figure impassible. Oui, il avait mal compris, il devait avoir peur maintenant. Peur que Netsah soit le colonisateur fou et sanguinaire que ses camarades avaient dû lui décrire.

« Euh… je n’ai pas fait exprès, je vous le jure. On était près d’un… village je crois. Je voulais lui parler, mais j’avais apporté une arme, au cas où. Après, on a commencé à… se disputer. Il m’a cherché, je l’ai cherché, il m’a trouvé… et je me suis rappelé que j’avais une arme. Alors, je l’ai visé, mais pour lui faire peur, juste pour lui faire peur. Alors… »

Il lui avait dit, il lui avait dit qu’il y avait des enfants pas très loin. Un enfant, un garçon une fille, il ne savait plus. Courant vers Palestine, hurlant des injures, faisant sursauter Netsah. Des siècles auparavant, des années auparavant, cela n’aurait pas été grave, peut-être même que cela aurait pu calmer Netsah, lui faire prendre conscience de ses paroles. Cependant, il avait une arme, le doigt sur la détente. Doigt qui appuya dessus et son rival qui s’interposa à temps. Juste à temps pour que la balle aille se graver sur l’épaule de Palestine, laissant une marque qui ne partira jamais.

‘Je te hais.’

« … Quelque chose m’a fait sursauter et le coup est parti tout seul. C’était un accident, j’vous le jure. Je ne voulais pas… je ne voulais pas le blesser, ni blesser les autres. Je voulais seulement qu’il comprenne que cette terre aussi est à moi, ou plutôt, je n’ai pas d’autre endroit où aller. Vous comprenez ça ? Je n’ai pas d’autres endroits où aller, à chaque fois soit on finit par se lasser, soit on me déloge, soit je dois partir. J’en ai marre à la fin, quoi. On dirait que personne ne veut vraiment de moi, à part quand cela les arrange bien. Et je ne parle même pas de ce que… les patrons des autres ont parfois comme idée. »

Un instant, une pause. Netsah cru lire quand les yeux bruns quelque chose… pitié, scepticisme, sympathie, dédain, autre ? Il ne savait pas. En tout cas, le tunisien semblait prêt à vraiment l’écouter, au contraire de ses camarades coreligionnaires. Alors, Netsah reprit.

« Avant, je ne haïssait pas l’Allemagne. Je veux dire, avant que l’autre nain psychopathe arrive. Je peux même dire que Ludwig me semblait plus supportable qu’un Francis ou qu’un Ivan. Cependant, comme vous le savez… enfin, voila. Après la guerre, j’étais perdu, ne voyant plus d’endroit où aller, je me disais « et si… et si tous oubliaient, et si cela recommençait encore ? ». J’étais terrifié rien d’y penser. Il m’a fallu… du temps avant de pouvoir faire un peu confiance aux autres. Pour pouvoir, par exemple, dissocier Monsieur Ludwig de son patron, de son armée, de ses actions, de mes cauchemars. Malgré cela, je suis persuadé que mon peuple doit avoir… une possibilité d’immigrer, de fuir les dangers qui les menacent, les coups, les insultes, les cris, les pleurs. Je ne veux plus que cela recommence, je ne veux plus que mon peuple souffre. Vous comprenez ça au moins ? Je veux avant tout protéger mon peuple, bon sang, y-a-il quelque chose de mal à ça ? »

Quelque chose qui tremblait, vague fantôme issue d’un passé qui faisait peur. Présence invisible, mais blessures lancinantes, comme reçues la veille. Son cœur qui se rouvrait tandis que ses mots glissaient de sa bouche, de ses lèvres.

« Je sais que c’est égoïste de penser ainsi. Je sais que Palestine doit... non, que Palestine souffre, même si cet imbécile me dira certainement le contraire, parce qu’il croit que j’adore savoir que c’est le cas. Ce qui n’est pas vrai, je le précise au cas où. Seulement, j’essaie… lorsque j’essaie de lui parler, cela dérape très vite. On est impulsif lui et moi, on réagit trop vite. Et lorsque j’essaie avec mes patrons, ils ont soudainement des indigestions alimentaires absolument horribles. Ensuite, je les aide… et après, c’est comme s’ils avaient oubliés de quoi on parlait, alors, j’abandonne. »

Ceci, mes amis, s’appelle « reste de naïveté mal dissimulée ». Non, Netsah n’en était pas conscient. Ses patrons, eux si. Tous n’en usaient pas, mais certains n’avaient aucun mal à en profiter pour éviter les situations gênantes avec leur petit protégé.

« Il y a aussi le fait que… je n’ai plus le droit à l’erreur après que ce j’ai laissé faire. Mon peuple avait besoin de moi durant la guerre et je n’ai rien pu faire pour l’aider, absolument rien. Si… Si l’A…l’autre avait gagné… je serais certainement mort à l’heure qu’il est, ainsi que les miens. Je sais ce que je dois à mon peuple : un refuge, un endroit où il sera en sécurité. Et je veux le lui donner. Alors, pourquoi… pourquoi cet idiot de Palestine n’arrive pas à se le mettre dans le crâne une bonne fois pour toute ? Pourquoi n’arrive il pas à comprendre, pourquoi il fait comme si c’est un simple caprice de ma part et non une nécessité ? Pourquoi il m’a fait la guerre après le partage de 1947 alors que, bon sang, j’étais d’accord ? Pourquoi les autres pays arabes me détestent ? On s’entendait bien avant pourtant. Enfin, relativement bien, mais c’était mieux que Monsieur l’inquisiteur Fabrizio qui adorait voir brûler… bon, passons, je dois vous ennuyer avec mes pleurnicheries, non ? »

Un instant de silence, il toucha un peu la tasse, avant de reprendre.

« Je suis désolé, vous devez avoir une piètre image de moi. Cependant, je… je dois vous dire que… en fait, je ne déteste pas Palestine autant que je le devrais. En fait, je ne déteste pas les pays arabes autant que je devrais. Ils me gonflent, j’ai envie de leur exploser la tronche contre le mur, de leur montrer que moi aussi, je sais me battre, que cette terre est aussi mienne que la leur. Sinon plus. Que jamais plus, je ne serais l’enfant du ghetto qui joue tranquillement alors que les autres goyim ne parlent que de la façon dont ils font le découper en rondelle. Je ne serais plus celui qui sert de bouc-émissaire lorsque tout va mal. Le faible qui attend son bourreau dans la terreur alors qu’il pourrait faire comme tout le monde. Plus seulement se battre, mais gagner. Gagner contre le bourreau, gagner contre son mauvais sort, pour pouvoir enfin être reconnu, enfin être libre. Et ça, c’est mal, bordel ?! C’est mal de vouloir simplement ça ?! De vouloir être libre, être heureux, c’est mal ?! De vouloir protéger ceux qui restent, ceux à qui on a une dette, c’est mal, c’est être un colonisateur ça ?!»

Excès de colère, Excès de rage. Il se frappa, pour se remettre les esprits en place. Tenant son visage à une main, dissimulant ces ombres sous les yeux bleutés qui n’étaient pas des larmes… non, ce n’étaient pas des larmes. Les larmes étaient pour les faibles, pour les victimes. Et Netsah lui, ne voulait plus en être une, plus jamais. L’israélien voulait devenir fort, oui, devenir fort et protéger ceux qui comptaient le plus pour lui. Peut importait la douleur à endurer, pensait Netsah, l’enfant courant dans Venise. Peut importait l’avis et la douleur des autres, songeait Israël. Un instant passa avant que l’enfant finisse enfin de parler.

« Je… ne sais pas ce que vous avez réellement en tête, je ne sais pas si vous êtes sincère ou non. Je ne sais même pas si vous me détester ou pourquoi je vous dis ça. Ce que je sais, c’est que… cela sera dur d’avoir la paix avec Palestine, très dur même… » (Mine pensive, mine sombre, puis, les mots qui reviennent, ceux qu’il n’arrivait d’ordinaire pas à prononcer) « Pourtant, je veux essayer. Je ne dis pas que la paix viendra bientôt, pas dans dix, vingt, quarante, voire, dans soixante ans. Parce que cela sera vous mentir de dire cela et je ne veux pas vous mentir. Mais je veux essayer. Si… si on arrive à s’entendre… ce serais bien. Cependant, je suis certain de vouloir la paix, mais je ne suis pas certain d’être capable de la faire. Et je crois que pour Palestine, c’est pareil. C’est une vraie tête de mule, celui-là. Impossible de le faire changer d’avis ou de terre. Pourtant, cela serait bien… si on pouvait aller à Jérusalem ensemble sans se disputer, sans se battre pour savoir si ce sera la capitale de l’un ou de l’autre. Oui, ce serait bien qu’on puisse être en paix. »

Mots prononcés un peu vite, comme si le temps pressait, son arabe devenait un peu confus, quelques mots d’hébreu venaient s’incruster ici et là, sans que cela devienne incompréhensible. Comme une bannière colorée, un assortiment de couleur. Quelque chose de nouveau, quelque chose de beau. Loin du désespoir ambiant, des cris de la guerre. Alors, oui, Netsah était un lâche, oui, il accusait les autres, demandant des réparations sans pour autant regarder ses propres méfaits, ses propres crimes, défaites morales. Cependant, c’était un lâche qui ne manquait ni de cœur, ni d’espoir. Et encore moins de rêve. Oui, encore moins de rêve.

« La paix sera certainement longue, très longue à venir mais… j’aimerais bien l’avoir. Je suis… peut être un idiot de gamin opportuniste et trop optimiste pour mon bien, mais je suis certain qu’elle viendra un jour. Après tout, si je… si j’essaie de faire la paix avec l’Allemagne, pourquoi ne ferais-je pas la paix un jour avec Palestine. Faire la guerre pendant des années, des siècles, toujours, ce n’est pas possible, vous ne croyez pas ? »

Si quelqu’un était passé par là, un proche de l’italien, de Feliciano, peut-être aurait-il reconnu l’éclat optimiste et gamin dans le regard de l’israélien. Peut-être reconnaitra-il dans son sourire un des sourires des latins, voire de Pologne. Cet autre frère que Netsah n’avait plus vu depuis longtemps déjà et qui lui manquait. Ou, l’obstination d’Alfred aussi grande que son orgueil. Et tous savaient combien l’américain était fier et patriote, presque à l’extrême.

« Chez moi, on a coutume de dire « l’an prochain à Jérusalem », eh ben, je vous le promets… croyez le ou pas… mais je vous promets qu’un jour, Palestine et moi… nous irons à Jérusalem ensemble. Non pas en ennemis, ni en rivaux, mais en alliés… et pourquoi pas… ? »

Oui, pourquoi pas… a…mis… ce qu’ils auraient dû être depuis le début.

Y croyait-il à ses mots remplis d’un espoir et d’un optimiste presque ironiques lorsque plus tard, on regarderait le conflit d’un air presque las. Lorsqu’on verrait que les négociations n’avanceront pas, que personne ne serait d’accord, que les extrémistes de chaque camp se déchireront avec une violence inouïe. Lorsque l’armée de l’un ira attaquer les civils de l’autre. Y croira, à ce rêve, cette presque chimère ?

Bien entendu, il y croyait, corps et âme. Et ce, malgré les cris intérieurs d’un Israël beaucoup trop haineux.

Y croira-t-il toujours ?

La réponse, aussi absurde et terrible soit elle, était et sera toujours oui.

« Je sais que pour certains, je ne suis qu’un sale mioche, un monstre d’égoïsme. Je sais que la paix ne sera pas demain, que beaucoup de gens vont souffrir, que si elle arrive un jour, les blessures ne s’effaceront pas pour autant. Pourtant, je sais que je veux la paix, que Palestine aussi doit la vouloir, même s’il se trancherait la gorge plutôt qu’être du même avis que moi. Et je sais aussi, qu’un jour nous l’aurons. Alors, si vous voulez nous aider, si vous voulez faire changer d’avis Palestine sur son compte et moi sur le sien, alors, je vous en remercie. C’est… idiot je sais, mais c’est tout ce que je puis dire.»

Jamais il n’avait parlé autant de ce sujet qui d’ordinaire le mettait affreusement mal-à-l’aise. Jamais. Encore moins devant un pays arabe, encore moins devant un pays musulman. Il ne parlait pas vraiment avec Iran, s’échangeant des politesses frisant le ridicule, ou parlant un peu d’histoire de temps à autre. Tant à Sadiq… ce n’était pas un sujet qu’il voulait aborder devant lui. Pas de raison particulière à cela, quoique…

« Sinon… j’ai une question… heu, comment dire… »

Vague hésitation peur de se montrer ridicule, ombre dans les yeux bleus qui partie immédiatement. Il ne pouvait pas reculer, pas après avoir dit à Alexander tout ce qu’il avait sur le cœur depuis des années.

« … Comment dis on « forgive-me » en arabe ? Vous ne pourriez pas… me l’apprendre ? Je sais que mon arabe est un peu… hum… maladroit.»

Il avait hésité à dire ce qu’il voulait apprendre en français, sachant qu’Alexander devait connaitre cette langue, mais il avait abandonné. Ne voulant pas rappeler au tunisien un ancien bourreau. Non, hors de question de lui rappeler de mauvais souvenirs alors qu’il pourrait l’aider. Qu’il le voulait.

« … C’est pour lorsqu’on devra… parler Palestine et moi… j’aimerais…lui éviter d’entendre ces mots en hébreu. Il ne doit plus beaucoup aimé cette langue après tout. »

Tout ce que je lui ai fait et lui ferais encore…

Oui, le palestinien ne devait plus beaucoup aimer cette langue, vraiment pas.

« …Cela ne vous… dérange pas au moins ? » Demanda Netsah, les joues soudainement rouges, les mains bougeant sous le coup de la gêne.

Bon sang, mais pourquoi avait-il dit toutes ces choses à… à ce… cet hypocrite même pas fichu de sourire correctement, hein ? Pourquoi ? D’ailleurs, pourquoi l’autre le croirait hum ? C’était impossible, impossible. Quoique…

« Vous me croyez au moins ? »

Paroles avec une inquiétude feinte. Ou pas. Il n’en savait rien, sachant plus que de maigres choses qui pouvaient se résumer en peu de mots : il ne pouvait faire machine arrière, même si la suite le déplaisait. Même s’il en venait à se traiter de lâche, de monstre, il ne reculerait pas. Parce qu’il voulait devenir fort, oh oui, il le voulait tellement. Devenir fort, être libre, ne jamais rien craindre de personne.

Rêve d’enfant, de Nation. Espoir vain, comme celui d’une paix, aussi lointaine soit-elle ? Peut -être. Il n’en demeurait pas moins que l’adolescent continuait d’espérer. Toujours. Comme Netsah espérait que sa relation avec Alexander ne se résumerait pas au simple mot « allié ».
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